Transatlantique : critique qui fait de la résistance sur Netflix

Chloé Chahnamian | 7 avril 2023 - MAJ : 07/04/2023 16:54
Chloé Chahnamian | 7 avril 2023 - MAJ : 07/04/2023 16:54

Après la mini-série Unorthodox, qui raconte l'histoire d'une jeune fille juive qui quitte sa famille ultra-religieuse pour vivre à Berlin, Anna Winger est de retour sur Netflix. Dans Transatlantique, Anna Wingler et Daniel Hendler, co-créateur de la série, nous plongent à Marseille en 1940, au tout début de l'Occupation. Deux Américains, incarnés par Cory Michael Smith et Gillian Jacobs, essaient de faire passer des artistes recherchés par les nazis de l'autre côté de l'Atlantique, mais leur entreprise se révèle de plus en plus difficile. Si le point de départ est passionnant, Transatlantique arrive-t-elle à convaincre sur la durée ?

Opération sauvetage

André Breton, Hannah Arendt ou encore Max Ernst ont pu échapper au nazisme et rejoindre les États-Unis grâce à une organisation, le Comité américain de secours. Oeuvre sur la Seconde Guerre mondiale, Transatlantique raconte l’Occupation sous un angle bien particulier, celui des actions menées par les États-Unis pour amener sur son territoire des artistes menacés par le régime nazi. Adaptée du roman The Flight Portfolio de l'autrice américaine Julie Orringer, la mini-série raconte l’histoire vraie de Varian Fry, incarné par l'acteur Cory Michael Smith (Gotham).

En adaptant l'histoire de cet Américain installé à Marseille, les co-créateurs de la série, Anna Wingler et Daniel Hendler, rendent hommage à un pan de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale peu connu et peu raconté. L'évasion de ces artistes juifs ou « assez juifs pour Hitler », considérés comme une menace par le nazisme, a été semée d'embuches et Transatlantique a pour but de retranscrire les difficultés rencontrées pendant cette entreprise risquée.

 

Transatlantique : Photo Grégory MontelUne collaboration contre les artistes

 

Transatlantique a donc une portée historique. Elle reconnait le travail effectué par Varian Fry dont les actions n’ont été reconnues que tardivement, mais aussi l'implication de tous ses collaborateurs américains, anglais et français. Du côté des artistes présentés dans la série, on retrouve aussi Victor Serge et Marc Chagall. Voir toutes ces icônes au sein d’une même série est surprenant. La proposition de Transatlantique et le point de vue qu'elle adopte sont sans aucun doute percutants.

Entre la Gestapo qui traîne, la difficulté d'obtenir des visas, le Consul américain qui se mêle de l'histoire et les États-Unis qui essaient encore de rester neutres, la tâche de Varian Fry n'est pas simple. En résulte alors une aventure rocambolesque, pleine de rebondissements où les personnages essaient de mener à bien une mission périlleuse.

 

Transatlantique : Photo Cory Michael SmithL'homme de la situation

 
Guerre et ludisme

Pour raconter cette histoire complexe, sérieuse et parfois déprimante, Transatlantique aborde son sujet à l'aide d'un ton paradoxalement léger. Les nombreuses péripéties, dont certaines se concluent tragiquement, donnent un certain entrain à l’histoire. Ce dynamisme, renforcé par le grand nombre de personnages et les différentes intrigues, est également amplifié par la musique décalée et enjouée qui apporte une touche de folie.

En laissant de côté les anonymes réfugiés sur la plage dans l'attente de pouvoir embarquer sur un bateau et en choisissant de suivre principalement les artistes privilégies, bien à l'abri dans une luxueuse villa, les créateurs de Transatlantique ont fait un choix scénaristique aux conséquences majeures sur l'ambiance générale de la série. En effet, ce brin de folie, en décalage par rapport au sérieux du sujet, est rendu possible grâce aux artistes, écrivains, et peintres qui peuplent la villa, des âmes qui arrivent à trouver le beau même dans des moments tragiques.

