The Kitchen : critique des petits-fils de l'homme sur Netflix
Révélé au grand public dans Get Out et oscarisé pour Judas and the Black Messiah, Daniel Kaluuya passe cette fois derrière la caméra pour The Kitchen, co-réalisé avec Kibwe Tavares, architecte londonien devenu cinéaste. Le film s'inscrit dans la droite lignée des drames urbains et populaires de Do The Right Thing à La Haine, tout en empruntant à la science-fiction réaliste d'Alfonso Cuarón et Les Fils de l'homme. Porté par un casting authentique du rappeur Kane Robinson, issu du phénomène Top Boy, à la révélation du film Jedaiah Bannerman, que vaut cette fresque dystopique sur Netflix ?
LONDON CALLING
The Kitchen a eu le temps de germer et de prendre le pouls d'une capitale britannique au bord de l'implosion. Tout commence dans un salon de coiffure londonien en 2014. L'acteur Daniel Kaluuya, l'architecte-artiste Kibwe Tavares et le producteur Daniel Emmerson ont l'idée de dépeindre le futur d'une pauvreté quasi terminale et au coeur de leur métropole. Dix ans plus tard, The Kitchen sort enfin alors que le grand brouillard n'est pas passé et a plongé Londres dans une misère historique et insoutenable. Si bien que la ville-monde est en ce moment même frappée par une crise du logement inédite et la prolifération de policiers corrompus.
Dans cette dystopie vraisemblable et étourdissante, nous sommes dans le Londres de 2040, disloqué, compartimenté et cendreux. Pour les ultra-pauvres, il n'y a pas d'autres alternatives que de s'entasser dans des gratte-ciels abandonnés. La cité The Kitchen forme l'un des derniers témoins d'une capitale s'étant débarrassée des logements sociaux. Assiégés par des drones et séparés du reste de la ville par des frontières, les résidents doivent survivre dans un quartier de fortune.
The Kitchen suit ainsi les traces des films politiques urbains et esthétiques initiés par Spike Lee au coeur des années 80. Plus encore, le métrage s'offre une envergure vertigineuse, et ce, dès l'ouverture impressionnante, où la cité est quadrillée et cartographiée à hauteur d'homme. Du point de vue d'un résident, d'une équipe qui détourne un fourgon de marchandises ou celui de la multitude, The Kitchen ressuscite la science-fiction naturaliste des Fils de l'homme d'Alfonso Cuarón jusqu'à même évoquer l'univers carcéral d'Un prophète de Jacques Audiard.
Tout sert une anticipation proche, à l'architecture inspirée, qui reflète bien un Londres bouillonnant de l'intérieur. The Kitchen représente un territoire, mais il ambitionne aussi une allégorie universelle qui donne la parole à une population méprisée et criminalisée. Comme leurs pairs avant eux, Daniel Kaluuya et Kibwe Tavares tirent la sonnette d'alarme. Toutefois, The Kitchen se pare d'un récit bien plus antique et séculaire.
LE PARI DE L'INTÉRIEUR
En dépeignant une communauté qui doit survivre dans un climat autoritaire, les réalisateurs veulent inscrire leur manifeste politique dans la fable populaire. Celle-ci résonne au son de la voix du DJ Lord Kitchener (l'ancienne star d'Arsenal Ian Wright), narrateur perché au-dessus des grands ensembles via une radio omnisciente. Et cette fable part de deux figures : l'enfant orphelin Benji (Jedaiah Bannerman) et le solitaire Izi (Kane Robinson). Ce dernier travaille dans les pompes funèbres minimalistes et écologiques de Life After Life du côté du Londres opulent. Izi va prendre sous son aile l'adolescent et bouleverser ses certitudes.
L'univers futuriste et architectural de The Kitchen, on le doit surtout à Kibwe Tavares et ses expérimentations visuelles issues notamment de son court-métrage Robots of Brixton en 2011 où une main-d'oeuvre robotique se rebellait faisant écho aux émeutes de 1981. Dans The Kitchen, il n'y a pas de machines humanoïdes, mais un futur brutal et désincarné. Une inesthétique voulue et totalement liée au pari de l'intérieur choisi par les deux cinéastes. Et si cette immersion est passionnante et rigoureuse, elle cloisonne finalement le récit et certaines de ses prétentions morales.
