Causeway : critique du grand retour de Jennifer Lawrence sur Apple TV+

Alexandre Janowiak | 8 novembre 2022
Alexandre Janowiak | 8 novembre 2022

Après les échecs (critiques ou commerciaux) successifs de Dark Phoenix, Red Sparrow, Mother!, Passengers et X-Men ApocalypseJennifer Lawrence a mis en pause sa carrière en 2019 pour se consacrer à sa vie intime et revenir au cinéma avec des projets plus indépendants et personnels. Dès 2021 et son rôle dans Don't Look Up : Déni cosmique, l'actrice revenait donc en forme, mais c'est bien avec Causewayle premier film de Lila Neugebauer sorti sur Apple TV+, que la comédienne retrouve la splendeur de ses débuts.

de beaux lendemains

Causeway s'ouvre sur un plan fixe : escortée par un militaire, une jeune femme immobile, de dos, assise sur un fauteuil roulant et regardant dans le vide attend l'arrivée d'une aide-soignante. Cette jeune femme silencieuse, c'est Lynsey, une soldate revenant d'Afghanistan après avoir été blessée par une bombe artisanale. Avec son retour aux États-Unis, elle va entamer une longue et douloureuse guérison afin de réapprendre à marcher, mais aussi à retrouver sa mémoire, sa joie de vivre et surtout sa volonté d'aller de l'avant.

Dans un premier temps, le premier long-métrage de Lila Neugebauer va donc s'attarder sur sa reconstruction physique. Sauf que très rapidement après sa rééducation, la militaire va devoir rentrer chez elle (ou plutôt dans sa famille) à La Nouvelle-Orléans, lui donnant du fil à retordre pour cicatriser ses plaies psychologiques. Un retour aux sources difficile pour Lynsey, décidée à ne pas rester trop longtemps dans les pattes de sa mère avec laquelle elle entretient une relation complexe et cette maison familiale où elle se sent mal à l'aise.

 

Causeway : photo, Jennifer LawrenceEspérer ne plus couler

 

À travers un style très dépouillé, rappelant énormément la mise en scène de Kelly Reichardt et ses longues plages de silence, déambulations de personnages et cadres très minimalistes, Causeway décrit alors un quotidien rugueux et brutal avec simplicité et authenticité. Difficile pour la jeune héroïne de se reconstruire dans une ville où elle a perdu ses marques, où elle n'a plus de véritables attaches et où elle est contrainte de mener une vie qu'elle avait réussie à fuir. Sans jamais tomber dans le pathos, Neugebauer la confronte ainsi aux conséquences de son traumatisme de guerre : cette crainte de ne jamais pouvoir s'en relever.

Le salut de Lynsey viendra alors de sa rencontre avec James (excellent Brian Tyree Henry), un mécanicien éclopé par un accident mortel. Tissant une relation platonique avec lui (le film balayant très vite l'idée d'une possible romance à travers une simple ligne de dialogue), leur amitié naissante va l'amener à se ressaisir, affronter son passé, confronter sa condition et finalement l'accepter. Sur le papier, Causeway suit donc une structure assez classique pour un film sur les PTSD (le syndrome de stress post-traumatique en français), ne réinventant rien de ce genre déjà largement commenté, malgré le regard doux et pudique de Neugebauer.

 

Causeway : photo, Brian Tyree Henry, Jennifer LawrenceDeux personnages en pente

 

new joy

Toutefois, Causeway gagne en ampleur lorsque le parcours de reconstruction de Lynsey retranscrit le désir de renaissance personnelle de Jennifer Lawrence elle-même. Car au fil des minutes, il semble difficile de ne pas faire le rapprochement entre les deux femmes. D'un côté, Lynsey est une militaire meurtrie par la guerre et une femme blessée par la vie (relation avec sa mère, échec de son frère...), déterminée à se relever pour pouvoir repartir sur le front.

De l'autre, Jennifer Lawrence est finalement une actrice qui a été meurtrie par Hollywood (trahison de ses agents, sexisme...) et une femme blessée par la vie (relation délicate avec sa mère, deux fausses couches en moins de dix ans, victime du piratage de photos intimes...), et désormais résolue à relancer sa carrière au cinéma sous un nouveau jour. L'actrice l'a d'ailleurs confié au New York Times : "C'était tellement personnel, presque comme les passages d'un journal intime".

