Shazam! : la série kitsch et niaise sur le super-héros DC que vous ne connaissez pas

Lucas Jacqui | 27 mars 2023 - MAJ : 27/03/2023 10:48
Lucas Jacqui | 27 mars 2023 - MAJ : 27/03/2023 10:48

En 1974, avant les films Shazam! de Warner Bros., il y a eu une série oubliée de tous à la naïveté exaspérante et aux effets spéciaux dépassés.

Avant que Zachary Levi ne soit Shazam pour le cinéma dans le très ordinaire Shazam!, et Shazam! La Rage des Dieux, le héros de DC (et anciennement propriété de Fawcett Comics) est passé par la télévision. D'abord, Captain Marvel – son nom avant 2012 – a débuté à l'écran en 1941 dans un sériel en noir et blanc. Puis, de 1974 à 1976, le Superman de rouge et blanc fut le héros d'une nouvelle série de trois saisons, Shazam!., destinée à un jeune public.

Et si vous n'en avez jamais entendu parler, c'est normal, car en France, le programme est inédit. À l'époque de sa diffusion, il a émerveillé les petits Américains. Mais avec un regard moderne, Shazam! incarne un esprit candide presque agaçant, le tout dans une mise en scène d'un autre âge. Ainsi, parce que Shazam 2 arrive au cinéma, on a voulu déterrer cette série inoffensivement nanardesque, dont le lien avec le personnage s'arrête à son nom et son costume.

 

 

Résumé express

L'adolescent Billy Batson (incarné par un Michael Gray âgé de 23 ans) est capable de se transformer en un super-héros, le magnifique et rayonnant Captain Marvel, une fois qu'il prononce le mot magique Shazam. À l’aide de ce pouvoir, et accompagné d’un vieux monsieur nommé Mentor (Les Tremayne), il va voyager dans un camping-car portant son logo (pour l'anonymat, on repassera) pour aider les gens dans le besoin.

Ses missions sont multiples et tout aussi peu excitantes les unes que les autres compte tenu de ses capacités (vol, superforce, supervitesse, etc.). En effet, Captain Marvel va sauver des enfants, généralement, de leurs bêtises ou de la méchanceté des autres. Au cours de ses aventures, il n’y a pas un moyen de locomotion que le héros n’a pas poursuivi et stoppé à mains nues. Que ce soit un avion, une voiture, un hélicoptère, un cheval ou une montgolfière, rien ne le stoppe, sauf l’arrêt de sa série.

 

Shazam! : photo, Jackson BostwickUn toréador en pyjama

 

super-économe

Produite par Filmnation, la série est la première en prises de vues réelles du studio, qui est initialement spécialisé dans l’animation. Mais ce coup d'essai va tout de même porter ses fruits durant trois saisons, la première de quinze épisodes, les deux autres de sept et de six, chacun durant environ 30 minutes.

Avec un budget de 70 000 dollars par épisode et des trucages rudimentaires, Shazam! a énormément subi les outrages du temps. Aussi, les scènes de vol et de démonstration de pouvoirs du Cap' sont évidemment risibles avec notre regard moderne. Et il est difficile de ne pas rire à la vue des fermetures éclair sur le costume de Shazam. Mais la palme du kitsch revient aux séquences de rencontres entre Billy et les Anciens. En effet, ces scènes sont en animation (sauf pour l'enfant) complètement figée, en plus d'être couvertes de lumières éblouissantes dans le but probable d'hypnotiser le spectateur. Surtout, elles viennent interroger sur la sobriété de l'adolescent vivant avec un vieux dans un van.

 

Shazam! : photoT'es pas net Billy

 

Toujours est-il que Jackson Bostwick, interprète du héros durant une saison, s'est impliqué de tout son corps puisqu'il faisait ses cascades lui-même et sans sécurité. Cela donne une autre perspective aux scènes où il tient un avion monomoteur sur le point de décoller par l'aileron arrière, ou qu'il se tient debout sur un camping-car lancé à pleine vitesse.

