Infinite : critique du Assassin's Cringe d'Amazon Prime

JL Techer | 3 octobre 2021 - MAJ : 03/10/2021 13:03
JL Techer | 3 octobre 2021 - MAJ : 03/10/2021 13:03

Dans Infinite, qui arrive directement en SVOD en France sur Amazon Prime Video après une sortie cinéma annulée pendant la pandémie, Mark Wahlberg rejoint un groupe secret de guerriers aux âmes immortelles chargés de sauver le monde. Infinie tristesse face à cette superproduction sans âme, réalisée par Antoine Fuqua (Training Day, La Chute de la Maison-Blanche).

C'est l'histoire de la vie

Ce pauvre Evan McCauley n'a vraiment pas de bol. Victime d'hallucinations, diagnostiqué comme étant schizophrène, il ne parvient pas à contrôler ses comportements violents, ce qui fait que trouver et garder un job est plutôt compliqué (normal quand on casse tout). Ces visions sont d'autant plus difficiles à gérer que, malgré une lourde médication, elles sont tout de même très présentes, et d'un réalisme tel qu'il ne parvient pas à savoir si son imagination est au travail, ou s'il s'agit de réels souvenirs

Mais au détour d'une rencontre fortuite décidée par le scénariste pour faire avancer l'affaire, voilà qu'il apprend qu'il est en fait un Infinite : un être à l'âme immortelle. Bien qu'il puisse mourir, Evan a l'incroyable faculté de pouvoir se souvenir de ses vies passées. Fort heureusement, il n'est pas seul dans cette situation, et les Infinites se sont réunis dans une petite société secrète façon Rotary Club d'Immortels, appelée Cognomina.

 

photo, Mark Wahlberg, Chiwetel EjioforTour de magie scénaristique n°27

 

Depuis des milliers d'années, Cognomina agit dans l'ombre, contrôlant l'évolution de l'Histoire et intervenant au gré des besoins du plus grand nombre, ou de leurs intérets. Le groupe aura besoin des services d'Evan pour contrecarrer les plans machiavéliques de Ted (le très charismatique Chiwetel Ejiofor), un de leurs anciens alliés qui a retourné sa veste, et est bien décidé à mettre le bazar partout où il le pourra. 

Evan va devoir faire appel aux souvenirs de ses vies passées pour justifier son rôle de héros de blockbuster, expliquer le fait qu'il sache utiliser un katana, et qu'en fait, il n'est pas fou mais bel et bien une énième réincarnation de lui-même. Evan est-il l'Élu ? Est-ce qu'il ne peut en rester qu'un ? Ted est-il vraiment un traître ? Le héros peut-il vraiment se reposer sur ses souvenirs ? Hollywood nous prendrait-il pour des pigeons ? Autant de questions que soulève le film, sans forcément apporter les réponses qu'on attend. 

photoIl court, il court le furet

 

Mais il fout quoi antoine ? 

Derrière la caméra, Antoine Fuqua est loin d'être un petit joueur. Réalisateur de l'excellent Training Day et du plutôt sympathique Equalizer, il est un homme de talent (souvent). Le fait de le retrouver aux commandes d'un blockbuster de science-fiction, avec un casting solide construit autour de Mark Wahlberg, Chiwetel Ejiofor, Sophie Cookson et le toujours trop rare Toby Jones, avait tout pour être enthousiasmant. 

Mais l'enthousiasme est de courte durée dans Infinite. Le temps de quelques scènes d'exposition banales et d'une présentation maladroite du personnage d'Evan, et le soufflé retombe très rapidement. La rencontre entre Ted et Evan est l'exemple parfait de ce qui se passe dans ce film. Mise en scène vue et revue, sorte de pastiche de la séquence culte de la rencontre entre Thomas Anderson et l'Agent Smith lors du premier Matrix, avec en plus un soupçon de Little Buddha (le souvenir des objets des vies passées) : elle témoigne du manque d'imagination du film.

 

photoSéquence d'acupuncture pour trouver l'inspiration

Mark Wahlberg y semble totalement perdu, comme s'il se demandait comment il devait jouer son rôle, voire ce qu'il fait dans ce film. Une expression qui ne le quitte jamais, alors qu'il est censé tenir le scénario à bout de bras. Il a beau s'échiner à courir dans tous les sens, rien n'y fait, et son maniement du katana ressemble plus à une mauvaise parodie de film de sabre qu'autre chose. Autour de lui, c'est la même plate déprime, avec des acteurs qui n'ont visiblement pas envie d'être là, et déclament leurs lignes de texte sans aucune passion.

À l'image du héros, le spectateur passera son temps à se questionner, non seulement sur l'histoire du film (cousue de fil blanc) mais aussi sur les motivations réelles des personnages. Immortels, vies passées, réincarnations : tout ça est évacué à vitesse grand V, et sert uniquement de prétexte à une succession de scènes d'actions sans génie.

La bande-annonce avait promis des courses poursuites folles, des combats épiques, de la pyrotechnie à n'en plus vouloir... Et au final, rien de tout cela. Les faux raccords sont légion (les personnages qui changent de position d'un plan à l'autre alors qu'ils sont sensés être immobiles) et les scènes d'actions sont filmées avec une platitude sans nom. Même la séquence où le héros risque sa vie, en s'élançant du haut d'une falaise en moto pour atterrir sur l'aile d'un avion (avec un faux air de Mission Impossible qui aurait fricoté avec Fast & Furious) ne parvient pas à susciter la moindre émotion. Ou plutôt si, une émotion : celle d'avoir déjà vu et revu d'innombrables fois ce film.

 

photo, Mark WahlbergOn préférait Highlander

 

Do you get "déjà vu" ?

