Critique : Monsterz

Hideo Nakata n'avait pas été au centre de nos préoccupations depuis quelques années. Et pour cause, entre sa volonté d'échapper aux limites du genre fantastique et ses désirs de cinéphiles, le metteur en scène explorait, mais ne nous parlait plus. Un gouffre entre public et artiste enfin comblé avec Monsterz, film énergique et volontaire dont les défauts comme les qualités composent une œuvre étonnante.

Un homme capable de contrôler n'importe quel humain. Un autre, unique individu en mesure de lui résister. De leur confrontation naît un récit à mi-chemin entre comic book et comédie de mœurs décomplexée, un récit irrégulier mais étonnamment accessible. De Ring à Dark Water, le metteur en scène de nos terreurs intimes ne s'était pas illustré par son envie de décloisonner le genre et pourtant, c'est bien ce que Nakata nous propose. Malgré une première demie heure qui souffre d'un budget réduit, de personnages un tantinet caricaturaux et de quelques séquences ratées (l'attaque des jumeaux musculeux, aussi inutile que mal chorégraphiée), Monsterz enchaîne les idées et les propositions avec une vigueur incroyable.

Le rythme suivant l'évolution de l'intrigue, le spectateur passe progressivement de celui d'un téléfilm de luxe à une relecture enragée des classiques du manga. Si la référence à Akira n'est pas aussi digéree qu'on se prête à le rêver, le metteur en scène n'oublie pas de revisiter une figure essentielle du fantastique japonais : la foule. Impensé fondamental ou élément de terreur, la masse des silhouettes qui entoure nos héros finit par jouer un véritable rôle dans les dernières scènes du film. La conclusion, qui passe brusquement d'un suicide collectif quasi-épique à un drame intime lancinant, achève d'en faire une aventure, bancale certes, mais d'une générosité peu commune.

EN BREF : on avait quitté Nakata fatigué, quelle joie de le retrouver curieux et inventif.