De fait, malgré la nécessité de son discours, The Kitchen semble parfois limité par ses moyens. Bien qu'on soit bluffé par la finesse et le naturalisme apporté au marché futuriste de la cité évoquant notamment Camden Town ou encore Brixton Market, l'extérieur de The Kitchen parait non seulement lointain, mais assez immatériel. Du Londres huppé et puissant, on ne verra (quasiment) rien en dehors de quelques résidences épurées et des galeries marchandes fugaces et consensuelles. Et même si on se doute que les populations pauvres n'ont qu'un accès partiel à ce Londres autocratique, une petite frustration s'installe.
Plus encore, cette plongée dans la violence étatique et policière pousse le jeune Benji à la rébellion sans éviter certains poncifs. C'est par ce biais intérieur que se forme une partie de sa quête initiatique et qu'il fait une autre rencontre décisive : son alliance avec l'archétype du héros prolétarien (Hope Ikpoku Jr). En devenant acteur de cette colère, Benji s'éloigne un temps de la figure paternelle (et dysfonctionnelle) qu'incarne Izi. Une posture narrative qu'on comprend liée à la perte de sa mère et qui nous emmène au coeur de la violence subie (et rendue) par le dernier bastion.
"Bientôt le débrief de la critique d'Ecran Large sur Radio Kitchen"
Alors bien sûr, à la fin, The Kitchen ne brille pas toujours par l'utilisation de ses figures du récit populaire et à ce titre rappelle les faiblesses d'Athena de Romain Gavras. C'est d'autant plus visible face à la nuance du lien père-fils qui s'installe entre Benji et Izi qui est le véritable coeur du film. Toutefois, cette relation complexe frappe par la nuance de ses interprètes et par l'authenticité qui surgit d'un regard, d'un silence ou de l'environnement qui les entourent. Pour ces raisons, The Kitchen vise juste par son humanité lorsqu'il s'interroge sur la notion de communauté, d'appartenance et de dignité.
The Kitchen est disponible sur Netflix depuis le 19 janvier 2024 en France
Lecteurs
(2.1)09/02/2024 à 12:45
J'ai pas tenu plus de 30 minutes
30/01/2024 à 16:10
Sacré somnifère ce film!
Waouh....
23/01/2024 à 22:29
Film pas ouf mais pas si mauvais non plus .
Ps : si quelqu'un saurait ou se procurer les cache cou nike se serait super .
22/01/2024 à 12:52
Je reste décontenancé à la lecture de la critique, parce qu'au bout d'une heure de visionage j'ai abandonné ce film. C'est creux, vide, on s'ennuie tellement, je ne comprends pas l'enthousiasme du critique.
22/01/2024 à 08:15
Vu hier soir : creux, ennuyant, sans intérêt et à l'idéologie effrayante (je ne suis pas de ceux qui comptent le nombre de personnes de telle ou telle communauté dans un film, mais quand on propose un film se déroulant à Londres où tous les personnages bons sont black, et où les seuls blancs qui apparaissent sont des sal0ps de CRS effectuant des rafles, on peut s'interroger sur le message que veut faire passer le réalisateur...). Acteurs inexpressifs, histoire sans aucun but.
Sans aucun intérêt.
21/01/2024 à 22:42
Le néant, difficile de tenir le coup !
21/01/2024 à 18:31
Endormie au bout de 30mn. Une daube de plus
21/01/2024 à 17:13
Au bout d’un quart d’heure de rien et de lenteur, j’ai abandonné. Les personnages sont fades et creux, pas envi d’aller plus loin même en accéléré , c’est tout simplement mauvais . La Sf est genre qui mérite mieux que ça .
21/01/2024 à 09:09
Une bonne grosse bouze de netflix....film lent,histoire sans intérêt....acteurs très moyens
21/01/2024 à 01:52
Je l'ai regardé après avoir survolé votre critique et je n'ai pas été déçu. Je trouve au film les mêmes défauts que vous, mais ça n'enlève pas le plaisir lié à cet univers cohérent, à la qualité de l'interprétation, et à la poésie de certains passages. Les moyens semblent parfois un peu manquer mais en même temps l'humilité du projet lui permet d'éviter un problème courant de la SF moderne : la grandiloquence pas maitrisée (comme par exemple dans les dernières saisons de Westworld)... Merci pour la découverte !