Blonde : 5 grands rôles oubliés de Marilyn Monroe

Arnold Petit | 25 septembre 2022
Arnold Petit | 25 septembre 2022

Avant la sortie de Blonde sur Netflix avec Ana de Armas dans le rôle de Marilyn Monroe, retour sur 5 rôles oubliés ou sous-estimés de l'icône hollywoodienne.

En tant qu'actrice et en tant que femme, Marilyn Monroe a eu un impact inégalé sur le cinéma et la culture populaire, incarnant un mythe qui continue de fasciner depuis sa disparition en 1962, à l'âge de 36 ans. Au cours de ses 16 ans de carrière, elle a tourné dans 32 films, parfois sous la direction de grands cinéastes comme Otto Preminger, Billy Wilder, Fritz Lang ou Howard Hawks.

Pourtant, encore aujourd'hui, la star hollywoodienne est réduite à quelques rôles et à l'image de blonde idiote et sexualisée qu'elle a façonnée (et à laquelle les studios l'ont cantonné), alors qu'elle a montré, à maintes reprises, qu'elle était une actrice passionnée et complexe.

Avant que Blonde, le faux biopic réalisé par Andrew Dominik, n'explore la psyché et la vie de cette icône intemporelle, incarnée par Ana de Armas dans le film prévu pour le 28 septembre sur Netflix, on a voulu reparler de Marilyn Monroe. Mais plutôt que de s'intéresser à Certains l'aiment chaud, Niagara, Les hommes préfèrent les blondes, Sept ans de réflexion ou Rivière sans retour, on a préféré revenir sur 5 rôles oubliés ou un peu moins connus, mais qui sont tout aussi brillants et qui racontent beaucoup sur elle.

 

Marilyn Monroe : photoBlonde, mais pas que

 

Les Reines du music-hall

Sortie : 1948 - Durée : 1h01

 

Les Reines du music-hall : photoAu centre de tous les regards

 

De quoi ça parle : Mae Martin (Adele Jergens), ancienne star du burlesque, et sa fille Peggy (Marilyn Monroe) dansent toutes les deux dans une troupe de music-hall. Après le départ de la vedette du spectacle, le patron demande à Mae de la remplacer, mais elle s'arrange pour que Peggy monte sur scène à sa place. Sa fille remporte tellement de succès qu'elle devient la tête d'affiche et la jeune femme tombe amoureuse d'un dénommé Randy (Rand Brooks), un admirateur secret appartenant à la haute société.

Pourquoi il faut le voir : parce que c'est le premier "grand" rôle de Marilyn Monroe au cinéma (après des apparitions dans Dangerous Years, Choisie entre toutes, Bagarre pour une blonde et Alerte au ranch) et qu'il préfigure, plus ou moins, ce que sera sa carrière. La chevelure dorée (mais pas encore platine), la mine ingénue de femme enfant, le sourire éblouissant et enjôleur, le charme candide, cette attraction indescriptible qu'elle exerce sur la caméra... Tout ce qui définira Marylin Monroe se trouvait déjà, d'une certaine manière, dans Les Reines du music-hall.

 

Les Reines du music-hall : photo, Adele Jergens, Marilyn MonroeAdele Jergens et la jeune Marilyn Monroe

 

Marilyn n'est encore qu'une débutante et son personnage de Peggy n'est assurément pas aussi intéressant que Rose Loomis ou Kay Weston, mais son caractère pétillant et sa voix si chaude et si particulière la rendent aussitôt remarquable, attachante, et l'actrice s'amuse clairement lors de ses numéros de danse et de chant, à la fois guillerets et sensuels. Comme l'audience dans le film, le public ne pouvait être que conquis devant cette jeune actrice qui déborde de personnalité et de douceur.

Derrière l'histoire d'amour impossible, la relation touchante avec sa mère (brillamment incarnée par Adele Jergens) ou le propos autour des classes sociales et des apparences trompeuses, le rôle que tient Marilyn dans Les Reines du music-hall a une certaine portée autobiographique : dans le film, Peggy devient une star qui attire tous les regards du jour au lendemain et la jeune femme essaie ensuite d'échapper à son milieu et de trouver l'amour en épousant Randy, le fils de bonne famille.

