Critique : Pluie du diable
Le genre documentaire semble avoir trouvé sa place au cinéma : pas une semaine sans que sorte au moins un doc, la variété des fonds et des formes permettant d'offrir un large éventail de possibilités. La sortie de Pluie du diable est l'occasion de ressortir des cartons un débat archi rebattu, mais pourtant toujours prégnant : tous les documentaires ont-ils leur place au cinéma ? Est-il même dans leur intérêt de sortir sur grand écran ? Rien n'est moins sûr, et le film de Philippe Cosson en est un exemple édifiant. C'est un film informatif, instructif, plutôt pédagogique mais, nom d'une bombe à sous-munitions, où est le cinéma là-dedans ? Quelle est la part d'art qui s'y cache ? Difficile de répondre : cet exposé magistral, d'une banalité formelle absolue, peut éventuellement intéresser par les thèmes qu'il embrasse, mais peine véritablement à justifier sa sortie en salles.
Pluie du diable
déroule une succession d'interviews et d'images d'archives qui montrent
que certaines zones de notre planète sont de vrais champs de mines. La
partie la plus intéressante du film est celle où, chiffres à l'appui,
des spécialistes du déminage tentent d'estimer le temps nécessaire pour
débarrasser complètement ces territoires des centaines de milliers de
mines qui s'y terrent - dans le cas très optimiste où d'autres guerres
n'éclatent pas. La réponse se compte en siècles, et cela fait froid
dans le dos. Tout comme ces images de laotiens qui tentent de gagner
chichement leur vie en récupérant le métal des mines pour le revendre
et se faire quelques maigres pièces.
Puis Cosson va trainer sa
caméra du côté d'un salon de l'armement, et montre les méchants
marchands d'armes comme s'il découvrait leur existence. D'où une
impression de totale démagogie doublé d'une absence totale
d'enseignements. La seule conclusion que le film semble tirer, c'est
que tout ceci est la faute des Américains, eux et eux seuls. Une telle
absence de discernement laisse songeur. Mais, le film ne prenant pas la
peine de poser une problématique en bonne et due forme, on ne pouvait
guère attendre de réponses plus fines que celles-ci. Pluie du diable
aurait peut-être eu sa place dans les émissions du dimanche soir sur
M6, où il aurait touché plusieurs millions de spectateurs sans effort,
mais rien ne laisse penser que sa sortie ciné ressemble de près ou de
loin à une bonne idée.
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