Critique : Attenberg

La Rédaction | 20 septembre 2011
La Rédaction | 20 septembre 2011

L'ouverture du film pose d'emblée le thème du charnel au centre de l'attention. Deux jeunes femmes d'une vingtaine d'années, Marina et Bella, se roulent une galoche à la manière d'un enfant de 10 ans. Avant même de rencontrer les personnages, on assiste à cinq bonnes minutes de baisers baveux où deux langues s'engloutissent mutuellement comme deux grosses limaces entortillées l'une sur l'autre. Marina, en élève assidue, s'adonne goulûment à l'exercice et finit par avoir la nausée, la transmettant avec efficacité à son public. La séquence a beau être scabreuse, elle informe sur le degré d'ignorance dans lequel l'héroïne est plongée.

Le corps est presque un personnage à part entière dans Attenberg, l'animalité intrinsèque à chaque Homme tout du moins. Et le titre du film est loin d'être un hasard car il fait référence à Sir David Attenborough, un chercheur naturaliste britannique, auquel les personnages ne cessent de faire référence. Malgré une sensation de latence, Attenberg est une proposition de cinéma. L'absurde vient ponctuer par à-coup une intrigue centrée sur quatre personnages qui peuplent une ville industrielle de la côte grecque. Des scènes d'imitation d'animaux, aux allures de performances artistiques, viennent remplacer le verbal. Le corps dit ce que les mots taisent et Marina observe son corps comme un étranger. Rapidement, la vie va la contraindre de se baigner dans la société et elle ne pourra malheureusement pas couper aux désirs sensuels. Attenberg sert le conte initiatique de cette nymphette qui se soumet peu à peu aux plaisirs de la chair, finissant par dévoiler ses courbes à un inconnu, rencontré autour d'une table de babyfoot.

A 23 ans, Marina a la mentalité d'une enfant de huit ans. Aucun retard mental, cela dit, juste le choix délibéré de se retirer du monde social pour se bâfrer dans les documentaires animaliers et les jeux de rôle avec son père. Une page blanche que la vie n'a pas encore réussi à tâcher dont Bella, sa meilleure amie, représente la seule fenêtre vers l'extérieur. Entre une relation fusionnelle avec son père et une amitié exclusive et rassurante, Marina ne voit pas l'utilité de se frotter aux hommes et à leur pénis, source d'un véritable dégoût. Le film ne facilite pas la tâche du spectateur, laissant les zones d'ombres s'éclaircir par elles-mêmes et misant sur l'indulgence de son public. Les liens entre les personnages se clarifient tardivement, si bien qu'une impression étrange s'immisce dans les premières minutes. Le père est-il l'amant ? Bella est-elle la sœur ? Cette obscurité dans laquelle plonge le film lève le voile sur la complexité des rapports humains. Il n'existe pas de normalité. Marina en est la preuve vivante et attendrissante.


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