Dheepan : Critique Palmée

Chris Huby | 26 août 2015
Chris Huby | 26 août 2015

Deephan est un réfugié Tamoul. Ancien soldat, il a fui le conflit  Sri-Lankais. Il s’installe dans une cité violente de banlieue parisienne, en toute illégalité. A ses côtés, une famille fabriquée de toute pièce avec deux autres réfugiées avec qui il va devoir composer pour s’installer ensuite en Angleterre.

Le cinéma de Jacques Audiard n’est plus à présenter. Pourtant, l’un de nos grands cinéastes se renouvelle avec un traitement de personnage inédit, avec comme grande thématique celle de l’Intrus. Son héros provient d'une autre culture, il doit composer avec les codes français, au travers d’une intégration impossible et au sein d'une société qui prend l’eau de toute part.

La mise en scène d’Audiard casse ses réflexes habituels de caméra épaule, pour se diriger vers une mise en scène plus fluide, plus Scorcesienne. De même que les gros plans chers à l’auteur de De battre mon cœur s’est arrêté se font beaucoup plus rares. Pourtant le sujet, proche du reportage, s’y prêtait facilement. De ce point de vue, le cinéaste nous propose un changement dans la continuité, qui universalise encore plus son cinéma. Et en ces termes, le découpage est absolument brillant, un modèle du genre, qui privilégie en permanence l'immerscion et la lisibilité, afin de nous précipiter aux côtés de ces anti-héros perdus, dont nous partageons instantanément les angoisses et les épreuves.

Le film déploie une galerie de personnages hauts en couleurs, portée par des acteurs sont tous excellents, Antonythasan Jesuthasan en premier lieu, qui compose un Deephan tout de finesse et de sidération. A retenir Vincent Rottiers, très impressionnant dans son rôle de caïd introverti.

Les thématiques d’Audiard et de ses auteurs s’installent au fur et à mesure du long métrage. La critique totale du pays France, l’état de violence avancée, le rapport conflictuel entre les êtres, les familles et les communautés déchirées, le rapport amoureux impossible. Malgré un point de départ en apparence éloigné de son cinéma traditionnel, Audiard parvient également à servir un propos dans lequel il glisse une réflexion politique sociale radicale. Alors que certains y ont lu un message droitier, il est étonnant de ne pas y déceler une envie quasi documentaire s’éloignant justement du moindre jugement.

Tous les personnages du film sont condamnés à supporter la cité, les dialogues l’attestent très régulièrement, entre ultra violence et précarité, démerde et débrouille. On sent qu’Audiard essaie de dire tout au long de son film que malgré les efforts des individus pour se parler ou vivre ensemble, la société et sa violence inhérente font plier tout le monde. Autrement dit, c’est un vrai film social baignant dans le genre. Le personnage de Brahim sert justement de point d’ancrage à cette idée, coincé entre la violence darwiniste et son rapport simple, humain, aux gens qui l’entoure. Brisant l'opposition artificielle que le cinéma françaisdresse traditionnellement entre cinéma d'auteur et cinéma de "simple" divertissement, Jacques Audiard nous offre un somptueux bâtard, union inattendue de La Haine et des Chiens de Paille.

 

Résumé

De film sociologique, Dheepan vire au polar noir. Audiard retrouve ainsi la verve de ses œuvres les plus abouties qui mélangent habilement les genres pour créer un univers unique et cher à l’auteur.

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Lecteurs

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commentaires
sylvinception
26/08/2015 à 14:19

Antonythasan Jesuthasan.

A vous souhaits m'sieurs dames!! lol

sylvinception
26/08/2015 à 14:18

Lana Wachowski is that you ?? lololol

vax57
28/05/2015 à 11:16

Modération ? Toujours pas ?

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