Jujutsu Kaisen : exorcismes, fléaux et bastons, le studio Mappa continue sa fulgurante ascension

Elliot Amor | 25 mai 2021 - MAJ : 25/05/2021 17:48
Elliot Amor | 25 mai 2021 - MAJ : 25/05/2021 17:48

Entre le mois d'octobre 2020 et mars 2021, la série Jujutsu Kaisen a fasciné une grande partie des fans d'animes et mangas sur la plateforme Crunchyroll (retrouvez là par ici). Et même quelques mois après, l'anime du studio MAPPA continue d'occuper nos pensées les plus joyeuses. Mais pourquoi ?

 

photoLa bagarre

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Multi Clownage

Au premier abord, Jujutsu Kaisen ressemble à des dizaines d'autres animes et mangas qu'on apprécie depuis le milieu des années 1980. Le premier épisode nous raconte la vie de Yuji Itadori (Yū pour les intimes), un adolescent orphelin qui vient tout juste de perdre son grand-père. Il se retrouve malgré lui, en pleine nuit dans son lycée, au beau milieu d'une invasion d'esprits maléfiques appelés fléaux. Megumi Fushiguro, un jeune homme du même âge, lui explique que ces fléaux ont été attirés par une ancienne relique qui, à l'origine, servait à les éloigner.

Après un dialogue explicatif en plein milieu d'un combat contre un fléau (comme on aime), Yuji mange cette relique « de classe S » pour acquérir des super-pouvoirs. Et en regardant ce premier épisode, on ne peut s'empêcher d'avoir une impression de déjà-vu. C'est normal, l'univers et la trame narrative de Jujutsu Kaisen s'inspirent énormément de Bleach, un manga de 74 tomes et un anime de 366 épisodes dont vous avez peut-être vaguement entendu parler.

S'ensuivent de nombreuses péripéties pendant lesquelles le héros est habité par Ryomen Sukuna, le fléau surpuissant dont il a mangé une relique (un doigt). En partie à cause de ça, Yuji est malencontreusement tué très tôt dans la série. Ce n'est pas nouveau de voir un héros « mourir » au début d'un anime, on l'a par exemple vu dans Dragon Ball Z ou L'Attaque des Titans. Mais dans le cas présent, le protagoniste est ressuscité et revient dans le game avec pour objectif de réunir d'anciennes reliques (des doigts). Tout comme dans Yu Yu Hakusho, un shōnen ultra culte dans lequel le protagoniste est également surnommé Yū.

 

photoLes héros d'animes sont souvent des goinfres, mais là ça va loin.

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Itadori a le plaisir d'intégrer l'école d'exorcisme de Tokyo, il fait partie des élèves de première année aux côtés de Megumi, qu'il connaît déjà, et de Nobara Kugisaki, le personnage féminin principal (pour l'instant). Eh oui, c'est tout, il n'y a que trois élèves en première année. Mais que serait une classe d'exorcisme sans un bon enseignant ? Gojo Satoru, un personnage très énigmatique, se fait une joie d'endosser le rôle de mentor pour ces trois lycéens débordant d'énergie spirituelle occulte. D'ailleurs, cette équipe, composée d'une fille et deux garçons et encadrée par un professeur aux cheveux blancs qui cache son visage, nous fait penser à un autre anime. Mais impossible de se souvenir duquel. Ça nous reviendra.

Comme on le sous-entendait, les références à Bleach ne se limitent pas à l'épisode 1. Si vous avez suivi le manga de Tite Kubo, vous êtes au courant que les personnages combattent des Hollows, de mauvais esprits qui apparaissent un peu de la même manière que les fléaux. Et bien certains Hollows de Bleach ont réussi à obtenir une conscience en plus d'une puissance démesurée, ce qui a fait d'eux des Arrancars. Dans Jujutsu Kaisen, certains fléaux semblent avoir développé une conscience qui leur permet de parler de partager leurs émotions (ce qui ne les empêche pas d'être méchants et super forts). Ces super fléaux sont dirigés par un ancien exorciste, comme les Arrancars étaient dirigés par un ancien Shinigami.

 

Team 7Naruto ! Ces quatre-là nous font penser à l'équipe 7 de Naruto !

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Le fruit du fléau

Cet article n'a pas pour vocation de faire une simple liste de toutes les références à la pop culture qu'on trouve dans la série. On a plutôt envie de montrer pourquoi ces nombreuses similitudes avec d'autres animes et mangas font de Jujutsu Kaisen une œuvre post-moderne qui mérite son succès.