Justement, c'est à cause d'une de ses cascades que Jackson Bostwick est remplacé durant la saison 2. Après une séquence périlleuse, l'acteur se blesse et ne se rend pas au tournage le lendemain matin. Pour l'équipe de production, ça ne fait aucun doute, Bostwick veut faire pression pour augmenter son salaire. Ainsi, John Davey est engagé pour enfiler le costume moule-noix de Captain Marvel.

Heureusement, Jackson Bostwick obtient un dédommagement de la part de Filmnation après un procès gagné, comme il le raconte souvent en interview, notamment pour Comicbook en 2008. En revanche, ce changement de casting va impacter l'image de la série puisque les deux comédiens jouent des partitions très différentes, Bostwick étant bien plus solaire que son successeur.

 

Shazam! : photo, John DaveyLe second (moins bon) Shazam
 

shazam de loin

Les adaptations de comics se laissent souvent aller à la réinterprétation, on en avait déjà parlé avec la série L'Incroyable Hulk, mais on peut aussi citer le Punisher de Dolph Lundgren, ou la Catwoman de Halle Berry. Pour Shazam!, les liens avec la BD s'arrêtent dès les prémices puisque le super-héros n'est pas présenté comme une entité à part entière, mais l’incarnation magique du pouvoir des Anciens. Ainsi, cette force mystique donnée par les héros antiques forme Shazam, qui apparaît quand Billy Batson prononce son nom. En ça, c’est une grande différence vis-à-vis des comics puisqu’à l'origine Shazam est un vieux magicien qui transmet ses dons à Billy.

De plus, contrairement aux films Shazam! qui ont décidé de joindre à Billy Batson un acolyte du même âge, la série préfère lui mettre dans les pattes un vieillard nommé Mentor. Et ce personnage, en plus d'être inventé pour la série, ne voit jamais son histoire, son origine ou son but expliqué. À la manière de Tenet avec son héros nommé Protagoniste, la fonction de Mentor se résume à son nom. De toute façon, le pépé a le temps de mourir d'ennui puisque Billy ne croise jamais Black Adam, ni même aucun ennemi des comics, seulement quelques criminels un peu patibulaires.

 

Shazam! : photo, Michael Gray, Les TremayneGandalf et Frodon au Starbucks

 

Lors de la diffusion de Shazam!, un autre programme est créé spécialement pour l’accompagner, The Secrets of Isis. Celui-ci raconte l’histoire d’une enseignante capable de se transformer en déesse égyptienne, et est même la première série à mettre en scène une super-héroïne féminineWonder Woman sort l’année d’après. Ainsi, les deux surhumains se croiseront dans quelques épisodes crossovers, Isis prend de fait la place d’une Mary Marvel absente (et dont la présence aurait pourtant fait sens). Alors que les films récents introduisent la famille Marvel, la série n'exploite absolument pas la mythologie du personnage et le résume à un pompier en collant.

Surtout, Shazam! éclabousse d’une candeur presque exaspérante pour les plus aigris. Et cet esprit de bisounours gavé de sucre s’incarne encore plus dans les scènes finales de chaque épisode lorsque Captain Marvel ou Billy balance une petite leçon de vie ingénue à faire souffler du nez. L’intention du programme de viser un jeune public est ici plus qu'évidente, en plus de terminer de lui donner cette image simplette démodée. Par là, on peut y voir une façon assez abrupte et peu subtile de mettre en image le cœur et la bonté naturelle de Captain Marvel.

 

Shazam! : photo, JoAnna Cameron, John DaveyVivement Shazam into the Multiverse pour les revoir

 

Après Shazam!, une série d’animation d’une saison produite aussi par Filmnation va sortir. Puis, en 1979, un autre acteur va incarner Shazam dans une certaine vision de l’enfer, Legends of the Superheroes, un genre de Star Wars Holiday Special sauce DC. Pour la première fois, et peut-être unique fois, plusieurs héros de l'éditeur sont réunis à l'écran, tels que Green Lantern, Flash, Huntress, Black Canary et bien d'autres. Et c’est aussi cauchemardesque que vous l’imaginez.

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