In the Land of Saints and Sinners : critique d'un Liam Neeson presque bien sur Amazon

Liam Neeson se la joue clint eastwood

On ne change pas une recette qui ne coûte pas cher et demande peu d'efforts. Alors comme d’habitude, Liam Neeson incarne un vieux briscard habitué de la gâchette. Et pour ne rien changer, voilà que son petit fief paisible où il a déjà bien entamé sa préretraite est perturbé par des malfrats sortis de nulle part. Ni une, ni deux, Liam Neeson (enfin, Finbar Murphy) va protéger une jeune et pure innocente de passage dans la vie du héros aux traits fatigués.

Et si le sentiment de déjà-vu est aussi persistant, c'est parce que le précédent métrage de Robert Lorenz, Le Vétéran, a un synopsis quasiment similaire. La frontière mexicano-américaine a néanmoins été troquée pour la grisaille du fin fond de l'Irlande natale de Liam Neeson. D'ailleurs, l'acteur était déjà la tête d'affiche de Le Vétéran, ce qui marquait le début de sa collaboration avec le réalisateur. On avance donc en terrain bien trop connu.

Liam Neeson dans ses huit derniers films

Toutefois, In The Land of Saints and Sinner a un éclair de lucidité le faisant passé de thriller oubliable comme l'était Le Vétéran à film titillant notre curiosité. Car le scénario de Mark Michael McNally et Terry Loane a la bonne idée d’exploiter la carrière très mécanique de Liam Neeson pour alimenter son personnage de tueur rabougri par des années de meurtres. En effet, comme l’acteur enchaînant les mêmes rôles de justicier trop vieux pour ses conneries, l’assassin qu’il incarne élimine ses cibles dans une routine banale.

Ainsi, dans son premier acte, Neeson en devient réellement touchant en sympathique voisin pressé d’enterrer sa vie violente comme il enterre des cadavres. Quand on voit ce vieux monsieur passer du bon temps avec le seul policier du coin – interprété par Ciarán Hinds – et se renseigner sur l'entretien des géraniums pour son futur petit jardin, ça traîne en longueur, mais c'est là où Liam Neeson paraît le plus sincère et impliqué. Et ce côté méta du personnage rappelle forcément la façon dont Clint Eastwood raconte sa vieillesse par son cinéma.

"Ce soir, on tue pas. On fait un Scrabble j'te dis !"

Le naturel revient au galop

Pour donner plus de force à son récit d'homme aux mille aventures sur le point de tourner la page, Robert Lorenz filme ainsi l’arrière-pays irlandais comme un néo-western. La caméra s'attarde donc autant sur les superbes paysages aux teintes désaturées et ce village de quatre habitants, que sur le visage buriné de l'acteur principal. Mais ça ne fait pas tout et, très vite, les vieilles habitudes du Liam Neeson Cinematic Universe toquent à la porte.

Éternels sacrifiés dans les longs-métrages où le Steven Seagal irlandais est présent : les antagonistes. Encore une fois, ils n'existent que pour se faire dézinguer à coups de fusil à doubles canons. Pourtant, Kerry Condon – dont la performance dans Les Banshees d'Inisherin lui a permis d'empocher une dizaine de récompenses – tient avec passion le rôle sous-développé de la meurtrière en chasse de notre bon Finbar.

Obi-Wan et Qui-Gon

Et comme tout bon film avec un héros sur le départ, il lui faut dans les pattes un jeune prodige à qui il va transmettre des leçons de vie. Ici, c'est Jack Gleeson (Games of Thrones) qui cabotine gentiment avec ce que son personnage de tueur fraîchement lancé sur le marché du travail lui permet.

Alors, est-ce que Liam Neeson a le sentiment de tourner en rond ? Exprime-t-il avec In the Land of Saints and Sinners son envie de devenir jardinier et non plus une star bloquée dans un archétype de bourrin ? Le fait que Robert Lorenz amène le spectateur à ses réflexions suffit à élever son métrage au-dessus de bon nombre des derniers rôles de Liam Neeson. Et on se contentera pour cette fois.

In the Land of Saints and Sinners est disponible depuis le 1er mars 2024 sur Amazon Prime Video