Critique : Les Folles inventions de M. Bricolo

Nicolas Thys | 4 février 2012
Nicolas Thys | 4 février 2012
Quand on parle du cinéma burlesque muet, le plus souvent sont cités Charlie Chaplin, Buster Keaton et Harold Lloyd. Nombre d'autres grands noms sont tombés dans l'oubli et leurs films ont bien souvent disparu. C'est le cas de Charley Bowers, plus connu en France sous le nom de M. Bricolo, acteur dont on ne sait que peu de choses (même sa date de naissance varie selon les sources, entre 1877 et 1889), qui a commencé animateur pour quelques studios dès les années 1910 avant de devenir acteur au milieu des années 1920 mais sans réussir à dépasser la période muette. Après 1928, il devient illustrateur de livres pour enfants, dessinateur dans des journaux et il officie très ponctuellement pour le cinéma avant de disparaître dans l'anonymat en 1946.

Redécouvert sur le tard, plusieurs de ses films en tant qu'acteur/réalisateur sont considérés comme perdus mais d'autres ont pu être découverts, reconstitués et restaurés. Ce sont trois d'entre eux que ce programme présente, parmi les meilleurs qu'il ait fait. Et, même si Bowers se situe clairement dans la veine burlesque, il se démarque de tous les autres acteurs de l'époque. En effet, loin de se limiter à des gags corporels, Bowers, technicien hors pair avant d'être comédien, s'amuse à mêler prises de vues réelles et animation en donnant vie à objets dans des séquences étonnantes, aux fortes tendances surréalistes et absurdes. Il est d'ailleurs encensé par André Breton dans les années 1920.

Et si certains s'imaginent que les effets produits sont sûrement simplistes, ils se trompent. A une époque où l'animation d'objets est encore balbutiante, malgré les merveilles déjà enfantées par Starewitch, le dessin animé arrivant à peine sur les écrans, Charley Bowers réalise des prouesses. A voir les chats sortir d'une tige plantée dans un pot de fleurs, le microbe qui rend glissantes les peaux de banane ou les chaussures qui font danser le Charleston, on voit clairement que le monde de monsieur Bricolo et les infinies possibilités qu'il offre n'appartiennent qu'à lui. Et les effets réalisés sont déjà d'une qualité exceptionnelle.

En quelques films, Bricolo réinvente le mouvement du monde. Et nul doute que Charley Bowers ait pu avoir une influence sur d'autres artistes après lui. Son univers prend place dans la réalité, la sublime et il lui apporte une rêverie sans pareil. Son imaginaire est débordant et n'a d'égal que sa naïveté. Et si certains des objets qu'il anime renvoient directement aux premiers automates et à Méliès, son travail purement artisanal et sa capacité à aller chercher et faire apparaître le merveilleux dans le réel font automatiquement songer aux plus belles séquences des films de Michel Gondry.

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