 

Les Reines du music-hall : photo"Every Baby needs a Da Da Daddy"

 

Quand Peggy prend la place de vedette du spectacle, Marilyn se retrouve elle aussi sur le devant de la scène, et les paroles de sa première chanson, "Anyone Can See I Love You", annonceraient presque le début de la relation qu'elle entretiendra avec le public : "So anyone can see that I belong to you and you belong to me".

Avant d'être comédienne, blonde ou seulement Marilyn Monroe, l'actrice était Norma Jeane Baker (ou Norma Jeane Mortenson selon l'état civil), fille d'un père qu'elle n'a jamais connu et d'une mère qu'elle admirait, mais internée pour ses troubles mentaux. Elle a travaillé dans une usine en rêvant de devenir actrice jusqu'à ce qu'un photographe la remarque et qu'elle pose comme pin-up et d'autres clichés. Repérée par un agent, elle a ensuite suivi des cours de théâtre, fait quelques essais et entamé sa carrière d'actrice.

 

Les Reines du music-hall : photo, Marilyn MonroePetits mots et orchidées

 

Les Reines du music-hall, à sa sortie, était considéré comme une série B musicale à petit budget et a été un échec. Marilyn Monroe a suivi les traces de Peggy et ne s'est fait connaître qu'un peu plus tard, en apparaissant dans La Pêche au trésor aux côtés des Marx Brothers en 1949, puis en jouant dans Quand la ville dort et Ève en 1950. Deux rôles qui la mettront définitivement sous les projecteurs. En revanche, contrairement à la chanteuse de cabaret, l'actrice n'a jamais trouvé le grand amour qu'elle cherchait désespérément.

 

Troublez-moi ce soir

Sortie : 1952 - Durée : 1h16

 

Troublez-moi ce soir : photo, Marilyn MonroeTroublante Marilyn

 

De quoi ça parle : Nell (Marilyn Monroe) est appelée par son oncle pour garder la petite fille d'un riche couple installé à l'hôtel où il travaille en tant que liftier. La jeune femme fait la rencontre de Jed (Richard Widmark), un pilote de ligne rustre et cynique qui vient d'être quitté par Lyn (Anne Bancroft), la chanteuse du piano-bar de l'hôtel, mais la soirée va finalement prendre une tournure de plus en plus sombre et tragique.

Pourquoi il faut le voir : parce que Marilyn Monroe y dévoile tout son potentiel d'actrice. Fatiguée de jouer les poupées parfaites ou les jeunes filles sentimentales dans les comédies romantiques, l'actrice espérait enfin être reconnue pour son talent dramatique en tenant un rôle plus complexe, et Troublez-moi ce soir a été l'occasion pour elle de le montrer.

 

Troublez-moi ce soir : photoFenêtre sur Marilyn

 

Sous son titre qui sonne comme une invitation racoleuse en français ou en version originale (Dont Bother to Knock, soit "Entrez sans frapper"), le film réalisé par Roy Ward Baker (Atlantique, latitude 41°, Dr Jekyll et Sister Hyde) est en fait un drame psychologique en huis clos qui joue habilement avec les différents visages de Marilyn.

Quand elle apparaît dans le hall d'hôtel dans les premières minutes, Nell est une jeune fille perdue, discrète et réservée, que ce soit avec son oncle (le grand Elisha Cook Jr.) ou le couple dont elle garde la fille. Mais dès qu'elle a couché la petite et qu'elle enfile un déshabillé noir et des bijoux trouvés dans les affaires de la mère de l'enfant, Nell se libère (mentalement, socialement et sexuellement) et se métamorphose, comme Norma Jeane l'a fait pour devenir Marilyn Monroe.

