Critique : Full Monty / Le Grand jeu

Par Johan Beyney
9 mars 2004
MAJ : 25 octobre 2018
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Si vous ne comprenez toujours pas pourquoi en soirée, lorsque résonnent les premières notes de Hot stuff, tout le monde se met en ligne en agitant le bassin d’avant en arrière, c’est que vous avez raté l’un des plus grands succès cinématographiques de l’année 1997 et ses multiples rediffusions télé. Et à vrai dire, on se demande comment vous avez fait…Surprise du box-office, ce petit film anglais reste, avec le temps, l’un des représentants les plus réussis de ce pan du cinéma britannique qu’est la « tragicomédie ouvrière » (pour en savoir plus, lire la critique d’Une belle journée, dernier rejeton du genre).

De manière très ironique, le film s’ouvre sur des vues aériennes de Sheffield, symbole d’une industrie florissante. Ces images datées masquent pourtant la dure réalité sociale de la Grande-Bretagne « thatchérienne » et de ses banlieues ouvrières, marquées par la misère et le chômage. Entre soirées au pub et file d’attente à l’agence pour l’emploi, Peter Cattaneo filme de manière simple des gens qui le sont tout autant, et brosse une galerie de portraits drôles et émouvants. Parmi eux, Gaz (Robert Carlyle, impeccable), chômeur et père en quête de reconnaissance, va se retrouver à l’initiative d’un projet assez décalé au vu du contexte : monter un spectacle de strip-tease intégral. Les femmes du coin, émoustillées par la venue en ville d’un spectacle de Chippendales bodybuildés, ne seront-elles pas encore plus enthousiastes à la perspective d’un show avec de vrais hommes au physique plus… pittoresque ?

Du casting aux répétitions, de l’espoir aux hésitations, le ton de la comédie s’installe alors de manière très efficace et laisse place à des scènes d’une drôlerie mémorable (le strip-tease « nicotiné » de Gaz, le casting hétéroclite, la découverte des « atouts » de certains participants…). La force du film réside ici dans la volonté du réalisateur de ne jamais détacher son intrigue comique du contexte social dans lequel évoluent ses personnages. Plus que l’argent que va rapporter le spectacle, c’est la démarche qui compte ici : se fixer des objectifs, assumer ses choix et son physique, passer outre la honte et, finalement, retrouver une dignité perdue.

Dans des régions dévastées par le chômage et la pauvreté, un spectacle de strip-tease – ou un film – peut apparaître comme une occupation peu prioritaire. The Full Monty rappelle ici, avec humour et tendresse, à quel point la futilité est parfois essentielle.

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