Pourtant, sur le papier, il y avait de quoi espérer quelque chose. Adaptation libre du roman The Reincarnationist Papers de D. Eric Maikranz, le film repose sur des thèmes universels comme l'acceptation de son destin, et les grands pouvoirs et les grandes responsabilités (©PeterParker). Avec en plus des idées venant tout droit de la tradition bouddhique (le cycle des réincarnations, la mémoire des vies antérieures), Infinite pouvait s'amuser et trouver une identité propre, au sein du cahier des charges hollywoodien.

Sauf que c'est finalement une énième production générique, qui renvoie immédiatement à Assassin's Creed (les vies antérieures) et à The Old Guard (les guerriers immortels), soit deux parfaits exemples de matériaux passionnants mais essorés à l'écran, pour devenir de purs produits mainstream. Infinite a ainsi suivi leur contre-exemple : il s'inspire d'un roman salué par la critique, que Diana Gabaldon (auteur de Outlander) avait comparé à Matrix et Memento, pour en faire un produit hyper calibré et sans âme.

photo, Mark WahlbergPas rapide, et pas furieux non plus

 

Il y a bien du Matrix dans Infinite mais encore une fois, ça ne relève que de la pâle imitation. Lorsque le héros se remémore et réapprend, impossible de ne pas penser, avec un soupir d'exaspération, à Neo qui apprend le kung fu. Et si le premier quart du film laisse espérer un soupçon de Memento, c'est vite oublié tant les enjeux soulevés par la mémoire des vies antérieures sont rapidement balayés. On oubliera même que ces personnages ont accès à la mémoire de dizaines de vies, jusqu'à la soi-disant révélation finale, elle aussi aromatisée à l'amertume du déjà-vu. 

Même avec la modeste attente d'un spectacle simple et léger, c'est la déception, la frustration, voire l'agacement. Avec zéro imagination et ambition dans le scénario ou la mise en scène, la basique Infinite porte très mal son titre. Seul point positif : ce machin n'est pas sorti en salles, et évite de subir 106 min de mou divertissement.

Infinite, disponible depuis le 4 octobre 2021 sur Amazon Prime

 

Affiche US

Résumé

Blockbuster lambda et sans personnalité, Infinite ne parviendra à satisfaire ni les amateurs de SF, ni même les fans de nanars. Il y avait pourtant de bonnes idées de départ, et des acteurs et un réalisateur solides. Mais à l'écran, il y a un film jamais amusant, et toujours navrant.

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commentaires
Flo 1
20/02/2024 à 14:05

Antoine Fuqua et Mark Walhberg sur un film de d’action/SF/Comics ? Mais qu’est-ce qui se passe ?
Même chez les Transformers de Bay, l’acteur est complètement perdu, beaucoup trop col bleu, incompatible avec une certaine fantaisie sauf si elle s’inscrit dans la comédie du quotidien (« Ted »). C’est comme Steve McQueen dans « Danger planétaire », rien à faire là. Fuqua pareil, c’est pas un style qui lui correspond (m’enfin s’il a voulu tenter le coup et faire joujou avec les effets spéciaux…).
Encore plus si c’est un film qui redigère tous ces trucs de sociétés secrètes immémoriales, colmatés avec des arts martiaux, du numérique, des gadgets sortis de nulle part (c’est censé être un film contemporain, pas un univers de super-héros). Adapté d’un roman, ça n’est toutefois pas du tout inventif, ça pullule de personnages qui ont à peine le temps d’exister – le potentiel dramatique n’est pas du tout exploité, entre le héros qui se moque de tout alors qu’il est censé être brisé, l’antagoniste qui est en quête de l’au-delà, les amoureux qui attendent de se retrouver.
À part une ou deux scènes d’action assez excitantes, tout ça est assez prévisible… sinon c’est qu’on s’en fiche.

Tof
13/11/2021 à 19:30

Nul

Cocodada
18/10/2021 à 03:14

Si le film avait duré plus longtemp, dans les 2h30 ou alors été séparés en deux parties cela aurait été vraiment mieux, car ça aurai permis au film de se développer doucement et de nous emporter avec lui mais non, ce film est vraiment décevant il est peut etre beau visuellement mais le scénariste a pondu un scenario qui sent vraiment le sapin, c'est ''embettant'' pour ne pas etre vulgaire mais... IL EXPLIQUE RIEN YA AUCUNE TRANSITION ON SAIT MEME PAS COMMENT ''Ted'' arrive a les retrouvé et a savoir ou ils sont A CHAQUE FOIS !!! Bref je vais dormir

Guihero
15/10/2021 à 10:03

Fuqua Cagoule, voilà voilà c'était ma contribution à ce film qui semble briller de milles feux, comme ma vanne finalement. Je sors :)

Wokeymichel
05/10/2021 à 02:18

J'ai pas détesté... Y'a pire pour passer une soirée. Oui c'est un mix de Highlander, mission impossible et matrix mais j'ai passé un bon moment.

Pi
05/10/2021 à 01:07

Assassin’s cringe ...
Le nom déjà .
C’est pas possible .
Inspiration ratée de Assassin’s creed.

cepheide
04/10/2021 à 19:58

Ce film est une merde en or massif, du pognon gâché, un ennui et une bêtise permanente.
Aucun des personnages n a de vraies raison de faire ce qu il fait, rien ne tient, tout est artificiel. On dirait une piste de ski en plein désert.

PatrickJammet
04/10/2021 à 14:07

... On passe de l'esprit métaphysique à celui de métemps'ychotique, "Duc" ! Démago/dommage ! https://youtu.be/gR8wHpysLQI

Geoffrey Crété - Rédaction
04/10/2021 à 10:13

@adel 10

Non, on fait même une blague en légende d'une photo :)

Chronos
04/10/2021 à 09:39

L'art de perdre son temps... :)

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