Terminator : Dark Fate - critique du futur imparfait

Geoffrey Crété | 29 janvier 2023 - MAJ : 30/01/2023 11:26
Geoffrey Crété | 29 janvier 2023 - MAJ : 30/01/2023 11:26

Après Terminator : Renaissance qui a ouvert les portes du futur post-apocalyptique, après Terminator : Genisys qui a rembobiné la mythologie pour la réécrire, Terminator : Dark Fate arrive pour tout nettoyer, encore. Théoriquement repris en main par James Cameron (ici producteur, et crédité sur l'histoire), ce sixième épisode zappe toutes les suites pour se placer directement après Terminator 2 : Le Jugement dernierLinda Hamilton reprend donc le rôle de Sarah Connor, face à Arnold Schwarzenegger, mais aussi Mackenzie Davis et Natalia Reyes. Le renouveau tant espéré pour la saga, ou un nouveau clou dans son cercueil ?

TERMINATOR : DARK GENISYS

Après 35 ans, 6 films et au moins deux tentatives de reprendre en main la saga, l'heure est grave. La franchise Terminator semble partager l'horizon apocalyptique de ses personnages, condamnée à répéter les mêmes erreurs, recommencer la même mission, vaincre un même adversaire film après film, comme un Sisyphe moderne.

Retour de James Cameron (qui a récupéré les droits de sa création et a été largement mis en avant comme la tête pensante), retour de Linda Hamilton et réunion avec Arnold Schwarzenegger, reconnexion aux deux premiers films avec la légitimité du cinéaste original : Dark Fate devait être le remède à ce mal qui gangrène la saga, et plus généralement les franchises hollywoodiennes. En réalité, c'en est un nouveau symptôme.

Loin d'avoir appris des erreurs de Terminator : Genisys, considéré par beaucoup comme le pire moment de la franchise, ce Dark Fate en reproduit les failles. Moteur à combustion nostalgique hautement instable, fan service dispensable, répétition de la même formule, le film parvient à peine à surpasser le précédent opus avec ses tentatives côté action. Mais demeure une désagréable sensation, trop familière à ce stade : ce nouvel épisode n'a rien de plus à raconter, montrer ou démontrer, et est donc gentiment inutile.

 

photo, Linda Hamilton I'll be back (mais ne te sens pas obligée)

 

LE SOULÈVEMENT DES MACHINS

Venu des effets spéciaux, ayant collaboré aussi bien avec David Fincher que Marvel Studios, Tim Miller avait prouvé avec Deadpool sa capacité à manier un budget serré (à peine 60 millions). Il y avait donc une vraie attente de ce côté, surtout avec un budget estimé ici entre 160 et 200 millions (Genisys avait coûté à peine 160).

Moins dépaysant que Renaissance, mais moins fade que Genisys ou Le soulèvement des MachinesDark Fate essaie d'élargir un peu l'univers pour trouver son identité. Et hormis l'incontournable et banale course-poursuite en véhicule, Miller transporte l'action dans les airs et dans l'eau, et le film voyage avec les personnages, sortant des environnements urbains balisés pour prendre différentes couleurs au fil des péripéties.

 

photo Terminator Et le prix du Terminator le plus transparent est attribué à...

 

Mais peu importe puisque tout se résume vite aux mêmes vignettes (affronter l'ennemi, le ralentir, fuir, être rattrapé, et recommencer) où seul le décor évolue. Cette narration est d'une pauvreté folle. La lutte est téléguidée, et que tout se termine encore une fois dans un décor industriel rappelle que l'hommage est devenu rengaine. D'autant que les scènes d'action souffrent des maux ordinaires des blockbusters : doublures numériques ridicules, surdécoupage des cascades, manque de finesse des CGI... Le spectacle reste sommaire, dans la zone moyenne du blockbuster moyen, et manque d'envergure et de réalité physique.

Ce "nouveau" Terminator Rev-9 n'arrange rien, puisque c'est une menace basique ou ridicule, au choix : une simple variation du T-1000 (du métal liquide noir cette fois), du T-X (après l'homme blanc et la femme, le mexicain) et du T-3000 (qui lui, au moins, lançait ses lames pour toucher à distance). Le manque d'imagination est si navrant que la nouveauté de l'exosquelette qui dédouble le bestiau mécanique n'est jamais utilisée pour autre chose qu'occuper tous les héros une minute ou deux.

Il y avait là la possibilité de grandir le danger, le multiplier, mais ce Rev-9 est un bête robot ni très malin, ni particulièrement puissant. Le choix du peu charismatique Gabriel Luna n'aide pas à caractériser cet antagoniste aussi générique que le T-3000, qui avait au moins la gentillesse de vite dégager de Genisys.

 

photo, Gabriel LunaC'est officiel : la saga peut maintenant avancer sans son âme

 

WONDER WOMEN

Que la menace soit le scénario ou ce Rev-9 qui porte un nom de palette de maquillage, peu importe : en face, les héros incarnent le passé et le futur, comme pour signifier que la saga est à la croisée des chemins - encore. D'un côté, il y a les revenants avec Sarah Connor et le T-800. De l'autre, les héroïnes incarnées par Mackenzie Davis et Natalia Reyes. À tous les niveaux ou presque, c'est raté.

