L'Élu : critique qui veut y croire sur Netflix

Arnold Petit | 18 août 2023 - MAJ : 24/08/2023 10:30
Arnold Petit | 18 août 2023 - MAJ : 24/08/2023 10:30

Après l'échec de Jupiter's Legacy et la déception de Super Crooks, Netflix continue de piocher dans les projets du Millarworld pour garnir son catalogue. Ce qui devait être un film de Matthew Vaughn (Kick-Ass) inspiré du comics American Jesus de Mark Millar et Peter Gross est ainsi devenu une série d'Everardo Gout et Leopoldo Gout (American Nightmare 5 : Sans limites) appelée L'Élu. Et cette nouvelle adaptation arriverait presque à redonner la foi dans la plateforme et Mark Millar.

LATIN-AMERICAN JESUS

L'Élu est une adaptation surprenante. American Jesus est la première publication du Millarworld, mais aussi un comics relativement quelconque qui se termine sur un twist pas si original que ça dans les dernières pages. L'adapter était donc un choix plutôt étonnant parmi toutes les oeuvres de l'auteur écossais. Everardo Gout et Leopoldo Gout, les créateurs de la série, ont cependant décidé de modifier plusieurs éléments du scénario de Mark Miller pour se l'approprier et le destiner au marché latino-américain.

La série s'intéresse toujours à Jodie (merveilleusement incarné par le jeune Bobby Luhnow), un adolescent américain de 12 ans qui serait la réincarnation de Jésus Christ, sauf que l'histoire ne se déroule plus dans une banlieue de Chicago, mais dans une petite ville frontalière de Basse-Californie, au Mexique. L'inspiration super-héroïque a quant à elle laissé place à une atmosphère fantastique et mystique qui tend par moment vers l'horreur.

 

L'Elu : photoJésus revient

 

Au-delà du fait d'adapter le récit à un nouveau public hispanophone, ces changements sont tout à fait pertinents, puisqu'ils permettent d'aborder les questions autour de la foi, de la croyance et de la réincarnation sous un autre point de vue, dans un pays où le catholicisme et la spiritualité tiennent une place encore plus importante qu'aux États-Unis avec son protestantisme dominant.

Et d'autre part, le fait de remplacer l'environnement pavillonnaire américain classique par les paysages hostiles et rocailleux de la frontière mexicaine donne un aspect circonscrit au scénario, où les personnages sont coincés dans cet environnement aussi magnifique qu'isolé. Hormis lors de courts flashbacks en 16:4 au début de chaque épisode qui montrent le passé de la mère de Jodie, le réalisateur Everardo Gout utilise un format 4:3 qui agit comme une vision resserrée et intimiste sur la vie de cet adolescent qui traîne avec ses amis et qui tente de comprendre qui il est.

 

L'Elu : photoPerdus entre ciel et terre

 

LA PASSION DU CHRIST

Alors que le comics original se focalisait uniquement sur Jodie et s'intéressait rapidement à ses dons après qu'il ait survécu de façon miraculeuse à un accident, L'Élu lui donne un groupe d'amis et prend le temps de suivre cette bande de gamins qui essaient de s'occuper comme elle peut dans le désert de Santa Rosalia. Parmi ces premiers "apôtres" se trouvent Tuka (Juanito Anguamea), un jeune garçon yaqui aussi touchant qu'ouvert d'esprit, Wagner (Alberto Pérez-Jácome), qui cache sa sensibilité par son comportement de casse-cou, Hipólito (Jorge Javier Arballo), l'aîné et le plus sage de la bande, et enfin Magda (Lilith Curiel), dont Jodie est amoureux.

Cette petite bande immédiatement attachante rappelle étrangement Adam Young et les "Autres" qui l'accompagnent dans la première saison de Good Omens : même si Jodie développe des pouvoirs étranges, le groupe pense d'abord à monter des spectacles pour récolter de l'argent en arnaquant les habitants du coin et continue de mener son existence, entre fin de l'innocence et entrée dans l'adolescence.

 

L'Elu : photoUn pour tous, tous pour un

 

Plus qu'une série fantastique, L'Élu devient alors une sorte de chronique d'entre deux âges d'une simplicité et d'une sincérité troublantes, dans laquelle un garçon se cherche et découvre qu'il est capable d'accomplir des miracles. C'est cette authenticité et cette tendresse à la fois dans la mise en scène et entre les personnages qui portent la série et qui lui donnent son énergie, sa particularité.

Si l'ambiance se rapproche parfois de Stranger Things et Messiah pour l'aspect surnaturel et religieux, cette sobriété contraste totalement avec les deux autres séries de Netflix, et le format 4:3, qui rappelle le film 90's, prend alors presque une dimension oppressante tandis que Jodie gagne de plus en plus de fidèles et prend conscience de ses facultés exceptionnelles.

 

L'Elu : photoÊtre libre avant d'être adulte

 

Péché capital

Le parcours de Jodie et des autres personnages permet également à la série de traiter différentes thématiques par le prisme de la religion, comme le deuil, la tolérance ou encore le fanatisme à travers la figure du pasteur du village, qui veut ériger un temple à la gloire de ce nouveau Messie.

