Don Coscarelli (Bubba Ho-tep)

Patrick Antona | 19 février 2006
Patrick Antona | 19 février 2006

Avec Bubba Ho-Tep, Don Coscarelli fait entrer deux mythes en collision, celui d'un Elvis Presley toujours vivant opposé à un des monstres vedettes du panthéon du film d'horreur, la momie. Avec comme star du film Bruce Campbell, autre personnage à part entière de toute une frange d'un cinéma que l'on aime, l'auteur de Phantasm réussit l'exploit de se rappeler à toute une génération de fans tout en créant un nouvel engouement culte. Rencontre avec une légende du cinéma fantastique. (En bonus, vous trouverez à la fin de cette interview un petit message vidéo de Bruce Campbell, l'acteur principal de Bubba Ho-Tep)

Pour interpréter le rôle d'Elvis aviez-vous en tête Bruce Campbell dès le début ou avez-vous d'abord pensé à quelqu'un d'autre ?
Nous n'aurions pas pu faire Bubba Ho-tep sans Bruce Campbell. Cela n'aurait pas été pareil. La performance de Bruce est grandiose. Qui aurait pu penser qu'un acteur reconnu essentiellement grâce à ses rôles dans la trilogie Evil Dead aurait pu interpréter de manière aussi subtile le personnage d'Elvis ? Bruce m'a agréablement surpris et je pense que la qualité de son jeu a également ravi ses fans.

Entre Le Bal des vampires de Roman Polanski et Frankenstein junior de Mel Brooks, lequel penche en votre faveur ?
Roman Polanski est un réalisateur de génie et son film Repulsion, que je trouve absolument terrifiant, m'a énormément influencé lorsque j'ai fait mon premier film : Phantasm. Malgré tout Frankenstein Jr. reste un classique.

 


Il semble que vous ayez atténué le côté horrifique en faveur du suspense. Était-ce nécessaire pour éviter l'écueil du grotesque et de la répétition ?
Bien que l'on puisse interpréter Bubba Hop-tep comme un film fantastique, mon but en faisant ce film était d'explorer deux personnages amis : Elvis et JFK. Ils se trouvent dans une situation difficile, bloqués dans une maison de retraite et nulle possibilité d'avenir à l'horizon. Les éléments fantastiques comme la momie, Bubba Ho-tep, servent réellement de plate-forme pour une exploration du thème de la vieillesse avec courage, dignité, amitié et rédemption.

 

Le succès de Bubba Ho-Tep vous a-t-il surpris ? Vous avez lancé Bubba Nosferatu, n'avez-vous pas peur d'être de nouveau catalogué, comme vous avez pu l'être avec la saga des Phantasm ?
Quand j'ai commencé Bubba Ho-tep, j'avais confiance en l'histoire qui était, à mon avis, très forte. Cependant, j'ai été surpris par les performances de Bruce Campbell et d'Ossie David. Un grand nombre de mes amis réalisateurs auraient aimé être catalogués de la sorte. C'est le problème lorsque vous réalisez un film d'horreur à succès, vous êtes aussitôt assimilés en tant que réalisateur de films d'horreur. Cependant, j'aime faire ce genre de film et j'attends avec impatience de pouvoir retravailler avec Bruce Campbell.

 


Est-ce que le personnage de Bubba Ho-tep est une métaphore de votre propre personnalité et de votre travail en tant que réalisateur ? Vous semblez arriver toujours là où on vous attend le moins (dans le cas présent : une comédie fantastique avec un côté social fort).
Je suis sûr qu'il y a en moi quelque chose de l'ancien Elvis. Je suis directement concerné par la manière dont la société traite ses personnes âgées : on fait tout pour les écarter. En regardant mes parents et ceux de mes amis vieillir je vois un futur très sombre se dresser devant nous. Je pense que nous n'avons pas d'autre choix que de prendre ça avec une bonne dose d'humour noir.

 

D'où vous est venue l'idée de Phantasm ? On remarque de nombreuses références à des films d'horreur mais ne serait-il pas d'abord inspiré par les films de SF jouant sur la panaronïa typique de ceux des années 1950 (comme Les Envahisseurs de la planète rouge, William Cameron Menzies, 1953) ?
Lorsque j'étais enfant, Les Envahisseurs de la planète rouge a eu un grand impact sur moi. À cette époque, j'ai également vu de nombreux films de science-fiction du même type. Mais c'est difficile de définir Phantasm et je pense que c'est ce qui fait sa force. Il mêle à la fois horreur, drame, comédie et fantastique. À l'origine, je l'ai fait pour décrire la façon dont mon pays aborde la mort et je pense que ce concept convient à tous les genres.

 


Dans Phantasm on retrouve une sorte de rêve associé à un monde dangereux et une espèce de père Fouettard (Angus Scrimm), bien avant que Les Griffes de la nuit ne soit réalisé. Pensez-vous que Wes Craven se soit inspiré de votre film ?
Je n'ai jamais rencontré monsieur Craven donc je ne pense pas être en mesure de pouvoir vous répondre à ce sujet. Je sais que nombre de grands metteurs en scène ont puisé dans d'autres films pour faire les leurs. Il me semble que c'était Spielberg qui disait qu'en fait il n'existe qu'un seul film et que nous en filmons tous une partie.

 

Phantasm est aujourd'hui un classique. N'est-ce pas un trop lourd fardeau à porter ? Seriez-vous tenté d'en faire un remake ?
C'est gentil de classer le film dans cette catégorie. Et non, ce n'est pas un poids du tout. Rencontrer des fans de la série est un bonheur et je suis encore surpris d'entendre les diverses interprétations qu'on peut en faire. Quelques fois les spectateurs voient des choses que jamais je n'aurais imaginées. Je pense également qu'un remake pourrait être intéressant. Je serais curieux de voir ce que peut donner un Phantasm non réalisé par Don Coscarelli.

 


Vous vous êtes souvent embarqué dans des projets qui au final n'ont jamais abouti (Screamers par exemple qui a été finalement réalisé par C. Duguay, etc.) Lequel de ces projets avortés vous rend le plus triste ?
Je sais que j'aurais pu faire un grand film de Silver bullet de Stephen King (finalement réalisé sous le titre de Peur bleue par Daniel Attias en 1985, Ndlr). Mais Dino de Laurentiis ne m'en a pas cru capable. Et bien sûr, le scénario du Phantasm 1999 de Roger Avary était grandiose mais aucun studio n'en a voulu.

 

 

 

Le message vidéo de Bruce Campbell
(Cliquez sur l'image pour voir la vidéo)

 

Retranscription et traduction par Nicolas Thys.
Remerciements à Don Coscarelli et à Justine Veillot (WE Productions).

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