Soleil de Plomb : Critique lumineuse

Jacques-Henry Poucave | 30 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Jacques-Henry Poucave | 30 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Primé à Cannes mais un peu trop vite oublié depuis, Soleil de Plomb sort le 30 mars dans les salles françaises. Retour sur le dernier petit bijou de Dalibor Matanic.

 

Souvenir souvenir

Etalé sur trois décennies, le récit de Dalibor Matanic réunit trois nations, Croatie, Serbie, Slovénie. Trois pays, autant de peuples, au cœur du conflit qui ensanglanta les Balkans et déchira l’Europe à la fin du XXème siècle. L’intrigue suit trois générations, trois couples, toujours interprété par le même duo de comédiens. Mise en scène atmosphérique, maturité du discours, comédiens lumineux… Soleil de Plomb séduit autant qu’il impressionne.

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Sans jamais adresser la question de la guerre et des massacres frontalement, le métrage parvient à toucher à l’universel, en auscultant les démons de différentes familles ou groupes sociaux. On assiste ainsi à deux topographies jumelles, celle de l’amour, celle de la haine, et comme d’une génération à l’autre, s’avancent leurs pions, s’incarnent leurs enjeux.

Ce pas de deux, tantôt funèbre, tantôt aveuglant, a valu à Soleil de Plomb le Prix du Jury de la sélection Un Certain Regard. Sélection exigeante, voire auteuriste, cette dernière ne jouit pas toujours de la même exposition médiatique que la compétition officielle ou du même pro-rata de flash sur son tapis rouge. Néanmoins, ses lauréats sont rarement oubliés pour autant.

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SILENCE DE PLOMB

On se demande ainsi si le relatif silence autour de l’excellent Soleil de Plomb ne provient pas de notre rapport compliqué à sa toile de fond. En effet, on oublie souvent que la guerre des Balkans aura été une des plus terribles tâches à assombrir la conscience de l’Europe depuis la Seconde Guerre Mondiale. Démonstration implacable et grotesque de l’impuissance européenne, le conflit dit du Kosovo fut l’occasion pour tous les défenseurs de l’idéal Européen de constater qu’ils n’étaient toujours pas en mesure d’empêcher chez eux la résurgence de la barbarie.

Le film en devient ainsi d'autant plus important que comme ne l'indique pas son titre, la lumière qui le nimbe éclaire plus qu'elle n'écrase. Car Soleil de Plomb se veut aussi un film guérisseur, qui en dévoilant les maux, en identifiant les tensions, nous met face à la néessité de les dépasser. Loin de tout moralisme facile et souvent d'une belle finesse, le film de Dalibor Matanic provoque, malgré sa grande tension, l agravité des faits qu'il relate, une forme de soulagement nécessaire et intense.

Résumé

Etouffant, dur, lucide, le film Dalibor Matanic se mue finalement en une fable lumineuse et nécessaire.

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commentaires
drocmerej
30/03/2016 à 22:24

Jolie critique qui donne vraiment envie. Il est d'autant plus facile d'avoir oublié ce film depuis Cannes qu'on en est déjà à l'édition suivante (enfin presque). Etonnant qu'il n'ait pas bénéficié d'une sortie plus tôt.

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