Le retour de Linda Hamilton était le grand argument de Dark Fate, le personnage ayant été tué pour Terminator 3 (John Connor explique qu'elle est morte d'une leucémie), avec une simple voix off dans Terminator : Renaissance. Et Sarah Connor est sans nul doute le personnage le moins maltraité du film : non seulement elle explore une zone totalement inconnue de sa mythologie, mais elle a en plus les rides et la voix rocailleuse de Linda Hamilton, que Tim Miller n'essaie pas de masquer. Le trait est grossier, et le personnage est la première victime du trop-plein de personnages, mais le peu d'émotion vient d'elle.

 

Dark FateLe Terminator pantouflard

 

Schwarznegger, lui, est à l'opposé. Largement relégué au second plan, il incarne là la pire version du rôle, arrivé à court de carburant au point de devenir un triste gag en short qui sert des bières. Équivalent de la petite maison de Hawyeke dans la prairie d'Avengers : L'Ère d'Ultron, le retour du T-800 prête à rire jaune. Ce qui aurait dû donner lieu à une vraie tension dramatique est survolé, et quand il n'est pas occupé à taper fort avec sa tête de plomb dans des scènes classiques, Schwarzy redonne dans la blague Genisys-like. La mécanique est tellement artificielle que sa présence semble avoir été forcée.

Rien à signaler côté Mackenzie Davis et Natalia Reyes, l'écriture étant aussi moyenne et superficielle que dans n'importe quel blockbuster sans identité. En revanche, ce qui se joue avec elles a de quoi interpeller et créer de futurs débats attendus. La mythologie Terminator est ici profondément revue, pour iconiser les femmes outre mesure, et bêtement donner des munitions à ceux qui voient dans ces héroïnes des signaux d'une dictature de la bien-pensance.

 

photo, Mackenzie Davis Une actrice excellente, à (re)voir dans Halt and Catch Fire 

 

Dans Terminator 2 : Le Jugement dernier, Sarah Connor la mère et la guerrière devenait une icône à la hauteur d'Ellen Ripley, grâce à la simplicité et la pureté de James Cameron, également à l'œuvre dans Aliens, le retour. Dans Dark Fate, la voir revenir encore plus badass, aux côtés de Grace la soldat "augmentée" en Kyle Reese bis, et Dani en Sarah Connor bis, alourdit le film à tous les niveaux.

Comme si rajouter deux couches allait effacer les défauts. Comme si de nobles intentions excusaient un forcing si pauvre. Aucun de ces personnages n'a le temps et l'espace pour exister, et les dialogues doivent alors expliciter la moindre idée. Il n'y a qu'à voir la scène où la vérité sur Dani (un clin d'œil drôle et cruel à Emilia Clarke ?) est révélée, pour constater le manque de finesse des ambitions.

Si c'était ça, la grande motivation derrière Terminator : Dark Fate, elle, est bien manquée. Et difficile d'imaginer que ce soit autre chose, tant le reste est en pilotage automatique. Le désintérêt total pour Skynet, appelé ici Legion après avoir été renommé Genisys, montre que le sens devait être ailleurs. À l'arrivée, il n'y en a aucun, hormis celui des billets verts. Le voilà, le sombre, mais attendu destin de Terminator, aussi inextricable que le Jugement dernier.

 

Affiche française

Résumé

Terminator : Dark Fate a beau être moins mauvais que Genisys, il reste vide et médiocre. Il répète les erreurs des précédents épisodes, empile les personnages et pseudo-nouveautés pour justifier son existence, mais finit dans le même dépotoir que les blockbusters impersonnels qu'il pensait piétiner.

Autre avis Simon Riaux
On a beau sentir James Cameron derrière une poignée d'idées (le triple climax, l'écriture des personnages féminins...), l'ensemble frôle l'indigence et s'avère bien incapable d'égaler le premier Terminator en matière de spectacle ou d'investissement émotionnel.
Autre avis Lino Cassinat
Ok, c'est mieux que Genisys. Ok, le retour de Sarah Connor est plutôt réussi. Pour le reste, c'est encore une itération dispensable d'une mythologie qu'il est grand temps de laisser en paix. Dark Fate est à peine un film passable, à cause de scènes d'action pâteuses et de personnages allant du fade à l'insupportable. On s'ennuie vite et ferme.
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Lecteurs

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commentaires
Bond
30/01/2023 à 13:18

J’ai beaucoup aimé Renaissance, le film avait pour lui de proposer quelque chose de nouveau , dommage qu’ils n’ont pas continué dans cette veine

Alejandro Sosa
30/01/2023 à 11:55

TERMINATOR DARK FATE LE FILM DES 10 000 DEFAUTS SCENARISTIQUES (pas que)

