Critique : Hijacking

Sandy Gillet | 9 juillet 2013
Sandy Gillet | 9 juillet 2013

Avant Greengrass et son Tom Hanks de Captain Phillips qui promet, si l'on se réfère à la bande-annonce, de respecter bourrinement les codes hollywoodiens du thriller, il y a donc ce Hijacking venu du nord de l'Europe. Du Danemark précisément d'où le réal est originaire et dont a pu repérer pour préparer ce papier qu'il a été le scénariste de La chasse de Thomas Vinterberg, ce qui en soit pose déjà le personnage. Hijacking est le deuxième long de Tobias Lindholm (le premier reste inédit chez nous) qui outre la maîtrise évidente qu'il porte à son histoire propose un « cinéma vérité » débarrassé des scories du Dogme qui ont empoisonné le cinéma nordique et danois depuis bien trop longtemps.

À l'écran cela donne un film navigant habilement entre réalisme documentaire (tournage au large du Kenya sur un navire ayant déjà été attaqué par des pirates, acteurs pour la plupart non-professionnels, mise en scène au plus près des personnages avec un point de vue omniscient...) et métrage de fiction voulant mettre en lumière une forme de banditisme finalement peu médiatisée. Le tout s'appuie sur un scénario haletant et anxiogène ainsi que sur deux acteurs principaux à la violence de jeu que l'on ne trouve que dans cet hémisphère du cinéma. Idem du côté de la mise en scène qui pourtant loin de faire dans l'esbroufe, arrive à rendre compte de la violence létale de cette prise d'otage par des somaliens en rut, de manière éprouvante pour les sens du spectateur pris littéralement à la gorge sans aucune possibilité de souffler. Le film se répondant tel deux jeux de miroirs sans fin entre la situation des otages de plus en plus désespérée et la lente descente aux enfers émotionnelle du PDG de la boîte propriétaire du bateau qui se doit de négocier pied à pied le montant de la rançon.

Glaçant, implacable, Hijacking ne se prive pas non plus de dénoncer en creux cette nouvelle donne mondiale qui laisse sur le carreau des hommes pions, otages ou somaliens, à la merci de courants méchamment destructeurs. C'est d'ailleurs peut-être le seul point faible du film. Donner corps in fine à un désespoir, à une déshérence (le cuistot fil rouge de l'histoire) qui s'il « humanise » le propos en enlève aussi de sa portée que l'on aurait voulu plus kafkaïenne. Comme si Tobias Lindholm voulait encore se raccrocher à quelque chose, pas un espoir, mais à un schéma de vie qui peut faire encore sens. On lui laissera avec fougue le bénéfice du doute.

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