Dès lors, l'actrice laisse tomber le masque de candeur et de timidité du début pour laisser transparaître les démons et les fissures de son personnage. Tour à tour, Nell devient une séductrice envoûtante, une mythomane compulsive, une innocente traumatisée et, finalement, une psychotique prise de pulsions meurtrières et suicidaires. Dans un étonnant mélange entre tendresse, fragilité, charisme et effroi, Marilyn impressionne, suscite autant d'empathie que d'inquiétude, et habite totalement son rôle qui, là encore, lui ressemble curieusement.

 

Troublez-moi ce soir : photoJoyeux babysitting

 

Comme Les Reines du music-hall, Troublez-moi ce soir crée un étrange écho, presque prophétique, avec sa vie et ses tourments : sa peur perpétuelle d'être touchée par la même maladie mentale que sa mère et sa grand-mère ; la maltraitance infantile qu'elle a vécue et que Nell inflige à la petite fille ; son besoin de reconnaissance et d'affection ; son sentiment de rejet et d'abandon et ses névroses qu'elles traitaient par la psychanalyse et les médicaments, jusqu'à sa mort tragique.

Tout au long du film, les angoisses et les cauchemars de Marilyn se retrouvent dans l'ombre de Nell, consciemment ou inconsciemment, et c'est peut-être pour ça que Troublez-moi ce soir est un de ses meilleurs rôles. Pour cette gravité, ce supplément d'âme qu'elle a probablement été puiser tout au fond d'elle-même et qu'elle a rarement eu l'occasion d'exprimer par la suite.

 

Comment épouser un millionnaire

Sortie : 1953 - Durée : 1h35

 

Comment épouser un millionnaire : photoBetty Grable, Lauren Bacall et Marilyn Monroe

 

De quoi ça parle : Schatze (Lauren Bacall), Loco (Betty Grable) et Pola (Marilyn Monroe) habitent ensemble dans un luxueux appartement à New York. À la suite de la disparition de leur propriétaire, parti s'exiler en Europe pour échapper au fisc américain, les trois mannequins mettent au point un plan : attirer des hommes riches, qui soient au moins millionnaires, pour ensuite les épouser.

Pourquoi il faut le voir : parce que c'est le troisième film qui a hissé Marilyn Monroe au rang de star, après sa prestation mémorable de femme fatale dans Niagara et son célèbre numéro dans Les hommes préfèrent les blondes. Deux longs-métrages également sortis en 1953 qui en ont fait un sex-symbol, mais aussi l'archétype de la blonde idiote (avec lequel elle savait jouer).

 

Comment épouser un millionnaire : photoMarilyn attire les escrocs et les méchants...

 

Imaginé par la Fox comme une suite officieuse à la comédie musicale réalisée par Howard Hawks après le succès qu'elle a remporté, Comment épouser un millionnaire reprend plus ou moins les mêmes éléments : Marilyn incarne une blonde vénale et arriviste essayant de mettre le grappin sur un homme riche, sauf qu'elle n'est plus accompagnée de Jane Russell, mais de Lauren Bacall et Betty Grable.

Malgré de jolis costumes, des dialogues plein d'esprit et un tout nouveau format Cinemascope offrant des plans magnifiques d'un orchestre symphonique (dirigé par Arthur Newman, génial compositeur et père du tout aussi génial Thomas Newman) et de différents paysages, Comment épouser un millionnaire n'est qu'une autre comédie romantique des années 50. Pourtant, il a été un des plus gros succès au box-office de l'année et de la carrière de Marilyn Monroe et dégage une simplicité et une énergie qui provient essentiellement de ses trois actrices, sur lequel repose tout le film.

 

Comment épouser un millionnaire : photo... mais Marilyn veut juste un gentil bonhomme qui l'aime, avec ou sans ses lunettes

 

Lauren Bacall, connue pour sa classe et ses rôles de femmes fatales dans les films noirs, était au sommet de sa gloire et joue une femme froide et cynique avec quelques touches d'humanité ; Betty Grable, l'ancienne pin-up et star des années 40, était sur le déclin et se glisse dans la peau d'une femme simple qui veut juste trouver le bonheur ; enfin, Marilyn Monroe, nouvelle coqueluche d'Hollywood, devient de plus en plus populaire et incarne une fille naïve et sensuelle qui est "myope comme une taupe", mais qui a honte de porter ses lunettes.