 

Causeway : Photo Jennifer LawrenceRegarder vers la lumière

 

Ce n'est donc pas anodin si Jennifer Lawrence trouve sans doute une des plus belles prestations de sa carrière dans le rôle de Lynsey. Plus qu'un simple personnage, Jennifer Lawrence incarne un peu (beaucoup) d'elle-même à travers son héroïne, et ce, sans maquillage ni artifice, comme si la comédienne se mettait à nu. Alors forcément, lorsque Lynsey, désormais debout, marche, conquérante, dans le grand final de Causeway pour s'exprimer quasiment face à la caméra (en totale opposition avec le premier plan du film), c'est également Jennifer Lawrence qui s'adresse au public.

Si sa pause salvatrice l'a aidée à mieux se comprendre, à se faire violence et à accepter que rien ne sera plus comme avant, elle compte sur les spectateurs pour l'aider à avancer sur son nouveau chemin, à repartir de zéro épaulée et non plus seule. Comme un ami en qui on peut avoir confiance et qui, en retour, pourra ouvrir, lui aussi, son coeur en toute quiétude. Touchant.

Causeway est disponible depuis le 4 novembre 2022 en France sur Apple TV+

 

Causeway : Affiche US

Résumé

Premier film délicat sur la reconstruction post-traumatique, Causeway est surtout le miroir de la renaissance artistique de la brillante et passionnante Jennifer Lawrence.

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Lecteurs

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commentaires
babar
20/11/2022 à 20:39

echec commerciaux? tout les films que vous citez ont ete largement beneficiaires rapportant le double ou plus que ce qu ils ont coutes; en france quand un film rembourse ses frais on sonne deja les cloches

Kyle Reese
13/11/2022 à 00:31

Joli petit film tout en douceur qui vaut surtout pour les acteurs
J’ai bien aimé ce rythme lent, qui fait
juste ressentir le temps qu’il faut pour essayer de se reconstruire après un traumatisme, qu’il soit physique, neurologique ou psychologique. J’ai bien aimé, un film doux, loin du tumulte, des cris, de la violence. . Une petite pause qui fait du bien
Jennifer Lawrence sans artifice tout en pudeur est superbe.

GTB
09/11/2022 à 23:28

@rientintinchti2> L'habituelle petit nuage de fumée pour ne répondre à rien. Votre speech idéologique est inutile, c'est pas ce dont il est question ici. Et évitez de supposer des miens, les devinettes ne semblent pas être votre fort.

On est pas en train de discuter si c'est bien ou pas. Vous parlez de surreprésentation...mais n'avancez rien de plus que votre impression personnelle pifométrique. Je vous réponds, en développant, juste que ça vaut pas grand chose...et que la surreprésentation des américains ne semble pas vous poser problème, elle. Donc que vous ne pouvez pas démontrer ce que vous dites et vous ne pouvez pas non plus justifier en quoi ça serait un problème dans un cas et pas dans l'autre. C'est tout.

Au delà de ça on a bien compris que votre constat personnel vous déplaît; mais ça c'est votre problème à vous.

rientintinchti2
09/11/2022 à 21:39

Eh non.... Tout ce gloubi glouba et cette dialectique freudienne ne tient pas la route. Désolé mais ça ne prend pas avec moi. N'importe qui pourra sur netflix et ailleurs constater le nombre de séries qui se la jouent gay friendly avec en tête "sense 8" série réalisée par deux humains que beaucoup s'acharnent à appeler soeurs pour se convaincre et convaincre autrui de leur tolérance artificielle. Les mêmes sont capables de tourner la tête ailleurs quand les forces de l'ordre brutalisent des sdf ou des migrants qui dorment dans la rue. Il est beau votre humanisme.
Tous vos progressismes ne sont qu'artificiels et faux semblants. C'est une vitrine qui vous permet de vous convaincre que vous avez une bonne conscience. Progressisme prechi precha téléguidé ultra creux, caricatural et téléguidé tendance lisa simpson. Le genre de progressisme qui me fait penser à la rentrée littéraire. ça me fait doucement marrer.
Récemment j'ai été obligé d'arreter les séries for all mankind et lovecraft country tellement le propagande débordait et tellement ça devenait caricatural. Même dans les films d'animation pour enfants ils en mettent; Exemple avec les incognitos (scène de retrouvailles entre l'agent et le gosse inventeur); dans sonic 2 (l'assistant de robotnik).
Il y en a de partout. Donc oui, je maintiens qu'il y a une très large surreprésentation.

