La Disparue : critique qui erre sans Butler sur Amazon
Devinez qui de l'ambition artistique de Gerard Butler, de la rognure d'ongle qui tient lieu de scénario ou de l'intensité que semble induire le concept de "film d'action" joue ici le rôle de La Disparue ? Réponse : les trois, évidemment. Charge à Brian Goodman d'emballer ce néant, encore que le Saul homonyme aurait fait aussi bien avec pas plus de moyens. Quelques jours après Liam Neeson dans l'affreux Mémoire meurtrière, les abonnés Amazon Prime Video sont à la fête des actioners carbonisés !
La chute de la maison Butler
Quand on n'a pas d'argent, on a des idées. Quand on n'a pas d'idées non plus, on a Gerard Butler, toujours prêt à venir dépanner dans le rôle du monolithe qui se prenait pour un monomythe, et qui n'hésite pas à endosser la casquette de co-producteur – après tout, on n'est jamais mieux mal servi que par soi-même. Cette fois, le bon Gerard se lance sur les traces de sa femme, interprétée par Jaimie Alexander (Blindspot), portée disparue après une pause pipi à la station-service. Et il est probablement impossible de prolonger ce pitch sans lui conférer une ampleur supérieure à l'intégralité du scénario.
Pas de tromperie sur la marchandise, aussi frelatée soit-elle : on retrouve bien le Butler en mode protecteur bas de l'occiput, incluant son expressivité de moule en rémission post-AVC, son amour de la tisane à l'extrait de gonade et ses métaphores redneck à base d'essence. Il incarne cette fois ni un agent des services secrets type La Chute de la Maison Blanche et ses suites, ni un flic impitoyable, et encore moins un éphèbe musculeux en jupette : c'est un monsieur Tout-le-Monde plus proche de son rôle dans le pas honteux Greenland, problèmes de couple inclus.
Le problème, c'est que la formule est ici ramenée à son plus petit dénominateur commun : Gerard Butler est l'unique paratonnerre d'un scénario rachitique. Son héros n'a qu'une seule piste à remonter, les rebondissements se comptent sur les phalanges d'un demi-doigt et le flashforward introductif, à côté duquel celui de Mission : Impossible 3 passe pour un chef-d’œuvre de finesse, tient plus de l'aveu d'impuissance que de l'exhausteur de tension.
Cette économie d'effet aurait pu rendre le film attachant s'il transpirait la sincérité, mais aucun acteur ne donne envie d'y croire. Ni Russell Hornsby en flic suspicieux, ni Ethan Embry dans le rôle du bien trop suspect Knuckles, ni Cindy Hogan ou Bruce Altman qui jouent les parents n'ont en moteur l'essence suffisante pour générer un minimum d'intensité.
Sif, nettoyant ménager qui fait disparaître jusqu'à la couleur de ses joues
300 nuances de mollesse
Avec son scénario plus essoré que le Sahel, La Disparue doit tirer à la pellicule pour contrefaire la durée d'un long métrage. Sur ce plan au moins, c'est un festival. Rien que la scène de la disparition, littéralement le déclencheur du film, est plus dilatée qu'une pupille cocaïnée, tentant de jouer la carte d'une ironie tragique qui génère à peu près autant de palpitations qu'une goutte de caféine diluée à 15CH.
Puis on a droit à de longues minutes de Gerard tentant de concurrencer Rocky en beuglant le nom de sa Lisa, histoire de profiter à fond de ses cordes vocales graissées à l'huile de moteur. À mi-parcours, La Disparue atteint péniblement le point où il aurait dû commencer, si encore le film décollait... Mais entre l'incrédulité convenue qui allonge les premiers interrogatoires, les répliques inutiles vicieusement insérées au beau milieu de dialogues montés en champs-contrechamps assommants, les contretemps artificiels... l'élastique de l'enquête est si étiré qu'un funambule pourrait prétendre y battre un record du monde.
Et lorsque dilater le présent ne suffit plus, reste toujours la bonne vieille ficelle des flashbacks, tous issus d'une seule et même dispute de couple entrecoupée d'inserts idylliques gênants. La Disparue est à mi-chemin de la performance artistique méta sur le vide et d'une entrecôte qui, délestée de son gras, ne rassasierait pas un rongeur anorexique. À un moment WTF pétaradant près, le film est un encéphalogramme piétiné. Même lorsqu'il tente en son climax un montage alterné, il ne parvient, en suivant la règle arithmétique de la multiplication par zéro, qu'à décupler son néant au carré.
