Critique : 10 canoës 150 lances et 3 épouses

Un long travelling survole le bush Australien, ses marécages, sa faune et sa flore luxuriante. Encore un peu, et l'on se croirait face à l'une des expéditions sauveteuses d‘Ushuaïa Nature. La terre vue du ciel, y'a rien de tel pour flatter notre instinct nomade…Puis la voix off d'un narrateur mutin s'infiltre sous le celluloïd. Il n‘y a plus de doute possible, ce n'est pas Nicolas qui nous parle. Mais un vieil aborigène qui désire nous raconter une légende ancestrale à la morale universelle. De celles qui mettent l'eau à la bouche en remettant les idées bien en place. Sa démonstration remonte le cours du temps pour nous initier aux mœurs du peuple Ramingining. Cette tribu tranquille qui sillonne la brousse nue comme un ver, vit en parfaite harmonie avec la nature. Chasse, cueillette, polygamie fertile…Leurs rituels auraient des goûts de paradis, si la magie noire n'y mettait pas son grain de sel. Toutes les communautés entretiennent des croyances abracadabrantesques, celle-ci n'échappe pas à la règle. Et fatalement, de superstitions en désenvoûtements, l'Eden subit quelques secousses sismiques.

Mais revenons-en à nos moutons : quid de cette leçon sensée élever notre conscience au nirvana de la sagesse ? Dès qu'il s'agit de transmettre leurs expériences, nos aïeuls se perdent toujours dans leurs souvenirs. Ça ne rate jamais. Certains y voient quelque chose de charmant, d'autres une source intarissable d'ennui. Et vas-y que j'emberlificote le fil de la conversation, et voilà que je te saoule de détails qui n'ont rien à voir avec mon cours magistral et patati et patata. Les circonvolutions n'en finissent plus et souvent, on attend perpette la chute d'une histoire plate comme une limande. Malgré un prologue intriguant, 10 canoës, 150 lances et 3 épouses est typique de ces brins de causette avec Papi gâteau. Au bout d'un quart d'heure d'errances stériles, on pique du nez. Respect dû aux aînés oblige, on lutte contre la narcose, en espérant que son enseignement portera ses fruits. Toute parabole devrait déboucher sur un axiome valable, pas vrai ? Oui mais…non ! Dans le cas présent, tous ceux qui savent déjà que la patience est d'or peuvent boycotter cette fable ronronnante sans scrupule.