Les Complices : critique d'un Pulp Fiction chez Pôle Emploi

Judith Beauvallet | 12 avril 2023 - MAJ : 13/04/2023 19:08
Judith Beauvallet | 12 avril 2023 - MAJ : 13/04/2023 19:08

Après avoir réalisé Je me suis fait tout petit en 2012 et Photo de famille en 2018, Cécilia Rouaud revient derrière la caméra avec une nouvelle comédie, Les Complicesdans laquelle on retrouve cette fois-ci François DamiensLaura Felpin et William Lebghil. Ce casting de pièces maîtresses de la comédie francophone du moment nous raconte l’histoire de Max, un tueur à gages qui ne supporte plus la vue du sang, et que ses voisins Karim et Stéphanie vont remettre sur le chemin d’une vie (presque) normale. Un film d’ambition modeste, mais qui n'en est pas moins une agréable surprise.

Cahin-Coen

Le postulat de départ des Complices fait partie des idées faciles, mais bonnes qui lancent les comédies efficaces. Max, qui bute des gens pour gagner sa vie, constate un jour de tuerie comme les autres qu’il s’évanouit désormais à la vue du sang. Une sacrée épine dans son pied d’assassin, et sa reconversion professionnelle semble aussi nécessaire que compliquée. Il faut dire que Max, en bon tueur à gages dur à cuir, est asocial et insensible. C’est pour ça que sa femme le quitte, d’ailleurs (celle-ci est incarnée par Vanessa Paradis, l’actrice fétiche de Cécilia Rouaud, qui passe dans le film comme une brise rafraîchissante dont on ne se lasse pas).

 

Les Complices : photo, François Damiens, Vanessa ParadisVanessa Par ici

 

Max va donc devoir réapprendre à vivre en communauté par le biais de Stéphanie et Karim, qui prennent leur responsabilité de voisins serviables très au sérieux. Sans rien savoir du passé de Max, ils vont tenter de l’inclure (contre son gré d’homme bourru) dans leur vie et de lui trouver un job dans la boîte de démarchage téléphonique dans laquelle ils bossent (et qu’ils rêvent de quitter). En d'autres termes, avec du noir et blanc, quelques plans frimes et des dialogues un peu plus corrosifs, Les Complices serait presque un film des frères Coen.

Pourtant, il s’agit bien, en l’état, d’une comédie franco-belge comme il en existe beaucoup, sans tellement d’autres ambitions que celle de tirer quelques sourires à son auditoire à force de situations grotesques et d’humour simple. Par-dessus le tout, le film offre une dose obligatoire de mimiques fétiches livrées par des acteurs au fort capital sympathie. Pourtant, Les Complices tire son épingle du jeu dans la jungle des comédies francophones, et développe un charme bienvenu.

 

Les Complices : photo, Laura Felpin, François Damiens, William LebghilQue loca, loca es la vida

 

DAMIENS BRUT

L’aspect général du film respire la production de petite ampleur et le tournage en configuration légère. Un côté un peu “cheap” qui change des salons bourgeois éclairés comme des pubs Yoplait et qui se marie finalement bien avec le personnage bougon de Damiens et son jeu sans chichis. L’humour pince-sans-rire des dialogues, qui évitent les blagues potaches et vulgaires, s’accommode bien de ce cadre sobre. Et si les vrais fous rires sont rares, l’amusement est constant et le spectateur ne s’ennuie jamais.

Comme à son habitude, François Damiens est parfait dans ce qu’il propose, et s’il répète tout ce qu’il sait déjà faire depuis longtemps, ce personnage plus intelligent, mais aussi plus méchant que ceux dans lesquels on a l’habitude de le voir rafraîchit sa gamme et rappelle ce qu’il a pu jouer pour Benchetrit dans Cette musique ne joue pour personne.

