Critique : Les Invités de mon père

Sandy Gillet | 31 mars 2010
Sandy Gillet | 31 mars 2010

Alors que l'on est encore sous le « charme » de son premier long, Anne Le Ny, qui reste plus connu devant que derrière la caméra, s'invite donc une deuxième fois à la table de ces cinéastes français qui de film en film se construisent un univers cinématographique bien à eux. Si à première vue le sien semble être cousin du duo Jaoui-Bacri, il n'est pourtant nulle question ici d'asséner de leçons de moral et encore moins de porter des jugements sur ses personnages. Et si avec Les invités de mon père, elle semble se complaire à raconter de nouveau une histoire d'amour compliquée (un patriarche respecté et craint d'une famille bourgeoise s'entiche d'une réfugiée d'un pays de l'Est de 60 ans sa cadette...), c'est pour mieux s'intéresser et mettre à nue les contradictions et fêlures d'une famille en apparence unie.

Un postulat qui permet à la cinéaste d'explorer non pas la dernière folie héroïque d'un homme  sur la fin de sa vie en mal de tendresse mais bien les dommages collatéraux d'une telle union (car le bougre se marie sous couvert d'offrir à la donzelle des papiers en règle) à commencer par les deux enfants joués par Luchini et Karin Viard au diapason d'une mise en scène en apparence toute en retenue. L'idée étant alors de pousser très loin une situation de départ et d'assister à une sorte d'expérience de laboratoire où tout le monde se cogne aux quatre coins de l'écran avec en fil rouge ce père qui bafoue un à un les codes qu'il avait lui-même érigé en dogme. Les repères envolés, chacun réagit (enfin) selon son vrai caractère. Le père devenant dès lors une sorte de catharsis qui le rend simplement humain.

Tout cela Anne Le Ny nous le montre via des dialogues savoureux et des mises en situation qui ne le sont pas moins alternant passage dramatique et humour salvateur au sein du même plan. On est frappé par tant de subtilité et par cette propension à laisser le spectateur mariner dans le jus de ses propres interrogations (qu'aurais-je fais dans la même situation ?) tout en se gardant bien de ne jamais donner de réponses préfabriquées. Toutefois l'équilibre est fragile et peu sur la fin frustrer ceux  qui sont peu habitués à une conclusion à ce point (trop ?) ouverte.

C'est de toute façon voulue, assumée et en total logique avec le reste du film. Anne Le Ny n'est en effet pas là pour caresser le spectateur, confortablement assis dans son fauteuil de cinéma, dans le sens du poil de ses convictions. Le but étant de nous placer au centre de ce qui se joue à l'écran en nous mettant aussi mal à l'aise que les protagonistes de son histoire. C'est peu de dire qu'elle y réussie pleinement !

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