Critique : Somers town

Thomas Messias | 28 juillet 2009
Thomas Messias | 28 juillet 2009

Les précédentes oeuvres de Shane Meadows étaient, disons-le, assez peu guillerettes. This is England livrait un bilan totalement dépressif de l'état de la jeunesse britannique. Avant cela, le brillant 24 heures sur 24 détruisait, en noir et blanc, les espoirs du manager d'une salle de boxe. On voyait donc arriver gros comme une maison un Somers town de nouveau en noir et blanc, de nouveau avec Thomas Turgoose (le héros de This is England) : encore un film bien plombant qui fera de l'Angleterre le théâtre d'une énième tragédie sociale. C'est l'histoire de la rencontre entre deux ados : l'un fraîchement sorti de son foyer d'accueil et propulsé seul et sans abri dans un Londres redoutable, l'autre fils d'un immigré polonais alcoolo qui ne trouve refuge que dans la photo. Attention, révélation stupéfiante : Somers town est un film léger, en partie optimiste, loin en tout cas de semer la sinistrose autour de lui. Le film est en fait une simple promenade dans les rues de Londres, et fonctionne selon un schéma inverse par rapport aux précédents films de Meadows et à la majorité des films sociaux.


Tout commence en effet par la même grisaille que d'habitude : Tommo se fait battre comme plâtre, Marek souffre du penchant de son père pour la boisson. Pendant une petite heure, le film tâchera tant bien que mal de faire naître un véritable espoir, ou de trouver en tout cas un refuge de choix dans une amitié en devenir. Tombés l'un sur l'autre par hasard, Marek et Tommo ne vont plus se quitter, vivant une relation de pure amitié qui ne s'encombre pas de jugements ou de complications inutiles. On jubile de voir Meadows traiter en mode comédie des thèmes et situations qui ont donné tant de drames poisseux : ni l'amour partagé par les deux héros pour une jolie serveuse, ni la totale beuverie qu'ils s'offrent un soir de blues ne finiront mal. Le film n'est pas exempt d'une certaine mélancolie, accentuée par l'utilisation magnifique du noir et blanc, mais c'est une mélancolie qui réchauffe le coeur et l'esprit.


Par petites touches, le scénario approfondit peu à peu les personnages de Marek et Tommo, riant d'eux et riant avec eux. Leurs quelques mésaventures - dont un vol de fringues assez mal ciblé - font d'eux des pieds nickelés particulièrement attachants, d'autant que les interprètes sont absolument magnifiques. De film en film, Thomas Turgoose et sa gueule de sale gosse ne cessent d'épater ; quand à Ireneusz Czop, il est une révélation discrète mais poignante, idéal dans la peau du grand dadais mal dans ses baskets. Pour soigner son petit moral, Marek fait de la photographie, saisit quelques instants au hasard et s'accroche à cet art pour lequel il semble plutôt doué ; impossible de ne pas y voir le double d'un cinéaste qui casse sa routine de cinéma-déprime et livre une bal(l)ade surprenante et délicieuse, qui s'ancrera pour longtemps en chacun de nous.

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