Pour couronner le tout, La Disparue se montre affreusement chiche en action. Et puisque ce n'est pas comme si ces scènes induisaient ici un quelconque investissement technique, on en déduit que leur rareté tient à une cruelle pénurie de figurants prêts à se faire remodeler l'arête nasale. Décidément, les difficultés de recrutement n'épargnent personne...
Que Butler ne passe pas son temps à cogner comme un sourd aurait pu faire sens avec son personnage d'homme lambda, s'il s'était agi d'un parti-pris voire d'une tentative de déconstruire son image de bourrin par un rapport de force défavorable. Mais non, le bon Gerard aura tôt fait de rendosser sa posture confortable de héros satisfait, révélant que le caractère ordinaire de son rôle était principalement un excellent prétexte pour ne rien proposer.
La Disparue est disponible sur Amazon Prime Video depuis le 1er août 2022
Lecteurs
(4.2)17/10/2022 à 01:33
D'une pauvreté qui frôle l'indécence. Un navet absolu, cuit et recuit. C'est tellement raté, inodore, incolore qu'on se demande pourquoi ça peut encore revendiquer, prétendre être un film, avoir encore quelque chose qui se confonde avec du cinéma... Bref ce film, qui n'est qu'une ridicule suite de plans, ... est une immense merde !
03/08/2022 à 14:20
Vu hier, lors d'une grande soirée de déprime faite de sirop de grenadine et chips maison.
Je suis encore totalement abasourdi par le jeu parfait de chacun des acteurs. Chacun incarne son personnage à la perfection. C'est tout simplement bluffant ! Le casting est impeccable.
03/08/2022 à 14:06
Un film avec Butler , c'est comme un mauvais plan sortie de boite , ca va pas nous rendre meilleur , c'est pas forcement super bon, on prend parce qu'il y a rien d'autre et on regrette le temps perdu apres
Mais c'est trop tard :-)
03/08/2022 à 12:41
@Hank @Flo @Rédac,
Ben pour une fois, je suis d'accord avec la rédac ! Si l'article se limitait aux faits, il ferait trois lignes et n'aurait que peu d'intérêt. Je ne suis pas fan de la multiplication de figures de style, mais les journalistes ont aussi le droit de s'amuser un peu. Et c'est l'impression que ça donne (pour l'écriture en tout cas). Je me suis bien marré et le film a l'air complétement nase, même pour un Butler
03/08/2022 à 11:07
Et pourtant... Toute votre description de Gérard Buttler fait son petit effet sur la cilbe visé... Tisane au gonade, corde vocal graisse à l'huile de moteur... C'est un film (et un acteur) très homo érotique, et j'avoue que rien que la bande annonce m'echauffe le bas ventre...
Que le film soit nul ok, mais c'est avant tout pour le protagoniste mal alpha au short macéré gorgé de sueur que l'on regarde ce programme avec une gourmandise assumé et de façon licencieuse ;
03/08/2022 à 10:45
@Janus Absolument ! Nous n'en sommes tous que de pataudes excrétions, et la potion qui sépare nos entités honteuses est le visionnage de ce type de navet.
03/08/2022 à 10:15
@Flo :
Je soupçonne que Ange Beuque soit à Simon Riaux ce que Mr Hyde est au dr. Jekyll...
03/08/2022 à 09:48
Moi, j'avais trouvé pourtant son interprétation "sthihléé", au Gégé dans la pub vantant une certaine mécanique jardinière ! Mais paraît que c'est un sosie (?!).
Mon monde s'écroule...
03/08/2022 à 09:36
Vu hier, avant même de lire la critique d'Ecran Large... Tout sonne faux dans ce film ! Butler fait ce qu'il sait faire mais ça en devient lassant : quel que soit le personnage qu'il interprète (flic, agent secret, guerrier de l'antiquité, ou ici promoteur immobilier), il reprend le même jeu. Les rebondissements sont rachitiques, on pourrait s'attendre à des twists devenus classiques (les flics dans le coup ou le mari fin manipulateur ou l'épouse fine manipulatrice...), mais même ceux-là n'arrivent pas.
Il y a 25 ans, sortait Breakdown avec Kurt Russel sur la même idée et ça reste encore une excellente série B
03/08/2022 à 09:01
Le remake "La disparue" avec Jeff Bridges et Kieffer Sutherland avait un bon suspense et se diferenciait de l'original "l'homme qui voulait savoir" avec feu Bernard-Pierre Donnadieu sur le twist final Hollywoodien mais pour moi le meilleur c'est l'original avec une fin "à l'européenne" qui permet de mieux apprécier le jeu de Donnadieu en père modèle extérieurement mais détestable et froid intérieurement. Une mise en abime que seul le cinéma européen ose le faire. Et ça les américains ne peuvent pas rivaliser.