Films

Possession : le cauchemar tentaculaire dont le cinéma ne s’est jamais remis

Par Simon Riaux
14 janvier 2021
MAJ : 21 mai 2024
7 commentaires
photo, Isabelle Adjani

Il a traumatisé Adjani et des générations de spectateurs. Le chef-d'oeuvre de la Body Horror a marqué plusieurs générations. Pourquoi Possession nous possède ?  Certains films marquent leur époque et leurs spectateurs si puissamment que plusieurs décennies après leur sortie, malgré leur statut d’œuvres cultes ou de classiques instantanés, ils conservent une aura de mystère presque vénéneuse. C’est le cas de Possession, perçu encore aujourd’hui comme la création la plus éclatante d’Andrzej Zulawski, toujours nimbée dans une légende qui tient autant à sa genèse torturée qu’à l’impact ravageur qu’il conserve sur le public.    Une édition tentaculaire, éditée par Le Chat qui fume   OÙ NAISSENT LES MONSTRES  Les tenants de l’orthodoxie libérale prédisaient, suite à la chute du Mur de Berlin, la “fin de l’Histoire”, ou l’avènement d’un monde apaisé, débarrassé de l’opposition qui le structura au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Ne leur en déplaisent, c’est plutôt le mouvement inverse auquel on a assisté. Plus de trois décennies après les évènements de 1989, c’est plutôt la deuxième moitié du XXe siècle que l’Europe est en passe d’oublier, le souvenir d’un continent coupé en deux, et les déchirements qui l’accompagnèrent.  La carrière et la vie de Zulawski en témoignent, à un point tel qu’il aura cristallisé ces thématiques dans Possession, récit d’une engeance monstrueuse et de l’horreur jaillie d’une époque, d’un territoire. Mais pour aborder la gestation du monstre, il faut remonter un peu en amont. Le cinéaste entretient des relations houleuses avec les autorités soviétiques polonaises. La Troisième partie de la nuit lui a rapporté de nombreux prix internationaux et la reconnaissance d’un nouveau cinéma polonais, avant que Le Diable ne lui vaille de se retrouver en froid avec la censure locale, qui l’interdit purement et simplement.    Une séquence presque insoutenable   Il se réfugie en France pour tourner L’important c’est d’aimer. Grâce au succès du film, il peut revenir en Pologne, et se lance en 1974 dans la concrétisation de son rêve de toujours. Il souhaite porter à l’écran la fresque de science-fiction imaginée par son grand-oncle, et intitulée La Trilogie Lunaire, qui devient pour le cinéma Le Globe d'argent.  Il tourne 10 mois, en Pologne, en Crimée, au cœur du Caucase, mais aussi dans le désert de Gobi, à 9 jours de la fin des prises de vue, le ministère de la culture voit dans le long-métrage une allégorie évidente de la lutte des Polonais contre le totalitarisme. Le gouvernement interrompt la production et saisit la pellicule, interdisant au réalisateur d’achever sa grande œuvre. Il revient alors en France.  Andrzej Zulawski revient en France, révolté. Pour le metteur en scène, et comme le relèveront de très nombreux journalistes ou historiens, le régime soviétique devient alors le sein où naissent les monstres, l’entité tentaculaire qui défigure l’Europe et dont il racontera comment elle préside à la mutilation d’une culture. C...

Ce contenu est réservé aux abonnés

Rédacteurs :
Tout savoir sur Possession
Abonnez-vous à notre youtube
Pictogramme étoile pour les abonnés aux contenus premium de EcranLarge Vous n'êtes pas d'accord avec nous ? Raison de plus pour vous abonner !
Soutenir la liberté critique
Vous aimerez aussi
Commentaires
7 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
sylvinception

De l’hystérie au ridicule, il n’y a qu’un pas, que Zulawski franchissait ici les doigts dans le nez, bien aidée par une Adjani en mode « recherche Cesar désepérément ».

Exaspérant au possible, et ridicule, à défaut d’être terrifiant.

Ikea

J’adore ce film, un classique personnel. Pour moi, on retrouve l’essence du body horror, une réflexion sur l’altérité sous diverses formes qui va ici jusqu’à « l’autre en soi ». Très riche en réflexion derrière l’hystérie des sens que l’on subit quand on le regarde (un film épuisant, vraiment). Le black metal industriel a son film, et c’est « Possession » ! 🙂

Bubble Ghost

Je ne sais pas ce qu’il fume ce chat, mais je suis sur que c’est toujours de la bonne ^^

Nico

Encore une pépite édité par le Chat qui fume!

Simon Riaux

@Karev

Pas vraiment, il y a plutôt fort à parier que comme Mad Movies, EL suit l’actualité des sorties vidéo, et donc de la restauration qui arrive chez Le Chat qui Fume.

Dommage que vous ne soyez pas abonné, vous auriez pu lire qu’on a notamment réalisé cet article grâce à l’excellent livre de François Cau (excellent confrère, qui écrit aussi pour Mad d’ailleurs), qu’on a bien reçu.

Karev

ah, Ecran Large vient de recevoir le dernier Mad Movies.

dahomey

très bon article , merci !