Critique : Humpday

Thomas Messias | 17 septembre 2009
Thomas Messias | 17 septembre 2009

À la base de Humpday, il y a cette idée toute simple et pourtant jamais exploitée, reprise dans le slogan de l'affiche : « avez-vous déjà essayé votre meilleur ami ? ». Soit l'histoire de deux potes de toujours, clamant haut et fort leur hétérosexualité, et décidant de participer à un festival de porno amateur. Leur défi ? Coucher ensemble et filmer le résultat, eux qui n'ont jamais éprouvé le moindre désir l'un pour l'autre et qui ne vivent cette expérience à venir que comme un pur défi. Scénariste et réalisatrice, Lynn Shelton tire de ce sujet potentiellement graveleux une comédie aux accents dramatiques sur l'identité sexuelle, l'inné et l'acquis, l'amitié et la façon dont elle se traduit.


Sur le papier, le premier film de Shelton fait penser au cinéma de Kevin Smith, à la croisée de Clerks - pour les discussions interminables entre potes et l'image cradingue - et Zack & Miri font un porno - toujours inédit dans les salles françaises, même que c'est un pur scandale. Mais Humpday tire son épingle du jeu et trouve son style propre, sans nul besoin de références, grâce au naturel de ses interprètes et à la liberté de dialogues croustillants. Bien écrits, ne cherchant jamais la provoc pour la provoc ou le gag pour le gag, ceux-ci sont au coeur d'une oeuvre qui ne fait pas de l'image une priorité. Le fameux jour J où tout doit arriver est d'ailleurs composé en majorité de plans sur chaussettes, fringues jetées çà et là et éléments de décors. Le but n'est clairement pas de tomber dans un érotisme troublant ou potache, et c'est sans doute là que réside la réussite d'un film modeste mais atteignant son but sans difficulté.


Souvent drôle, le film est cependant loin d'être une comédie pure, se focalisant en fin de course sur la gène éprouvée par les deux protagonistes à l'approche du moment fatidique. Leur malaise est communicatif et se révèle propice à une réflexion ouverte sur notre rapport à la sexualité en général... et à l'homosexualité en particulier. Le spectateur hétéro s'identifie rapidement aux héros, s'imagine à leur place, et réalise rapidement s'il aurait été capable ou non d'aller jusqu'au bout de sa mission. Humpday place les personnages, et donc les spectateurs, face à la part d'homophobie qui est peut-être en eux, qu'elle soit refoulée - la plupart du temps - ou avérée - mais peu d'homophobes purs et durs iront voir le film. Rarement film au sujet apparemment si léger se sera révélée aussi gênant aux entournures pour les bien-pensants que nous sommes. Il y avait bien longtemps qu'un film indé parfaitement fauché n'avait pas fait office de coup de pied dans la fourmilière, absolument pas calculé mais touchant sa cible avec précision.

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