J'ai vu le film il y a quelques années...autopsie du désastre

Les idées des scénaristes...faire de la moraline (scène près du Mexique , dans le train d'ailleurs très mal filmé tellement c'est sombre ) , faire du T800 un vendeur de rideau (le rêve...faut dire je m'attendais à ça ) , Sarah Connor qui dérouille du Terminator depuis des années...à travers les USA (la rebelle) , des dialogues nullissimes (la scène entre Ramos et le passeur) , la scène où Grace tue une mouche avec son couteau (une association pro-mouche a toujours pas porté plainte ?) ...des bagarres style Kung-Fu...des objets qui servent pas (le militaire ami de Connor lui fournissant une arme...dont personne ne sait à l'heure actuelle où elle est) , le T800 buveur de bière (rire) , le T800 qui regarde des matchs de foot (rire rire) , le T800 "je ferme ma gueule je suis un mec" (mais sérieux quoi ?)

Bref ce film est une véritable daube moralo-progressiste avec des idées de scenario effrayantes ! fait par des scenaristes sous emphet ou après une soirée de cuite ! la honte ! plus jamais de Terminator laissez cette franchise en paix ! les 2 premiers les meilleurs le 3 et le 4 à la limite ! le reste Genysis-Dark Fate aux oubliettes ! .

PatricK Robert
30/01/2023 à 11:26

@ Témille : Merci je ne m'en souvenais plus. En revanche ca ne change pas mon observation, en 3 ans, il grandit pas ? lol

Témille
30/01/2023 à 10:30

@ PatricK Robert
Non, le film T2 date de 1991, mais l'histoire se déroule en 1995.

PatricK Robert
30/01/2023 à 09:46

Vu hier, pas si pire mais bon pas le meilleur. J'avais bien aimé Genysis perso. En revanche je comprends pas, T2 se passe en 1991, la au début sur la plage on est en 98 mais personne n'a vieilli ? Des le debut une bourde comme ca lol et bon plus le film avance et plus tu te dis que c'est un remake du 1er. On change juste la facade et hop, meme la fin est identique "aller hop on part en jeep"
bref, Terminator se compose du 1er et du 2nd; point barre

Rastan999
30/01/2023 à 07:52

Depuis le 1 et le 2, tout le monde attend de voir John Connor en Leader de l’humanité dans un monde dominé par les machines. Tout le monde veut voir John envoyé son père dans le passé et boucler la boucle. Mais non, c’est sûrement trop simple pour les scénaristes hollywoodiens. Dans T3, on nous donne une version de John a mille lieux de ce qu’on attend. Dans T4, John n’a pas la vedette et kyle reese apparaît à peine. De plus John est un leader pas encore affirmé. Au lieu de ça, on nous donne un nouveau type de terminator mi humain mi machine sans aucun intérêt. Ensuite, on nous sort un scénario tiré par les cheveux pour ramener un vieux schwarzy fatigué qu’une Sarah Connor rajeuni appelle « papy ». Et John Connor devient un terminator implacable. On croit toucher le fond mais dark fate creuse encore en nous refaisant le coup du vieux t800 et de surcroît Zigouille John Connor d’entrée pour le remplacer par des héroïnes badass. John Connor est maudit et la franchise se perd face à des scénaristes qui n’osent pas écrire ce que tout le monde attend. RIP John.

Riton V
30/01/2023 à 07:31

On ne sen pas James Cameron derrière les bonnes idées mais derrière les mauvaises. l'ensemble frôle le très bon film, bien sûr l'idée d'égaler le premier Terminator est hors de propos puisque inégalable.
Comme notre critique vedette, Terminator a l'apparence complexe mais il n'est que prisonnié de sa simplicité.

le T800 change les couches de façon efficace et Fiable RIP
30/01/2023 à 04:30

je l'ai vu en partie hier soir en zappant avec Marce à l'ombre de michel Blanc, au passage le Pairs de 84 est vraiment moche, sale et carré,
le film sur la 2 demarrait a 21H10/15, Schwazie apparit vers ...22H15 mdr ou plus!
je croyais qu'un T800 faiait dans les 300kg là j'apprends de la bouce de L Hamilton qu'il fait "200 kg" et qu'elle ne comprend pas comment ce mari maqué a sa concubine ne se fasse pas debunker par sa "femme" ( dans un lit) mdr!
fallait bien trouver une pirouette scenaristique aupres des moutons!
heureusement que çà reste platonique comme relations, mais j'attendais de voir si Sarah Connos allait aborder la question des WC, car le T800 ne va Jùais aux WC et sa femme a eu plus de 20 ans pour le debunker!
ce qu'il faut pas faire pour extraire des dollars de nos jours,

Chris11
29/01/2023 à 19:36

@sanchez : j'avais adoré justement ce passage, en quelques secondes se passe ce qui aurait pu se passer (mais a raté) pendant 3 films! Ca pose l'ambiance et rebat les cartes.

Sanchez
29/01/2023 à 18:50

Je me souviens de ce prologue ignoble, John Connor qui se fait buter en 2 secondes au fusil à pompe au club med. Le T1000 n’y avait pas pensé !

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