 

Les Complices : photo, Bruno Podalydès, François DamiensFaire feu au lac

 

Face à lui, Laura Felpin et William Lebghil ne se laissent pas écraser et réussissent à incarner des personnages dont les réactions absurdes semblent humainement vraies plutôt que bêtement caricaturales. Le parcours de tous ces personnages, s’il n’a rien d’inattendu, touche par les petits objectifs atteignables qu’il pose et auxquels le spectateur peut très bien s’identifier.

Vivre pleinement sa passion pour le karaoké au bar du coin, envoyer paître le boss qui rabaisse devant les collègues, y arriver un peu, mais pas du premier coup... Les Complices est émaillé de petites touches qui servent avant tout à parler à son public plutôt qu’à le faire rire, et face à un film qui le prend au sérieux, le spectateur est d’autant plus partant pour la rigolade.

 

Les Complices : photo, Laura Felpin, William LebghilMarrés au premier regard

 

Les pas si con-plices

Si Les Complices ne marquera pas l’histoire, et peut-être même pas l’année, il confirme la route que Cécilia Rouaud se trace dans l’univers de la comédie, et donne envie qu’elle continue sur ce chemin qui lui sied bien. À la fois héritier direct d’un modèle cliché de comédie à la française dont le public a désormais soupé, son style porte aussi une empreinte particulière et personnelle qui renouvelle gentiment son genre.

La photographie épargne nos rétines en cherchant les ambiances en demi-teintes plutôt que la surexposition qui caractérise beaucoup de productions grand public qui s'alignent sur la lumière des spots publicitaires diffusés aux heures de grande écoute. Un détail qui n'en est pas un et qui prouve que la réalisatrice pense au-delà de la blague. En s’entourant d’un casting sans fausses notes et en privilégiant ses personnages au lieu des gags faciles, Cécilia Rouaud fait du bien à la comédie et à son spectateur, à défaut de le faire mourir de rire. Avec un film de cette ambition, c’est tout ce qu’on lui demande, et on repart satisfait et heureux.

 

Les Complices : Affiche française

Résumé

Un film qui cherche le sourire amusé plutôt que le rire gras, et qui préfère l'écriture de personnages à celle de gags. Une comédie simple qui ne tombe jamais dans la vulgarité et dans laquelle les acteurs s'amusent sans tomber dans la caricature. Pas de quoi tomber de sa chaise, mais largement assez pour passer un bon moment.

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Lecteurs

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commentaires
Marc
22/04/2023 à 23:54

Je n'avais aucune idée de quoi parlait ce film LES COMPLICES , c'est John Wick 5 version Belge ! Avec l'excellent François Damiens un tueur employé par une société secrète La Loutre . Ce film c'est du grand n'importe quoi mais j'ai apprécié ce délire des clins d'œil à John Wick et à Rambo j'en dis pas plus.

Judith Beauvallet - Rédaction
13/04/2023 à 19:09

C'est corrigé, merci !

oui enfin...
12/04/2023 à 19:17

Les frères Coen, pas Cohen.

SebSeb
12/04/2023 à 15:15

"les frères Cohen" : shabbat shalom ? Le "h" est de trop, non ?

Prisonnier
12/04/2023 à 13:36

@lord Sinclair

J'invite les gens a aller a miellerie du Salagou et a trouvé un vigneron indépendant qui a ces vignes sur ces terres rouges. Très bon vignole méconnu. Avec modération

Voilà, enfin un article utile (je charrie la Redac lol)

Lord Sinclair
12/04/2023 à 11:27

Également pour ceusses qu'ils veulent découvrir Montpellier, son arrière pays et son Lac du Salagou aux faux airs de far-west... (et l’appartement d'une copine où des scènes ont été tournées).

saiyuk
12/04/2023 à 11:14

Je ne connais pas assez Laura Felpin, et François Damiens peut vraiment être bon dans un bon rôle et bien dirigé, mais celui qui me fait envie de voir ce film c'est clairement William Lebghil, il était déjà le plus drôle dans SODA et depuis il ce fait une carrière certes pas encore de star mais largement de qualité, que ce soit en comédie, drame, ou film décalés.

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