Juste Cause - Saison 1

Zorg | 6 septembre 2006
Zorg | 6 septembre 2006

Une jeune et jolie assistante du procureur, fraîchement sortie de la maternité, de vilains crimes tous plus tragiques et sauvages les uns que les autres, et le charme policé des banlieues américaines, les fameuses suburbs, voilà les trois principaux ingrédients de la recette Juste Cause, drame légal sorti des usines Bruckheimer qui débarque aujourd'hui dans nos contrées.


Annabeth Chase (habilement transformée en Annabelle Chase pour la diffusion sur TF1), traque donc entre deux biberons le criminel au cœur, non pas de nos campagnes, mais des banlieues cossues de l'agglomération d'Indianapolis. Car oui, mesdames et messieurs, le crime est partout, surtout là où l'on espère ne pas l'y voir. Découvrir le nom du voisin d'en face dans la rubrique des faits divers, à la sous-section crimes passionnels, fait terriblement négligé, particulièrement dans les milieux bien-pensants de la célèbre « Bible Belt ». Le choix du décor est à ce titre loin d'être anodin. En optant pour Indianapolis, les auteurs mettent volontairement l'accent sur un discours plutôt conservateur qui sied particulièrement au Sud des États-Unis.


Juste Cause ne serait pas un show si désagréable s'il ne se prenait pas si désespérément au sérieux. Même si l'on retrouve cette constante dans de nombreux drames de prétoires qui allient souvent misérabilisme social et intransigeance judiciaire comme le premier politicard venu prêt à toutes les bassesses démagogiques pour se faire élire, Juste Cause dégage cependant un parfum plus moralisateur que ses confrères. La faute à des personnages tous plus droits dans leurs bottes les uns que les autres, qui ne font pas nécessairement dans la dentelle pour s'assurer que justice soit faite.


On pourrait cependant transiger en arguant du fait que le show n'est peut-être pas si manichéen qu'il peut en avoir l'air. Un peu à l'instar d'un Desperate Housewives qui se serait débarrassé de ses oripeaux de soap-opéra comique, il prétend égratigner le vernis de la classe aisée qui vit tranquillement dans son coin d'Amérique profonde et à qui jamais rien de grave n'arrive. Cette fausse lucidité sur les tristes réalités de la nature humaine est cependant bien vite contrebalancée par l'extrême vertu et la noble droiture de son personnage principal, Annabeth. Celle-ci trouve bien sûr dans les gazouillis innocents d'un nourrisson, et en la présence d'un époux aimant compréhensif, et travaillant comme de juste dans le milieu du BTP, même si complètement accessoire dans le show, le réconfort et la force nécessaires pour continuer son sacerdoce judiciaire. Le spectateur peut alors s'endormir sur ses deux oreilles, rassuré de savoir que la Justice veille au grain.


Tout n'est cependant pas complètement noir au pays de l'oncle Sam. Comme c'est souvent le cas si les personnages principaux sont lisses comme un bille de billard, il faut se tourner du côté des personnages secondaires pour vraiment trouver quelque chose d'intéressant à se mettre sous la dent. La seule vraie lumière dans ce marasme thématique et idéologique vient donc du toujours impeccable Bruce Davison. Celui qui fut le Sénateur Kelly dans les deux premiers X-Men trouve ici un rôle récurrent d'avocat de la défense ambigu et retors que n'aurait pas renié un James Woods au meilleur de sa forme. Pas aussi méchant que son apparence mi-ange mi-démon le suggère, c'est le seul personnage ouvertement anti-manichéen que l'on croise régulièrement, le seul personnage qui ait une vraie épaisseur, une vraie ambiguïté. On regretta juste qu'il n'apparaisse pas plus de quatre ou cinq fois sur le cours de toute la saison.


Juste Cause est donc une chronique moralisatrice des drames domestiques que Monsieur le Maire (ou Monsieur le District Attorney) souhaiterait cacher car il n'aime pas que ses administrés règlent leurs différents conjugaux à coups de hachoir à viande ou de couteaux de cuisine, mais qui font irrémédiablement surface comme une crise d'herpès sur le visage de Miss France. Les intentions des auteurs sont au mieux maladroites, au pire douteuses, et le fait que l'ensemble soit intégralement écrit et joué premier degré ne laisse guère planer de doute sur la culpabilité du suspect. L'ensemble est sans saveur, sans la moindre aspérité à laquelle se raccrocher. C'est un drame procédural ultra formaté, qui correspond parfaitement à l'antenne de CBS sur laquelle il est programmé depuis septembre 2005, mais qui n'apporte strictement rien.

Dès lors, on regrette avec ironie qu'il n'ait pas été possible de traduire le titre original, Close to home, par C'est arrivé près de chez vous, en repensant avec tendresse à Benoît Poelvoorde en train de faire un rappel de barème avant de se lancer dans une partie endiablée de Petit Grégory. Ah, nostalgie, quand tu nous tiens…

Juste Cause, le mercredi soir, à 23h sur TF1.

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