Revenons vers notre Yuji adoré, sa personnalité est un mélange entre Ichigo de Bleach et Shirō de Fate/Stay Night. À l'instar de ces deux personnages, Yū est souvent contraint à se battre à la tombée de la nuit, car c'est là que le devoir l'appelle. Sa simplicité fait parfois penser à Son Gokû de DBZ (qui a inspiré 90% des héros de mangas), Natsu de Fairy Tail et Luffy de One Piece, Yuji a d'ailleurs obtenu ses pouvoirs en mangeant sans réfléchir un truc pas très bon et... démoniaque.

Un héros de shōnen habité par un démon, on l'a beaucoup vu. Le personnage est souvent confronté à cet intrus avec qui il se bat intérieurement pour décider qui contrôle le corps. Les premiers animes qui nous passent par la tête sont évidemment Bleach et Naruto, mais le fléau intérieur de Yuji a l'air difficile à dompter et peut faire apparaître des bouches et des yeux sur le corps de son hôte, c'est plutôt stylé et ça évoque clairement le manga Parasite (qui a influencé plus d'un mangaka contemporain). Et malgré toutes ces impressions de déjà-vu, ne sommes-nous pas très attendris par ce personnage ? Nous, oui.

 

photoCerise sur le gâteau, Sukuna est l'antagoniste principal.

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Hormis ses camarades, Yuji se lie d'amitié avec un garçon de son âge qui se nomme Junpei. Le pauvre bougre est victime de harcèlement dans son lycée, un problème dont la société parle trop peu, qu'on vive au Japon, en France ou ailleurs. Pendant que son amitié avec Itadori grandit, Junpei a le malheur d'être manipulé par Mahito, un des fléaux intelligents qui veulent anéantir l'humanité. L'adolescent en quête de figure paternelle le voit comme un mentor. Mahito donne un des doigts à Junpei, ce dernier le mange et obtient des pouvoirs.

La référence ne nous vient pas forcément tout de suite à l'esprit, mais un adolescent qui reçoit un pouvoir divin de la part d'un être ni vivant ni mort et qui assouvit ses pulsions avec ce même pouvoir... c'est le pitch de Death note. Le problème, c'est que Junpei n'est pas aussi vicieux que Light Yagami, on ne peut pas vraiment lui en vouloir de s'écarter du droit chemin, il nous fait penser à une version alternative de Yuji qui n'a pas rencontré les bonnes personnes au bon moment. C'est à partir de cet arc que l'anime devient profondément sombre tout en restant hilarant.

 

photo« Ils sont dans nos campaaagnes, dans nos viiillages »

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Parlons maintenant du personnage qui a le plus fait parler de lui, Satoru Gojo, le plus fort des exorcistes. La communauté de fans s'est amusée, à raison, à le comparer au personnage de Kakashi dans Naruto, non seulement pour son style, mais aussi pour son aspect mystérieux. Mais Kakashi n'est certainement pas la seule source d'inspiration, l'attitude de Satoru rappelle Kisuke Urahara de Bleach, cet ancien Shinigami jovial, nonchalant et insouciant qui cache un passé tragique.

L'avenir nous le confirmera, mais il semble évident que le lourd passé de Gojo nous sera révélé dans les prochaines saisons, on ne devient pas « le plus fort des exorcistes » en faisant des blagues lourdes et en regardant des films hollywoodiens dans sa cave. Bref, le personnage a vu sa popularité monter en flèche pendant l'amicale inter-lycées (#MyHeroAcademia), lorsqu'il lâche un Kamé Hamé Ha dévastateur (et violet) qui relève plus de la déchirure dans l'espace-temps.

 

photoSuper Saiyan white

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Puisqu'on parle du tournoi des écoles d'exorcisme, parlons de ce taré d'Aoi Todo, le « besto friendo » de Yuji. Ce mastodonte arrive tout droit de Kyoto avec sa classe pour casser des bouches et c'est Itadori qui croise sa route. Todo aurait pu foncer vers le combat sans trop réfléchir comme le ferait Kenpachi de Bleach. Mais non, il a besoin de s'inventer une backstory dans laquelle Itadori et lui étaient les meilleurs amis du monde. Tout ça parce que le héros lui a dit que Jennifer Lawrence était son genre de femme.

