Critique : La Source des femmes

Louisa Amara | 21 mai 2011
Louisa Amara | 21 mai 2011

Radu Mihaileanu, réalisateur roumain s'est passionné pour le Maghreb et les femmes de cette région en particulier. Leurs chants, la culture, les danses, les traditions, il nous révèle le fruit de ses recherches. Plongeant corps et âme dans un village où la tradition règne, il nous dépeint le quotidien de femmes soumises qui décident enfin de se révolter. Si l'histoire se déroule dans un lieu non précisé (Maghreb ou Moyen Orient) et sans véritable date, c'est aussi parce qu'elle aurait pu se dérouler n'importe où. C'est cet aspect universel qui touchera, on l'espère, le jury cannois.

De tout temps et de tout pays (zaï, zaï zaï !), les femmes ont été dominées par les hommes, et forcées à accomplir toutes sortes de tâches quotidiennes pénibles et dangereuses. Dans ce village, tous les jours les femmes risquent leur vie, et celle de leurs enfants à naitre, en allant chercher l'eau dans la montagne. C'est lors de l'enième fausse couche de l'une d'elles, que Leïla, meneuse du groupe, se révolte et propose alors sa stratégie : la grève de l'amour. Aucune femme du village ne se donnera à son mari, tant que l'eau n'arrivera pas directement au village. Malgré les coups, les menaces, les pressions, c'est unies qu'elles se battent. Ce combat sans violence rappelle les manifestations pacifiques de Gandhi. Tout comme le leader indien, Leila est instruite et se sert même des versets du Coran pour convaincre. Une ode à la tolérance, au progrès, à l'émancipation des femmes par le seul pouvoir qu'elles ont toutes : le sexe.

Et quel culot de la part du réalisateur d'avoir osé traité du sexe dans une société musulmane traditionnelle ! Faisant appel à l'héritage littéraire arabe, les Milles et une nuit, il nous rappelle que la sensualité des femmes arabes, leur science de la séduction légendaire, est toujours vivant. Et ce savoir, utilisé à bon escient, est une arme puissante. 

Pour porter ce film, où il n'est question que d'amour, de pouvoir, de politique et de religion (un peu), il fallait un groupe d'actrices à la hauteur. Leila Bekhti convainc par sa sensibilité, sa force dans un rôle qui exploite enfin tout son potentiel. La jeune Hafsia Herzi joue de son espièglerie naturelle pour interpréter la plus jeune sœur. Sabrina Ouazani, vive, sensuelle et drôle, est une des révélations du film. Sans oublier les ainées, Hiam Abbas, et surtout Biyouna, qui trouve un rôle à sa démesure. En face de ces femmes, peu d'hommes tirent leur épingle du jeu, on remarquera en particulier Saleh Bakri, en mari de Leila, érudit, courageux et très amoureux.

Un beau film universel, sensible et politique, qui trouvera écho, on l'espère au Maghreb, au  Moyen Orient, et dans tous les pays où les femmes sont opprimées.

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