Loup-garou de Londres (Le) Critique : Le Loup-garou de Londres

Flavien Bellevue | 31 octobre 2006 - MAJ : 27/09/2023 11:20
Flavien Bellevue | 31 octobre 2006 - MAJ : 27/09/2023 11:20

Revisiter un mythe s'avère être souvent un exercice périlleux dans le monde du cinéma. À l'heure où tout est à mettre au goût du jour pour un plus grand spectacle, le choix devient habituellement plus lucratif qu'artistique. Pourtant lorsque John Landis sort en 1981, Le Loup-garou de Londres, la critique ne voit à moitié le dépoussiérage original du mythe du loup-garou qui en demandait autant. Un mythe qui allait déjà renaître la même année d'un condisciple de Landis du cinéma d'horreur, Joe Dante, avec Hurlements.

De mémoire, le mythe du loup-garou n'avait marqué le cinéma qu'avec Le Loup-garou (1941) de George Waggner avec Lon Chaney Jr. dans le rôle-titre, Claude Rains et Bela Lugosi. Entre temps et malgré une amusante rencontre entre Frankenstein et le monstre lycanthrope (film de Roy William Neill datant de 1943), le jeune John Landis alors cascadeur en Yougoslavie sur le tournage de De l'or pour les braves (1970), rêve de pouvoir redonner vie à une icône du cinéma fantastique et d'horreur grâce à des techniques modernes. Par là, il faut bien sûr comprendre des effets spéciaux et des maquillages des plus convaincants. Le rêve devient quasi réalité avec la rencontre déterminante du maquilleur Rick Baker avec qui Landis signe en 1973, un pseudo hommage à King Kong, Schlock. Leurs chemins se séparent quelques années où Baker allait gagner ses galons d'artiste sur la saga « space opéra » la plus illustre de tous les temps, Star Wars tandis que Landis signait trois comédies à succès dont une musicale : Hamburger film sandwich (1977), Animal house (1978) et Les Blues brothers (1980).

 

 

 

Après des années soixante dix mouvementées par des films d'horreur et gore de plus en plus impressionnants, un film formellement « sérieux » et dans le respect du genre était une évidence. Pourtant, au delà du souci technique, John Landis décide de revisiter le mythe du loup-garou en employant son talent pour la comédie pour le marier à l'horreur et au drame. Dès les premières images, son goût pour la musique et le cinéma bis et d'horreur vont l'aider à installer l'ambiance de son film. Sur l'air du Bad moon Rising des Creedence Clearwater Revival, deux jeunes américains débarquent dans une campagne anglaise digne de celle du Chien des Baskerville de Conan Doyle où la bête sévit dans la lande. Malgré une attaque nocturne sanglante, l'ambiance est trompeuse puisque le reste de l'action va se poursuivre dans un lieu en rupture avec le genre, la ville.

 

 

 

Londres sera donc le théâtre de l'horreur et du comique où le jeune David Kessler se métamorphose petit à petit (des visions cauchemardesques à la transformation physique, véritable métaphore de la puberté) pour céder à la pulsion animale qui l'anime. Le film bascule allègrement entre les deux genres opposés (de l'effroyable transformation de David à son évasion nu d'un zoo) pour offrir une vision originale du mythe où l'expression « l'homme est un loup pour l'homme » du philosophe anglais Thomas Hobbes est appliquée au sens propre. Cette vision permet également à Landis de dresser un portrait de la ville peu banal. Sous la caméra du réalisateur américain, la capitale anglaise fait surgir l'horreur dans des lieux communs (hôpital, métro), perd ses cinémas de films d'horreur pour le porno, dévoile des punks plutôt romantiques tandis que les hurlements du loup-garou ne sont que des cris de hooligans pour quelques oreilles bourgeoises….

 

 

 

La pointe d'humour, véritable sceau du cinéma de John Landis, insérée au film permet aussi de dédramatiser la peur pour mieux s'y préparer. Après avoir perdu son ami Jack, David va être hanté par ce dernier à différents stades de décompositions et cela, sans une lourde armada de violons que le compositeur Elmer Bernstein se passe intelligemment. Véritable ingrédient dramatique du film, la romance de plus en plus difficile entre David et Alex Price ajoute au mythe du loup-garou celui de la belle et la bête grâce à un final touchant. Résolument Le Loup-garou de Londres est une œuvre horrifi-comique gore originale qui n'a toujours pas trouvé de successeur à sa hauteur malgré le récent remake Le Loup-garou de Paris (1997) ; à moins qu'il ne fasse se tourner vers le cultissime clip vidéo Thriller où la majeure partie de l'équipe du Loup-garou de Londres s'était donnée rendez-vous. Vingt cinq ans après sa sortie, le loup-garou londonien n'a pas fini d'hurler….

 

 

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