Chacune, à sa façon, représente une certaine image de la féminité et une époque du cinéma, mais même si Lauren Bacall est la meneuse du groupe et que Betty Grable est brillante dans son rôle de colocataire délurée à l'appétit insatiable, Marilyn est assurément la plus drôle, la plus attachante et celle qui crève l'écran (encore plus depuis qu'elle est filmée en Technicolor).

 

Comment épouser un millionnaire : photoTrois femmes, trois caractères totalement différents, mais pourtant si complémentaires

 

Avec son visage innocent constamment surpris ou ahuri, ses gestes maladroits et son charme inégalé, l'actrice est foncièrement amusante et fait à nouveau preuve d'un réel talent comique dans les scènes où elle se cogne dans les murs, parle toute seule ou se trompe carrément d'avion à cause de ses problèmes de vues.

Pourtant, si elle est une excellente comédienne et qu'elle montre une variété de registres toujours aussi remarquable, Marilyn Monroe est en réalité toujours aussi peu sûre d'elle et commence à acquérir une réputation d'actrice difficile, qui arrive en retard, ne retient pas ses lignes et s'en remet constamment à sa conseillère dramatique, Natasha Lytess (qui le restera jusqu'en 1956).

 

Comment épouser un millionnaire : photoDans la joie et la bonne humeur on a dit, Lauren

 

Dans son autobiographie, By Myself and Then Some, Lauren Bacall écrivait : "Betty Grable était une femme drôle, extravertie, toujours professionnelle et facile. Marilyn était effrayée, peu sûre d'elle, elle ne faisait confiance qu'à sa coach et était toujours en retard. [...] Et pourtant, je ne pouvais pas détester Marilyn. Elle n'avait pas de méchanceté en elle, pas de mauvaises intentions ("bitchery" dans le texte original). Elle devait simplement se concentrer sur elle-même et sur les gens qui n'étaient là que pour elle. Je l'avais rencontrée quelques fois auparavant, et je l'aimais bien."

 

Arrêt d'autobus

Sortie : 1956 - Durée : 1h36

 

Arrêt d'autobus : photo"Toi être à moi et toi suivre moi "

 

De quoi ça parle : Bo Decker (Don Murray), un jeune cow-boy simplet quitte son ranch et voyage vers l'Arizona en compagnie de son ami Virgil (Arthur O'Connell) pour participer à un rodéo. Sur le chemin, il fait la rencontre de Chérie (Marilyn Monroe), une petite chanteuse de cabaret qu'il se met en tête d'épouser coûte que coûte, même si elle ne cesse de le repousser.

Pourquoi il faut le voir : Parce qu'il est un mal-aimé, alors qu'il marque un tournant dans la carrière de Marilyn Monroe. En 1956, l'actrice est déjà une immense star et vient d'immortaliser son image avec sa robe blanche qui se soulève dans Sept ans de réflexion, mais elle se sent toujours exploitée par la Fox. Débute alors un long bras de fer entre elle et le studio. Elle claque la porte d'Hollywood pour s'installer à New York, où elle suit les cours de Lee Strasberg au prestigieux Actors Studio et crée sa propre société de production, Marylin Monroe Productions. En conférence, elle exprime sa frustration et sa lassitude de jouer "les mêmes rôles sexuels".

 

Arrêt d'autobus : photoMarilyn en a marre

 

Parvenant à faire céder la Fox, trop inquiète de perdre sa star, l'actrice obtient un nouveau contrat, avec un meilleure salaire, la possibilité de travailler pour la concurrence et un droit de regard sur le choix du scénariste et du réalisateur de ses films. De retour à Los Angeles, libre de choisir son prochain projet, elle s'arrête sur une pièce de William Inge dont l'adaptation est écrite par George Axelrod, scénariste de Sept ans de réflexion, et réalisée par Joshua Logan, qui sort du succès de Picnic, adapté lui aussi d'une pièce de William Inge.