Certes, c'est absurde et très drôle, mais il y a aussi une volonté de se moquer des nombreuses rivalités/amitiés qui existent dans les shōnens depuis si longtemps. Par exemple, Naruto considère Sasuke comme son meilleur ami alors qu'ils n'ont jamais vraiment passé de temps ensemble. Puis à la fin, ils se battent. L'état d'esprit de Todo, à lui tout seul, remet en question ce genre de relation dans les mangas. De plus, le studio MAPPA prend très au sérieux cet affrontement en le rendant aussi spectaculaire et ingénieux que le climax d'un arc. Mais le combat est interrompu par les fléaux et c'est encore plus jouissif de les voir faire équipe.

 

photo« My... Besto friendo »

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Yu Yu's Bizarre Adventure

Tant qu'on y est, parlons de ce gros combat qui oppose les brothers à Hanami, le fléau qui se prend pour Poison Ivy, on y retrouve les plus grandes qualités de la série. Rappelons d'abord que le réalisateur de Jujutsu KaisenSunghoo Park, est aussi celui de The God of High School, une autre pépite du studio MAPPA qui s'est terminée quelques jours avant le démarrage de JJK. L'anime était donc sur de bons rails dès le début (même si Park n'arrive qu'à partir de l'épisode 7).

En dehors de la quasi-perfection dans la mise en scène de ce combat, on retient deux choses en particulier : la technique Boogie Woogie de Todo et le rayon noir d'Itadori. Boogie Woogie permet à Todo d'échanger sa place avec celle d'un allié ou d'un ennemi, il ne prend même pas le temps d'expliquer à son coéquipier comment fonctionne sa technique, il lui demande simplement de lui faire confiance. Yuji comprend vite le principe (la confiance, les camarades, Fairy Tail, et tout et tout) et cela nous donne un des segments les plus incroyables de ce 2 contre 1.

 

photoKokusen

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

En plein combat, l'anime nous explique brièvement ce qu'est le rayon noir (« kokusen » en VO). Disons que l'excitation ne nous permet pas de tout à fait comprendre ce que c'est, mais on comprend que c'est un coup de poing très puissant, plutôt rare et que le record mondial du nombre de rayons noirs à la suite est de quatre. On se doutait que ça allait arriver, mais quel magnifique moment lorsque Yuji enchaîne les quatre. La réalisation et le montage y sont évidemment pour beaucoup, mais le plus satisfaisant reste le fait que ces deux techniques nous retournent la tête dans la même moitié d'épisode. 

Après un arc intense et un match de baseball en mode Assassination Classroom, les différentes classes peuvent reprendre les travaux pratiques. On a droit à une phase d'enquête avec un aspect film noir dans laquelle les premières années (donc l'équipe 7) vont affronter un fléau porte-doigts (qui a mangé un doigt de Sukuna) et deux hybrides, des croisements entre une humaine et des fléaux (on ne juge pas les goûts de la maman). En plus de conclure avec brio la saison 1, ces derniers épisodes permettent à Megumi et Nobara de briller aux côtés du personnage principal.

 

JoJo referenceIs that a JoJo reference?

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

L'un des antagonistes, Eso, est sans le moindre doute une référence à JoJo's Bizarre Adventure. Sa pose, son thème musical et... le fait qu'il ne laisse personne voir son dos, qu'on le veuille ou non, sont des références à JoJo. Et elles ne sont pas là juste pour le fan service, ces références se marient très bien avec l'univers de JJK et donnent de la profondeur à un personnage qu'on vient à peine de rencontrer.

Tout ça devient grandiose quand ces pauvres petits antagonistes deviennent les victimes. Megumi se retrouve seul face au porte-doigts et se fait malmener jusqu'au flashback classique dans lequel son mentor lui dit que mourir, c'est nul. Là, le petit Fushiguro, d'ordinaire très calme, fait peur à son adversaire (et à nous aussi), son sourire de psychopathe fait aussi froid que son énergie occulte.

Et c'est encore pire avec Nobara qui trouve un moyen de torturer les deux frères hybrides en retournant leurs pouvoirs contre eux. C'est encore plus impressionnant quand on se dit que le personnage est souvent comparé à Sakura de Naruto, l'inutile de service. Nobara Kugisaki termine la saison 1 en nous faisant clairement comprendre qu'elle est utile et qu'elle nous embête sévère. Ça donne de l'espoir dans le traitement des personnages féminins.

