Critique : Les Conspirateurs

Nicolas Thys | 2 juillet 2007
Nicolas Thys | 2 juillet 2007

Réalisateur phare du cinéma novo, Joaquim Pedro de Andrade est profondément attaché à la cause du peuple brésilien, à sa culture et à ses conditions de vie. Tourné en 1972, en pleine dictature militaire, Les Conspirateurs est un véritable hymne au Brésil depuis le générique où se fait entendre la chanson Brasil à l'ultime séquence, panaché d'images d'archives, de viande avariée et de mort promise en relatant la couardise de certains révolutionnaires délateurs vers la fin du 18eme siècle alors que l'indépendance du pays approchait.

Mais ce film n'est en fait qu'un miroir de la situation politique des années 1970. Face à un régime totalitaire qui prive les artistes de tout discours et le peuple de toute action et de son histoire réelle, le cinéaste tente de se frayer un chemin en dénonçant la passivité d'intellectuels couards qui se débinent au moindre problème, en montrant aux brésiliens asservis que l'insurrection est possible. Si les héros finissent pendus et martyrs, la faute en revient à ceux là qui ont peur de ce qui finira par arriver tôt ou tard : la mort.

L'exercice de mise en scène particulièrement intelligent à laquelle se livre le réalisateur va également dans ce sens. La profondeur de champ et le dépouillement de certains espaces clos insistent à la fois sur la puissance des chefs et sur leur solitude ; et face à eux, quelques poètes ou intellectuels, cloisonnés dans des lieux claustrophobes, prisonniers de leurs peurs égoïstes et incapables de s'unir. L'aspect théâtral de certaines tirades et la multiplication des regards caméra ne fait qu'intensifier l'identification des spectateurs à une lâcheté toujours à l'œuvre dans ces années sombres.

Œuvre politique importante, parfois un peu trop abstraite, et inspirée par des faits historiques et des poèmes écrits à cette même époque, Les Conspirateurs ne s'adresse pas qu'à une population à une période donnée mais propose aussi une réflexion forte sur l'idéal révolutionnaire, la liberté et l'art, et a pour cela vocation universelle.

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