Avec ce petit film, intitulé Arrêt d'autobus, Marilyn veut enfin être prise au sérieux. Accompagnée sur le tournage de Paula Strasberg, la femme du directeur de l'Actors Studio et sa nouvelle coach, elle prépare son interprétation dans les moindres détails. Pourtant, à première vue, le personnage de Chérie qu'elle interprète dans le film n'a pas l'air différent de ceux qu'elle a joués auparavant et ne l'aide pas vraiment à se détacher de l'image de potiche que l'actrice détestait.

 

Arrêt d'autobus : photoLa belle et le bête

 

Déterminée à bien faire, Marilyn devient méconnaissable : elle parle avec un fort accent du Sud (qu'elle ne tient pas toujours très bien), chante faux, porte un maquillage excessif avec un teint presque fantomatique et s'habille avec des costumes légers et vulgaires. L'actrice prouve à nouveau son talent et sa spontanéité dans les scènes comiques par son expressivité et ses mimiques, mais donne surtout une étonnante complexité à la chanteuse de cabaret sans talent, en s'inspirant, encore une fois, de sa propre expérience. Moyen qu'elle utilisait déjà avant la "méthode" de l'Actors Studio.

Chérie est une femme libérée, partie de sa campagne natale en rêvant de devenir une célèbre actrice, mais la "cantatrice", comme elle aime se présenter, s'est perdue en chemin et se retrouve désormais obligée de chanter en petite tenue dans un bar miteux devant un parterre de cow-boys qui la regardent à peine. En se préparant pour son numéro, comme lui a ordonné son horrible patron, la chanteuse raconte son histoire à une serveuse et montre un plan avec Hollywood comme destination.

Alors qu'elle décrit un endroit où "on est découvert, on obtient des essais, des contrats, tout ce qu'on veut, un endroit où on est traité avec un peu de respect", la critique de Marilyn envers les studios et les producteurs est limpide et l'actrice semble évoquer ses propres désillusions avec sa carte à la main.

 

Arrêt d'autobus : photoPrisonnière des machos et des imbéciles

 

Plus tard, dans une scène simple et intimiste (la plus belle du film), Chérie se confie à une passagère du bus qui accepte de l'aider alors que le cow-boy déséquilibré l'a enlevé pour la ramener de force chez lui afin de l'épouser.

Étrangement, à ce moment-là, l'accent que prenait Marilyn est un peu moins prononcé et l'actrice dégage une bouleversante sincérité tandis que son personnage parle de son passé, de ses amours de jeunesse, de la famille qu'elle imagine et de l'homme de ses rêves. Un homme "qui la respectera, au-delà de l'aimer, la désirer et tout le reste". Elle-même tiraillée par sa carrière et son envie d'avoir des enfants, Marilyn raconte sa propre histoire à travers le personnage de Chérie, elle qui voulait être une grande actrice et qui se retrouve obligé de jouer les blondes de service.

 

Arrêt d'autobus : photoChérie ou Marilyn ?

 

Arrêt d'Autobus, même s'il se moque du machisme et de la masculinité plus que toxique de Bo, n'essaie jamais de s'interroger sur le harcèlement, le consentementou le sexisme de son époque (pour preuve, à la fin du film après avoir fait ses excuses à Chérie, le cow-boy prend conscience dans un éclair de génie que... les femmes sont différentes des hommes).

Cependant, derrière la petite comédie qui a très mal vieilli et les bouffonneries insupportables de Bo (première apparition de Don Murray), le film a offert à Marilyn Monroe sa première production, un de ses plus beaux rôles, dans lequel elle affirmait sa volonté de s'émanciper d'un système hollywoodien qui l'objectifie pour se consacrer à ce qu'elle voulait faire depuis toute petite : jouer la comédie.


Le Milliardaire

Sortie : 1960 - Durée : 1h59

 

Le Milliardaire : photo"My name is... Lolita !"

 

De quoi ça parle : Jean-Marc Clément (Yves Montand), riche héritier d'un empire colossal à New York, apprend qu'une revue dans laquelle il sera caricaturé se prépare dans un petit théâtre. Avant de faire interdire la représentation, il se rend à une répétition pour voir ce qui sera raconté sur son compte et tombe sous le charme d'Amanda, la star du spectacle. Confondu avec un acteur venu jouer son rôle, le milliardaire joue le jeu, espérant conquérir la jeune actrice, qui déteste Jean-Marc Clément ou son style de vie.