À mesure que l'adolescent accomplit des miracles de plus en plus impressionnants, ses paroles et ses actions finissent par avoir des conséquences sur le reste de la communauté et entraînent des évènements plus ou moins étranges, mais le sort de Jodie et sa bande est finalement plus intéressant que les questions religieuses au coeur du scénario. D'autant que le scénario laisse certaines intrigues de côté, comme la mère de Jodie, Sarah (Dianna Agron), ou Lemuel (Tenoch Huerta), simplement là pour jouer l'antagoniste aux motivations obscures.

 

L'Elu : photoEncore plus inutile que Namor

 

Pire : après un début de saison qui installait une ambiance de plus en plus pesante en montrant le changement de comportement de Jodie et la folie qui s'empare des habitants du village, la série finit par se saborder dans le dernier épisode. Le rythme posé du début s'accélère sans raison et la sobriété formelle disparaît totalement dans un final grandiloquent avec lumière divine, tableaux vivants, reprise du morceau Lux Aeterna de Requiem For A Dream et tout ce qu'il y a de plus caricatural.

En plus de réduire à néant toute la proposition des premiers épisodes, cette fin de saison cataclysmique, littéralement, rend le twist final du comics encore plus prévisible. Les dernières minutes ne servent ensuite qu'à préparer la suite dans le cas où la série serait renouvelée pour une saison 2, en priant pour que cette conclusion désastreuse ne soit qu'un faux pas dans le chemin de croix de L'Élu.

La première saison de L'Élu est disponible depuis le 16 août sur Netflix.

 

L'élu : Affiche officielle

Résumé

En trahissant le comics dont elle s'inspire, L'Élu développe sa propre histoire fantastique et trouve une certaine singularité dans le ton grâce à ses nouveaux décors, ses adorables personnages et son format 4:3, mais la série finit par se perdre et s'achève sur un final inutilement épique et convenu.

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commentaires
Vivien 60
04/09/2023 à 15:38

@Gugusse 0 : pour faire une image 4/3 sur 16/9 ou 21/9 suffit de rajouter des bandes noires sur les cotés hein.
Et par ailleurs, vous dites "le 4/3" n'existe pas au cinéma, mais le 1/66 ou le 1/33 que vous mentionnez n'existent... strictement nulle part !
je suppose que vous vouliez dire 1.33:1 ... qui justement est du 4/3 ( faites la division lool ).

Vivien 60
04/09/2023 à 15:28

4:3 : "une vision resserrée et intimiste", "oppressante" ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire pour vendre un format d'image inadapté aux écrans d'aujourd'hui !
Perso, en voyant ça, je me suis dit : font ch*** ces bandes noires ( = je profite pas vraiment de l'image, essayons de changer la taille de al fenête : ah bah non toujours pas ), la série date de quand ? 2023. ha, de la SD en 2023, bizarre. Ha non, c'est marqué HD. Effectivement, du 1920*1080 utilisé en 4/3 c'est du 1440*1080. Ca peut. Mais c'est nul.

Iolofato
28/08/2023 à 16:44

Après 3 épisodes nous avons été touchés, à défaut de grâce, par l'ennui. Le vrai miracle est d'avoir convaincu des investisseurs avec des dialogues écrits avec les pieds et des comédiens aussi crédibles que des poissons rouges en slip sur une tables de pig-pong…

Daroc21
22/08/2023 à 22:33

Série prônant l'intégrisme religieux. Sans intérêt et inadmissible.

Bob
22/08/2023 à 14:39

Cette série est ennuyeuse à mourir, j'ai résisté jusqu'à l'épisode 4 avec énormément de difficulté, dialogue digne d'une série B, mais en beaucoup moins bon puisque nous n'avons même pas le plaisir de rire.

On nous prend vraiment pour des idiots sur la plateforme Netflix !!!

Fisafourletterword
21/08/2023 à 07:55

Plutôt agréablement surpris par la série qui a un vrai univers et une adaptation assez intelligente. J'avais bien aimé le comics - sans plus- et le boulot est bien fait là. Pas la série du siècle mais très appréciable et fait avec amour

Mrike
20/08/2023 à 00:07

J'ai vraiment aimé. Le premier épisode était vraiment l'ours par contre, c'est après que ça vient de mieux en mieux. Personnellement je trouve que l'épisode final est grandiose, c'est du très bon spectacle et des émotions. C'est ce à quoi je m'attend à voir en regardant ce genre de séries. Espérons qu'il y est une 2eme saisons, elle mérite

Docteur Benway
19/08/2023 à 22:27

Millar et Netflix se sont bien trouvés : d'un côté un auteur médiocre qui ne fonctionne qu'au buzz et à la provoc ados et de l'autre une plateforme sans aucune ambition.

Pakkun
19/08/2023 à 20:04

Ça tombe bien @Gugusse 0, ça passe à la télé et non au cinéma. Alors chut.

Gugusse 0
19/08/2023 à 18:13

Format 4/3 n'existe pas au cinéma.
1/33 ou 1/66 à la rigueur. Ça m'énerve de se gourer comme ça !!!

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