Critique : Le Hérisson
« Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? », s'interrogeait Pedro Almodóvar il y a un quart de siècle. Une question toujours d'actualité, notamment pour qui vient de gâcher une centaine de minutes devant Le hérisson, libre adaptation - paraît-il assez fidèle - du best-seller surprise de Muriel Barbery. Si le roman avait divisé, le film devrait logiquement faire l'unanimité tant il déploie une vacuité constante de la première à la dernière image. Ça commence avec cette petite fille supérieurement intelligente et donc suicidaire, qui se met en tête de faire un film sur ceux qui l'entourent - et qu'elle méprise. On sait dès l'annonce de ce suicide programmé qu'elle ne passera jamais à l'acte ; et on le regrette âprement, tant le personnage n'est qu'une baudruche et tant son interprète ressemble à un plaidoyer pour la vasectomie. Que la petite Paloma soit une gosse surdouée, soit ; que ça l'autorise à débiter des phrases interminables et absolument factices, non.
Le hérisson
ne raconte pour ainsi dire rien du tout, si ce n'est la rencontre en
triangle de Paloma, de la concierge taciturne de son immeuble et d'un
nouveau locataire d'origine japonaise. Ce dernier est le moins
inintéressant car il parle peu. Face à lui, une Josiane Balasko
toujours aussi persuadée que porter une tignasse bien crasseuse est une
condition nécessaire et suffisante pour être convaincante
(rappelez-vous Cette femme-là). Les échanges des 3 personnages sont d'une banalité absolue, le seul et unique message semblant être le très rengaine « méfiez-vous des apparences
». Alors oui, certes, on veut bien aller au-delà de l'enveloppe
physique, mais pourquoi faire ? Pour découvrir que la concierge a lu
plein de bouquins, ce qui semble immédiatement faire d'elle quelqu'un
de très bien ? Le film ne va pas plus loin que ça, et c'est assez
consternant.
La forme est elle aussi assez agaçante. Très souvent,
l'action est vue à travers la caméra de la jeune fille, qui déblatère
en voix off contre le monde entier. L'image est d'une laideur assez
terrible - le reste du temps elle n'est qu'ordinaire - et la voix assez
inaudible. Comme si le calvaire n'était pas suffisant... Et puis il y a
la fin. Comme souvent dans les films qui n'ont rien à raconter, elle
est pire que tout, histoire de créer un semblant de surprise chez le
spectateur bien déterminé à comprendre pourquoi il a payé son ticket.
Le dénouement du Hérisson est
plus idiot que tout ce qui précède, versant tout à coup dans le
lacrymal le plus total. La dernière impression est la bonne : celle
d'un film manipulateur et manichéen, qui réjouira peut-être deux ou
trois petites vieilles mais ne manquera pas d'en consterner plus d'un.
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