Pourquoi il faut le voir : Parce que c'est l'avant-dernier rôle de Marilyn Monroe, mais Le Milliardaire est malheureusement plus connu pour les scandales liés à la production, la relation qu'ont entretenu Yves Montand et Marylin Monroe sur le tournage ou la scène, mémorable, où l'actrice apparaît à l'écran.

 

Le Milliardaire : photo"Tu ne m'as pas vu dans Le Salaire de la Peur ?"

 

Dévoilant d'abord ses jambes en collants qui glissent le long d'une barre, l'actrice provoque toujours le même effet subjuguant chaque fois que la caméra se pose sur elle. Avec sa voix suave, son air malicieux, son pull mauve et une sensualité sans pareil, Marilyn chante "My Heart Belongs to Daddy" et captive inévitablement le regard de Jean-Marc Clément, des danseurs et des spectateurs, comme s'ils la découvraient eux aussi pour la première fois.

Cependant, une fois que la musique s'arrête et qu'elle descend de scène, Amanda révèle une facette bien différente. Derrière les déhanchés et les provocations, l'actrice est en fait une jeune femme simple et naturelle, qui est inscrite au cours du soir pour étancher sa soif de culture et qui explique plus tard à Jean-Marc qu'il faut travailler pour réussir dans ce métier, pas seulement compter sur son physique.

 

Le Milliardaire : photoL'ingénue et le frenchie

 

Encore une fois, le personnage ressemble presque à une mise en abyme de Marilyn Monroe et le principe même du film est justement de jouer avec la célébrité, les mensonges, les artifices et les apparences, jusqu'à ce que fiction et réalité se rejoignent : Jean-Marc Clément se retrouve à caricaturer Jean-Marc Clément, tandis qu'Yves Montand, acteur, chanteur et danseur accompli, surjoue ses propres traits dans le rôle de cet homme charmeur, gauche et un peu triste, qui ne sait ni chanter, ni danser.

Loin de l'image de la ravissante idiote et de la femme fatale qui lui collait à la peau, l'interprétation de Marilyn est drôle, gracieuse, simple et sincère. Le couple qu'elle forme avec le Français est aussi touchant que crédible et dans ce quiproquo du réel et de la fiction, le fait que les deux stars se soient laissés prendre à leur propre jeu rend l'histoire encore plus incroyable et mémorable. Pour ses numéros, son charme et tout ce qui l'entoure, Le Milliardaire est un grand rôle de Marilyn Monroe, peut-être celui qui lui correspondait le mieux.

 

Le Milliardaire : photoSéduction en pas chassé

 

D'autres longs-métrages comme Chérie, je me sens rajeunir, Le démon s'éveille la nuit, Le Prince et la Danseuse ou Something's Got to Give (son dernier film, resté inachevé) méritent aussi d'être vus et auraient pu être choisis, mais ces 5 rôles, qui correspondent chacun à une période de la carrière de Marilyn Monroe, offre un portrait assez complet de l'actrice et la femme qu'elle pouvait être, que ce soit devant ou derrière la caméra.

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commentaires
Francoise
03/11/2022 à 20:40

Je relis Blonde de Joyce Carol Oates qui parle de bien d'autres choses que simplement Marilyn Monroe (l'acteur et le rôle, les femmes américaines pendant la guerre, les orphelinats, etc.).

En regardant des passages de films de Norma Jean, il me semble qu'au contraire elle surjoue ses rôles, un peu comme Jean-Pierre Léaud dans les films de Truffaut. Elle est donc très moderne. Le côté drôle vient peut-être de cette distance qu'elle crée en surjouant.

Dommage qu’à l'époque, on maquillait exagérément les actrices.

Birdy'n love
25/09/2022 à 21:52

Bravo Arnold Petit, magnifique article, superbe plume. Un plaisir à lire.