Critique : Milestones

Nicolas Thys | 14 octobre 2008
Nicolas Thys | 14 octobre 2008

Une dame âgée au travail à 70 ans passés, des mères, des pères, des filles, des enfants déjà là ou à naître, des hippies acuponcteurs, des vagabonds, un ex-taulard, une documentariste. Une nation dans toute sa richesse. Même sans lien réel les uns avec les autres, Milestones de Robert Kramer et John Douglas, sorti en 1975, montre une communauté unie à travers un héritage commun : le génocide indien, la traite des noirs et à cette époque, les années 1970, la lutte armée au Vietnam. Plus de 30 ans après son tournage le constat est clair, et c'est une impression de liberté perdue, laissée à l'abandon qui ressurgit de cette fresque étonnante et bouleversante.

 

Dans les pays anglo-saxons, le terme « milestone » désigne une borne routière. Sans véritablement être un road movie, les cinéastes parcourent les Etats-Unis afin de dresser un état des lieux d'une Amérique plus que jamais en mutation, politique, culturelle ou géographique. Une Amérique qui prend conscience de son passé, de son présent et qui guette son avenir. Confrontant plusieurs générations, les entrelaçant dans un montage chaotique qui passe d'un visage à l'autre, d'une famille à une autre, d'une vie à une autre sans lien réel que le lieu d'où il vienne et qui les ont fait, Milestones réalise l'un des plus beaux et des plus justes portraits d'une l'Amérique rebelle sinon révolutionnaire dans toute sa diversité et sa complexité.

 

Fiction documentaire, documentaire « fictionné », ici les deux univers se mêlent pour former un objet hybride. Volonté de dépasser deux conceptions souvent antagonistes du cinéma, de les réunir, le cinéma de Kramer tente essentiellement de parler de la vie et de montrer que tout désir de fiction se doit de passer par une monstration du réel et que pour représenter la vie, le rêve est une voie royale. Et, finalement, Milestones ce n'est que ça : un parcours à travers une certaine idée de la liberté et de la vie dans toute son abstraction, sa beauté et sa brutalité que résume la séquence (presque) finale d'un accouchement vu frontalement où le bonheur de voir surgir une vie nouvelle s'accompagne de vomissements, de cris et de sang.

Résumé

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