Critique : Chico & Rita
Chico est un pianiste en devenir, aussi doué qu'attaché à ses racines, Rita une chanteuse envoûtante. L'inconséquence de l'un et l'ambition de l'autre les rapprocheront puis les sépareront, le tout au rythme de leur musique. La première réussite de ce film d'animation est de nous proposer deux personnages profondément humains et réalistes, aussi doués que pétris de défauts, dont le parcours entremêlé touche immédiatement le spectateur. Ce point de départ permet au récit d'installer une belle et profonde sensualité, dont la beauté est de naître autant du style graphique, chaud et épuré, que des choix ou pulsions de ses personnages, toujours au premier plan.
Le rythme de l'ensemble sied particulièrement à la partie cubaine du récit, et nous permet de ressentir les pulsations amples et torrides de cette époque révolutionnaire, il est beaucoup moins adapté à la partie New Yorkaise. Alors que le destin des héros s'accélère, et que les sons se marient en un boeuf où perdition et gloire sont indissociables, la douce indolence de l'ensemble finit par nuire quelque peu au propos. Si le charme ne se rompt jamais, on aurait aimé quitter la lenteur moite des premières séquences pour ressentir l'urgence qui étreint Chico et Rita alors que l'Histoire et leurs destins basculent.
Si le film ne parvient pas tout à fait à nous emporter dans la fresque romanesque qu'il esquisse, il a cependant le mérite d'inscrire de véritables personnages dans un contexte historique dont on n'oublie parfois la dureté et la complexité. De la condition des musiciens noirs aux États-Unis, en passant par la révolution cubaine et ses égarements, Chico & Rita révèle les origines d'une musique aujourd'hui emblématiques, nous rappelle qu'elle bat au rythme des coeurs parfois meurtris de ceux qui la jouent. C'est déjà beaucoup.
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