GTB
09/11/2022 à 13:29

@rientintinchti2> "Rien contre les gays, ils font ce qu'ils veulent mais..."

...mais vous ne voulez pas en voir dans les films/séries de toutes évidences parce que pour parler de bourrage de crâne, de surreprésentation faut vraiment faire une fixette dessus. Il y a effectivement plus de personnages gay qu'avant (en même temps on part de loin), et puisque vous faites une estimation au doigt mouillé je vais vous répondre sur mon estimation au doigt mouillé : c'est toujours incroyablement minoritaire par rapport à l'ensemble de se que je regarde...et, du peu de stat qu'on a, également très minoritaire sur l'ensemble de la production audiovisuelle.

Et puis pour parler de surreprésentation, il faudrait déjà savoir quelle part de la population est "représentée" exactement (spoiler: on ne sait pas, c'est complexe et toujours débattu pour tout un tas de raisons et critères), et savoir plus précisément quelle pourcentage de production traite de cela. Sans parler de se mettre d'accord sur les critères de sélection (personnellement si un film sous-entend, qu'un perso est gay, ç'est du registre du descriptif équivalent à du "ce personnage est divorcé" sans que cela soit traité plus avant. C'est du descriptif...et d'ailleurs fut une époque où les gens pointaient du doigt les films avec des persos divorcés, "banalisant la chose"...comme quoi, l'histoire n'est qu'une éternelle boucle).

Et enfin dernier point : avoir conscience du biais d'observation. Vous retenez qu'il est sous-entendu que Lynsey est gay (pas vu le film, je pars du principe que c'est effectivement le cas) et par conséquent pointez du doigt cela. Or il se trouve que Lynsey est également américaine. Comme beaucoup de personnages de beaucoup films qui sortent en France. Or je ne suis pas américain moi. Ni vous a priori. Je peux vous garantir qu'il y a une surreprésentation autrement plus manifeste de personnages américains (avec une culture et des valeurs américaines) que de personnages gay. La différence, c'est que l'un pose problème à votre regard et pas l'autre.

Bref il y a l'impression subjective et il y a la réalité. C'est comme ceux qui disent qu'il y a énormément de films Indiens maintenant, juste parce qu'on en distribue 2x fois plus, passant de 10 films à 20 films par an...sur les milliers qui sortent.

rientintinchti2
08/11/2022 à 23:00

domme = dommage

rientintinchti2
08/11/2022 à 22:59

Du vu et revu. Mou, lent, bourré de clichés. Dialogues bateau, longs et inutiles.
Le personnage De Jennifer Lawrence se présente comme lesbienne.
Faut arrêter avec cette mode pseudo progressiste qui met du gay à toutes les sauces.
Ils trouvent tous leurs pretextes pour nous balancer leur propagande. C'est trop gros et visible. Faut arrêter un peu tout ce bourrage de crâne, cette programmation mentale.
Rien contre les gays, ils font ce qu'ils veulent mais ça devient saoulant cette survisibilisation artificielle. C'est trop gros, on dirait que ça devient un passage obligatoire.
Mais même sans cet aspect, le film est nul.
Rendez-nous du vrai ciné de qualité. Faut arrêter avec ces daubes.
Domme car Lawrence est superbe et lumineuse.

Kyle Reese
08/11/2022 à 17:55

Vais me laisser tenter.

Madolic
08/11/2022 à 13:49

Par contre, quand on spoil la fin, on met une balise spoiler ^^

Prisonnier
08/11/2022 à 11:54

Dommage, un projet a24 que je pourrais pas voir.

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