 

photo« Je ne serai pas ta waifu »

© Gege Akutami/Shueisha, JUJUTSU KAISEN Project

 

Nous n'avons évidemment pas pu citer toutes les similitudes et références cachées dans Jujutsu Kaisen. On aurait pu, par exemple, vous dire que Gege Akutami, l'auteur du manga d'origine, s'est inspiré du Nen d'Hunter x Hunter pour développer le concept d'énergie occulte (c'est chose faite) et on retrouve effectivement quelques similitudes dans la façon qu'ont les personnages de développer leurs pouvoirs. Itadori utilise en quelque sorte le Nen du renforcement.

Nous avons aussi délaissé les références ouvertes à des monuments de la pop culture comme Seul au Monde, Le Seigneur des Anneaux, Super Smash Bros. ou encore à quelques animes (on t'oublie pas, Haikyu!!). Avec ces citations d'autres animes, ces références directes à des personnalités d'Hollywood ou à des jeux populaires, le studio MAPPA nous maintient dans notre univers, mêmes les génériques y participent. C'est une chose extrêmement rare dans les shōnens qui ont plutôt tendance à profiter de la suspension d'incrédulité pour nous transporter très loin de chez nous, même s'il s'agit d'univers très semblables aux nôtres.

Eh bien dans JJK, les personnages, à l'image de leur public, fantasment sur Jennifer Lawrence et Sebastian Stan, jouent à la Switch et lisent le Weekly Shōnen Jump. On espère d'ailleurs que vous avez remarqué que la plupart des références citées dans cet article appartiennent à la famille de ce même magazine. Quelle grande et belle famille.

La saison 1 de Jujutsu Kaisen est disponible en intégralité sur la plateforme Crunchyroll depuis le 26 mars 2021, en VF et en VOSTFR.

 

Affiche officielleCeci est un article publié dans le cadre d'un partenariat. Mais c'est quoi un partenariat sur Ecran Large ?

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commentaires
Kay1
26/05/2021 à 07:34

Certainement la surprise de la fin d’année 2020 en Anime . A vrai dire , le manga lorgne clairement sur Naruto ainsi que Bleach , mais je trouve que la recette fonctionne merveilleusement bien . Si au début , ça ressemble clairement à un shonen classique , le récit ne fait que monter crescendo jusqu’au final . Il y’avait longtemps que je n’avais pas eu un tel attrait pour un manga / animé , peut être depuis Gintama . Si le manga continue sur sa lancée , on aura peut être un nouveau cador .
Et si les personnages paraissent hauts en couleurs , ils se complexifient au fur et à mesure de l’histoire .

Pour moi , cette première saison était une belle réussite .

jaroh
26/05/2021 à 04:10

Le soin apporté à l'animé et l'efficacité du matériau de base ne pouvaient qu'être synonyme de succès.

J'ai beaucoup aimé même si ça reste du shonen classique. C'est frais, moderne et sans fioriture.

Comme avec beaucoup de succès éphémères à voir comment cet animé sera suivi dans le temps…

Jojo
25/05/2021 à 20:59

Excellente saison 1 et une bonne entrée en matière dans l'univers sublimée par le studio Mappa !

Mushy
25/05/2021 à 19:00

@Nico
N'importe quoi sérieux ! Personne compare JJK à Snk ! Leur seul point commun est le studio d'animation
Et de plus , JJK a un début très classique mais plus on avance dans l'histoire plus il surclasse tout les shonens.
Également , y'a aucun démon dans JJK ni de pouvoir de fou furieux pour le héros
En faite , t'as juste pas lu/vu JJK je pense ....

Steamboy62
25/05/2021 à 18:20

Vous parlez de la série comme si c'était une création pure et simple du studio MAPPA, mais vous auriez pu rappeler que, avant d'être un anime réalisé par cet excellent studio, JJK est un formidable manga de GeGe Akutami. Toutes les références pop, les idées de scénario, tout ça tout ça, c'est dans le manga à la base. Rendons à César ce qui appartient à Jules.

Nico.
25/05/2021 à 18:03

Pour avoir regardé le début de l'animé (car soit disant si on aime l'attaque des titans on devrait aimer ce truc) j'ai trouvé particulierement exécrable.
C'est un Shonen tout ce qu'il y a de plus classique, avec des personnages inintéressants et qui passent leurs temps à faire les zouaves (ce qui devient vite fatiguant) alors quils vont devoir affronter des démons (qui sont super génériques et pour la plupart inintéressants et servent juste à se faire casser la gueule par le perso principal qui, b a ba du Shonen, découvre ses pouvoirs de fou furieux quand un méchant est un peu trop fort pour lui sur l'épisode en question.
Reste l'animation qui est acceptable (mais moins bonne que l'attaque des titans selon moi).

Poubelle.