Le Drôle de Noël de Scrooge : Critique

Ilan Ferry | 13 novembre 2009
Ilan Ferry | 13 novembre 2009

De par sa portée universelle, Le Chant de Noël de Charles Dickens reste certainement l'un des récits les plus populaires et fédérateurs de la littérature anglo-saxonne, ainsi que le parfait étendard des valeurs véhiculées par les fêtes de fin d'année. 

Cuisiné à toutes les sauces (on pense notamment au sympathique Fantômes en fête de Richard Donner dans lequel Scrooge était un producteur TV interprété par l'impeccable Bill Murray, ou encore le très récent Hanté par ses ex), le roman de Dickens revient sous la houlette de Disney vers un plus grand classicisme avec ce Drôle de Noël à l'atypisme purement visuel. Déjà responsable de deux excellentes adaptations : Le Noël de Mickey en 1983 et Noël chez les Muppets en 1992, la firme de Walt était parvenue par ces entremises à trouver le dosage parfait entre son univers et celui inventé par l'auteur de David Copperfield. Respectivement « incarné » par Picsou (une manière de boucler la boucle quand on sait que Carl Barks s'était inspiré de Scrooge pour créer le célèbre oncle de Donald) et Michael Caine, l'irascible vieillard revient ici sous les traits hautement expressifs de Jim Carrey.

 

 

C'est en effet du coté des personnages et de leur traitement visuel que se situent les principales qualités du film. En optant de nouveau pour la "performance capture", Robert Zemeckis creuse un peu plus un sillon commencé en 2004 avec Le Pôle express et ayant trouvé son point d'orgue avec l'épique La Légende de Beowulf. Et si d'aucun trouveront que les regards de Scrooge et consorts ont gagné en intensité comparativement à Beowulf, il faut bien reconnaître que ceux-ci demeurent un poil trop mort, surtout par rapport aux productions Pixar ou de ce qu'augure Avatar. Cela étant, il serait dommage de faire la fine bouche tant le travail effectué ici par le papa de Roger Rabbit, via sa boite ImageMovers Digital, relève véritablement du tour de force visuel non seulement dans la  reconstitution des décors, mais surtout dans la modélisation des protagonistes. Ainsi, outre un Jim Carrey aux multiples faciès (le monsieur interprète pas moins de huit personnages, dont les esprits des Noëls passés présents) on reconnaîtra aisément ces bonnes vieilles trognes de Bob Hoskins, Gary Oldman ou encore Colin Firth dans des rôles multiples qui semblent leur aller comme des gants. Autant de performances qui font partiellement oublier l'aspect cireux et désincarné des « figurants ».

 

 

Toutefois, la grande force de ce drôle de Noël est aussi sa pire faiblesse : trop occupé à vouloir livrer une version techniquement innovante, Zemeckis passe à coté de ce qui faisait la substance du roman de Dickens, en le traduisant de la manière la plus littérale possible par le truchement de l'image de synthèse. Trop appliqué, le réalisateur se perd dans sa recherche de la perfection numérique et oublie l'émotion, moteur même de ce conte initiatique. Laissé quasiment à l'abandon sur l'autel du perfectionnisme zemeckien, le spectateur se surprend alors à se foutre royalement du sort de Scrooge ou du petit Tim, une première dans la longue histoire des adaptations d'Un chant de Noël. Pour résumer on pourrait dire que Zemeckis est à Un chant de Noël ce que Polanski était à Oliver Twist : un adaptateur fidèle, mais trop académique et sage dans son approche. Un difficile constat pour le public adulte, mais bien plus facile à avaler pour les enfants qui, en bons optimistes qu'ils sont, y verront certainement une agréable friandise de Noël, lisse dans tous les sens du terme, mais qui, boostée par la 3D, devient un sympathique tour de montagnes russes avec ce qu'il faut de « péripéties » pour a la fois les amuser et les effrayer. Vu sous cet angle, Le Drôle de Noël de Scrooge fait office de pari plutôt réussi, à condition de faire comme nos chères têtes blondes, en le réduisant à « l'histoire d'un monsieur qui est méchant au début et devient gentil à la fin ».

 

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