 

Transatlantique : Photo Jodhi May, Alexander FehlingUne soirée comme les autres pour le surréaliste Max Ernst

 

Le côté très ludique, qu'on retrouve aussi bien dans les sous-intrigues d'espionnage et d'évasion, mais aussi dans les enquêtes et les plans à établir, est aussi induit par les différentes langues parlées par les personnages, issus de pays et de milieux différents. Il faut noter la force de ce casting hétéroclite, de Gillian Jacobs (Community), parfaite en riche Américaine fille à papa, ou de Grégory Montel (Dix pour cent), plus que convaincant en policier français collabo, sans compter de nombreux plus petits rôles, tous confiés à des acteurs talentueux.

 

Transatlantique : Photo Gillian JacobsMary Jayne Gold, un porte-monnaie au grand cœur


UN TROP PLEIN D'ENVIES

Toutefois, malgré de bonnes idées de mise en scène, on pense notamment à ces petites saynètes inspirées des films muets de l'époque, la mini-série souffre d’un gros problème : son trop-plein d’intrigues. L’histoire de Varian Fry et de sa mission de sauvetage, qui avait tout pour être le sujet principal de la série, n’est en fait qu’un point de départ. Cette histoire passionnante est noyée sous des intrigues annexes.

S'il est compréhensible d’avoir voulu montrer les à-côtés d’une telle mission, ses conséquences et la multitude d'événements qui influent sur l'opération, Transatlantique se perd en route et s'éparpille. Entre les nombreux personnages, qui ont pour la plupart des objectifs différents, les différents lieux, et les nombreuses intrigues inexploitées, la série veut aborder trop de sujets et en dire trop.

 

Transatlantique : Photo Ralph AmoussouRelégué au second plan

 

Transatlantique essaie d'être à la fois drôle et décalée, historique et sérieuse, une histoire de guerre, mais aussi d'espionnage et de fuite. Cette ambivalence, qui peut tout à fait convaincre dans un premier temps, empêche d'exploiter le thème principal de la série, celui du Comité américain de secours.

Entre les intrigues amoureuses, la création de la résistance menée par l'allemand Albert Hirschman et ses collaborateurs africains, les autres réfugiés anonymes à Marseille, ou encore l'implication des services de renseignements anglais, pour ne citer que ces sous-intrigues, Transatlantique n'arrive pas à choisir un sujet à approfondir. Et forcément, en refusant de laisser des récits et personnages de côté, la série sacrifie en partie le cœur de son histoire.

Transatlantique est disponible en intégralité sur Netflix depuis le 7 avril 2023

 

Transatlantique : affiche

Résumé

L’histoire passionnante de Varian Fry est mêlée à trop d'intrigues secondaires pour être exploitée comme il se doit. Malgré le ton amusant et le ludisme assumé, Transatlantique s’éparpille trop et perd de vue le cœur de son récit.

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Lecteurs

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commentaires
Dede17
20/06/2023 à 14:51

Sous prétexte de traiter ce scénario d un ton léger on a du mal à accepter la désinvolture avec laquelle les intervenants réagissent. Pas de méfiance vis a vis de l'occupant allemand, soirée pique nique avant un départ des réfugiés connu de tous, musique innaprppriee rien de sérieux et de vraisemblable dans cette série. Situations invraisemblables pour des anciens qui ont connu cette époque

gloria
16/04/2023 à 18:10

Je , et de plus je n'habite pas trés loin de Marseille. Serie à oublier tout de suite.n'aime pas du tout cette série, qui aborde un coté tres grave de notre histoire, j'eprouve un malaise tout le long de cette série,quiridiculise Varian Fry, , Je suis trés décue, j'en attendais beaucoup car j'ai lu la vie de Varian Fry

Jdh
10/04/2023 à 21:08

Une histoire vraie et grave qui se retrouve noyée dans une sorte de mélange plus ou moins humoristique.
Les acteurs eux mêmes donnent une impression de grande récréation dont la musique ne fait qu'accentuer cet effet comédie même après le troisième épisode un regret d'avoir perdu son temps à espérer un peu mieux que des clichés de carte postale dont on ne ressent même pas la gravité des événements

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