Love Hunters : Critique câline
Dès lors qu’elle interroge ses monstres et ses frontières intérieures, l’Australie passionne. Après Les Crimes de Snowtown, Wolf Creek, The Loved Ones ou encore Animal Kingdom, c’est au tour de Love Hunters d’explorer de sombre territoires, tout en dévoilant un jeune auteur, Ben Young.
C’EST RAPTÉ
Sans retranscrire un fait divers particulier, mais en collectant de nombreux éléments issus de plusieurs affaires différentes, le jeune cinéaste s’intéresse de prime-abord à Vicki, malheureuse jeune fille kidnappée au hasard par un couple dérangé et décidé à la séquestrer. Quand ce point de départ balisait logiquement l’entame d’un récit lorgnant dangereusement du côté du torture porn, focalisé sur les souffrances d’une victime innocente, Ben Young choisit d’opérer un passionnant retournement.
Emma Booth boude
Comme son titre l’indique, Love Hunters ne s’intéresse pas tant à Vicki et ses tourments, qu’à ses tortionnaires et la dynamique perverse qu’ils entretiennent. Le couple de kidnappeur est bel est bien une entité prédatrice, dont l’entropie fonde le récit, son rythme et ses à-coups. Braconniers sentimentaux, tous deux ont intégré que leurs désirs et besoins les amenaient aux franges de l’humanité, et composent ensemble le pas de deux qui les protègent d’une chute irrémédiable.
Cette tension continue, cette valse sur les crêtes de l’humanité, Ben Young la retranscrit à la perfection dans son scénario, toujours attentif aux micro-émotions, aux infimes jeux de pouvoir qui se nouent derrière les murs anonymes d’un pavillon interchangeable.
Stephen Curry, glaçant
CROCODILE BUNDY
Le réalisateur épate également dans sa direction d’acteur, d’une belle maturité. Stephen Curry est clairement l’effet spécial du film, tour à tour magnétique et médiocrement banal, il donne vie à un vautour narcissique particulièrement redoutable. Quant à Emma Booth, elle s’accorde parfaitement à son partenaire, tout en traçant un sillon propre, qui évite impeccablement les clichés tant de la compagne victime que ceux inhérents à la figure de la complice maléfique.
Enfin, Ben Young fait également ses preuves comme narrateur visuel. Avec précision et un soupçon de cruauté, il autopsie cette banlieue désincarnée, dont l’espace commun, simultanément surprotégé et hygiéniste est constamment menacé par tous les impensés, fantasmes et accès de violence des protagonistes.
Ashleigh Cummings
BLING-CRIME
Et si sa mise en scène, qui privilégie souvent l’impact émotionnel des actions des personnages fait souvent mouche, on sent néanmoins encore la relative inexpérience du cinéaste, qui pousse souvent trop loin son goût pour l’esthétisme. Sa capacité à composer des plans (on pense aux tableaux au ralenti, plastiquement très aboutis) fignolés ne fait aucun doute, mais joue parfois contre le projet dans son ensemble.
C’était justement l’écueil qu’esquivait brillamment Justin Kurzel dans Les Crimes de Snowtown, où il parvenait à ne jamais sacrifier son goût pour l’image à la crudité qu’imposait l’horreur des situations dépeintes ou la tonalité de son scénario. Pour brillant qu’il soit, Ben Young n’est pas (encore) aussi habile funambule. Ainsi, Love Hunters souffre ici et là de quelques aspects poseurs, ou bling-bling, qui amoindrissent son impact, et dans une certaine mesure la puissance de ses personnages désaxés. Rien néanmoins qui mérite de se prémunir contre cette excellente surprise.
Lecteurs
(3.0)12/12/2017 à 00:34
Ce film est très mauvais et n a aucun intérêt