Critique : Le Dernier pour la route

Thomas Messias | 23 septembre 2009
Thomas Messias | 23 septembre 2009

Souvent, évoquer le classicisme d'un film est souvent une critique destinée à dénoncer un manque d'originalité dans le style ou dans le ton. Et puis parfois, il arrive qu'un film soit classique et que ce soit très bien comme ça. Oeuvre pas impérissable mais d'une facture extrêmement satisfaisante, Le dernier pour la route appartient à cette catégorie, son absence de partis pris marqués et d'idées fantaisistes semblant lui apporter une certaine force. Il est tellement difficile d'aborder l'alcoolisme sans tomber dans le pathos ou le sordide que Philippe Godeau - producteur de renom et réalisateur débutant - a eu mille fois raison de faire dans la sobriété la plus totale.


La sobriété, c'est justement l'un des thèmes principaux de ce Dernier pour la route qui n'est ni plus ni moins que l'histoire de la thérapie d'un homme tentant de se sortir des griffes de l'alcool. Inspiré du récit du patron de presse Hervé Chabalier, le film se cantonne à une période bien précise de sa vie, à savoir son entrée en cure et les cinq semaines de soins qui suivent. Avec une huitaine de compagnons souffrant du même mal que lui - « la seule maladie dont personne n'est jamais tout à fait guéri », reprécise le film -, il tente de surmonter des obstacles plus mentaux que physiques et de faire le point sur sa vie passée, ses envies, ses attentes, le points forts qui vont l'aider à s'en sortir. Le menu est assez prévisible, mais le traitement est d'une telle pudeur qu'on fait très vite corps avec cet anti-héros aussi pathétique que poignant. Il doit énormément à un François Cluzet toujours aussi habité. Avant lui, Dany Boon et Christian Clavier avaient accepté le rôle puis s'étaient désistés ; quoi qu'on pense du ch'ti et de Jacquouille, nul doute que le film a gagné au change.


D'un film pareil, on peut affirmer - comme on aurait pu le faire avant même de l'avoir vu - que c'est une belle leçon de courage, un plaidoyer pour la vie, un témoignage adressé à ceux qui aiment trop la bouteille et souhaiteraient pouvoir s'en décrocher. Des formules un peu surfaites mais qui collent pleinement du Dernier pour la route. Celui-ci évite cependant l'optimisme béat et l'apologie simpliste des bienfaits de la thérapie : il semble évident, bien avant un épilogue en forme de bilan collectif, que ces cinq semaines n'auront pas eu le même effet sur tout le monde. Et c'est peut-être dans cette fin que le film prend le plus de risques, affirmant avec témérité que l'égoïsme est parfois inévitable pour qui souhaite se sortir de la tourmente, quitte à laisser les autres boire la tasse. Difficile de dire si un cinéaste est né, mais Philippe Godeau a en tout cas su faire preuve de la retenue nécessaire pour ne pas se planter dès son premier long.

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