Critique : La Colline a des yeux

Sandy Gillet | 15 octobre 2004
Sandy Gillet | 15 octobre 2004

Grand film malade, témoin d'une époque et d'une société qui ont perdu tous leurs repères, La colline a des yeux reste aussi le chef de file précurseur d'un sous-genre baptisé fort justement le « survival horror », dont les autres fleurons de l'époque ne sont autres que Massacre à la tronçonneuse de Hooper ou encore Delivrance, de Boorman.
Partant d'un postulat de départ qui se permet d'accumuler pas mal des poncifs du genre, Wes Craven en explore, avec un bonheur évident, toutes les possibilités visuelles et narratives, et réalise un film d'horreur nihiliste d'une rare violence.

S'inspirant d'une histoire vraie ayant eu lieu dans l'Écosse du XVIIe siècle, où une famille de paysans sombra dans le cannibalisme du fait de la misère de leur condition, et qui, une fois retrouvée, fut condamnée à mort dans des souffrances atroces, Craven voulait aborder en fait une des thématiques essentielles à sa filmographie : le pire des crimes est souvent « réparé », au sein de sociétés dites civilisées, par la pire des atrocités.
Ainsi, avec Craven, les victimes deviennent-elles souvent à leur tour des bourreaux aussi impitoyables que ceux qui sont à l'origine de cette transformation. Et La colline a des yeux ne revendique rien de plus que ce constat renvoyant tout le monde dos à dos, quand il ne précise pas justement que sommeille en chacun de nous, personne éduquée et civilisée, une bête sauvage qui ne demande qu'à se réveiller.

Troisième long métrage (si l'on compte Together, qu'il réalisa avec Sean S. Cunningham), de celui qui deviendra, à son corps défendant, le maître de l'horreur de ces dernières décennies, La colline a des yeux reste encore aujourd'hui ce film à la modernité formelle et visuelle ahurissante (violence graphique et réaliste, puissance de la mise en scène aride et efficace au tempo hallucinant, style général proche du documentaire), adoubée par une thématique malheureusement intemporelle lui conférant à bien des égards ce statut de film culte.

La colline a des yeux se visionne, quel que soit le nombre de fois, aux forceps, s'inscrivant dans une filmographie profondément originale et radicalement déviante, vestige d'une époque où le cinéma américain faisait encore preuve d'une extraordinaire vitalité.

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