Pokémon : pourquoi la série est un chef-d’œuvre de merde

Aujourd'hui, l'envie de parler de Pokémon nous prend. On revient sur ce phénomène culturel.

En 1997, après les succès de Pocket Monsters Vert, Rouge et Bleu sur Game Boy, le studio fraîchement fondé OLM se charge de créer une série qui se déroule dans l'univers des jeux de Nintendo. À partir de là, Pokémon commence son ascension dans le monde de la pop culture jusqu'à devenir la franchise la plus rentable de l'histoire. Et après deux décennies, l'aventure n'a pas l'air de vouloir s'arrêter.

On revient sur les raisons du succès de la série Pokémon.

"Écran Large parle enfin de nous ! Wouhou !"

C'EST UN RÉCIT D'AVENTURE EXCITANT... MAIS C'EST TOUJOURS PAREIL

Avant d'entrer dans le vif du sujet, rappelons ce qu'est un Nekketsu. Il s'agit d'un style narratif très présent dans les shōnens (mangas pour adolescents) que l'on doit à l'illustre Osamu Tezuka. Le protagoniste, généralement un jeune garçon orphelin, part à l'aventure avec de grandes ambitions. Il se fait des amis en cours de route (certains peuvent être ses adversaires dans un premier temps). Et très souvent, le héros a un rival qu'il devra affronter.

Les mangas et animes les plus populaires comme Dragon Ball, One Piece ou Hunter x Hunter appliquent les règles du Nekketsu, et Pokémon n'y échappe pas. Sacha vit avec sa mère au Bourg Palette. À l'âge de dix ans, il quitte sa ville natale pour devenir Maître Pokémon (objectif qu'il n'atteindra pas avant l'épisode 1078). Et il n'est pas seul, Sacha est en compagnie de Pikachu, le pokémon que le professeur Chen lui a confié.

Naruto recevant Happy, son premier digimon, de la part de Tortue Géniale (colorisé)

Durant les cinq premiers épisodes, Sacha et Pikachu apprennent à s'aimer. Le héros rencontre Ondine, la friendzonée par excellence. Il est attaqué par Jessie & James, les principaux "antagonistes". Il capture ses premiers pokémon et tente de remporter son premier badge d'arène. Pour y parvenir, il doit vaincre Pierre, le champion de l'arène d'Argenta qui devient son meilleur ami à la fin de l'épisode 5.

Après ça, la série se retrouve piégée dans une boucle. Le Pokégroupe va de ville en ville, de région en région, pour faire la tournée des arènes. Ils s'extasient devant chaque nouveau pokémon qu'ils rencontrent, on découvre plein de coutumes différentes, la Team Rocket essaie d'enlever Pikachu, Sacha laisse un de ses compagnons derrière lui, etc. Et il n'en fallait pas plus à nos esprits d'enfants qui s'émerveillaient devant chaque épisode. Les liens entre Sacha et ses pokémon nous touchaient au point de nous faire pleurer lors des départs de Papillusion et Lokhlass... et quand Sacha quitte Dracaufeu sans se retourner.

Tout ça fonctionne très bien malgré tous les défauts évidents. Mais le réel problème est que la fin du premier cycle (les saisons 1 à 5) ne provoque aucun changement. La série ne décide pas de grandir avec son public comme l'ont fait Harry Potter ou Naruto, et elle ne met pas en place de grandes révélations comme One Piece. La Pokémon Company tient à en faire un produit qui s'adressera toujours aux enfants, éternellement, et c'est bien dommage.

Citez un trio d'antagonistes plus iconique, on attend.

SACHA EST UN LOSER... MAIS ON L'AIME QUAND MÊME

Le Pokégroupe est composé d'une jeune fille rousse qui s'énerve contre la bêtise de ses camarades (comme dans One Piece), d'un obsédé (comme dans One Piece), d'un petit animal trognon doublé en japonais par Ikue Ootani (comme dans One Piece), et d'un protagoniste qui n'a aucune raison de recevoir autant d'attention (comme dans Harry Potter et L'Attaque des Titans). Eh oui, la série suit le parcours d'un dresseur un peu nul. Mais d'un autre côté, est-ce qu'on ferait mieux à sa place ?

Il faut avouer que pour un garçon de son âge qui n'a pas d'attribut particulier (il n'a pas de "D" dans son nom, aucun démon ne vit en lui, il ne vient pas d'une planète de super guerriers), il s'en sort plutôt bien. Le petit Sacha se débrouille toujours pour atteindre la phase finale d'une Ligue. Il réussit même à être le vainqueur de la Ligue Orange dans la saison 2, mais il n'obtient pas le titre de Maître pour autant. On l'évoquait plus tôt, Sacha ne s'élève pas au rang de Maître avant la fin de la saison 22. Cette saison, qui adapte très bien les jeux Pokémon Soleil & Lune, fait de Sacha le premier Maître de la région d'Alola.

"J'ai trop bien fait d'échanger ma direction artistique contre le titre de Maître !"

Mais cela n'a jamais été important de voir Sacha gagner. Ce qui compte, c'est de le voir se relever pour continuer l'aventure avec ses compagnons. En effet, l'amitié semble passer avant la victoire et c'est certainement ça qui a rendu Sacha si populaire. Il sait que, peu importe la difficulté des épreuves, peu importe le nombre d'échecs, ses compagnons seront toujours à ses côtés pour l'accompagner jusqu'au bout du parcours. C'est le genre de schéma qu'on observe dans 99% des shōnens, mais la formule de Pokémon semble avoir beaucoup influencé un manga comme My Hero Academia. Et l'amitié compte tellement pour Sacha qu'il a placé toutes les filles de son entourage dans la friendzone. Quel homme.

Et bien sûr, un héros de manga ne serait rien sans son rival. Naruto avait Sasuke, Son Goku avait Vegeta... Sacha avait Régis. Certes, l'anime Pokémon adapte les grandes lignes des premiers jeux, mais il met en place une rivalité et un mépris plutôt crédibles entre les personnages. Chose que les jeux ont du mal à représenter avec des protagonistes muets. C'est alors à la fin du premier cycle, dans les derniers épisodes de la saison 5, autrement appelée La Quête Ultime, que les rivaux et leurs pokémon donnent le meilleur d'eux-mêmes dans un affrontement spectaculaire. Les fans ne furent pas déçus.

La hype de ta jeunesse

Le match tant attendu prend fin, Sacha remporte la victoire contre son némésis. Les deux garçons se voient enfin comme des amis et s'échangent une poignée de main. L'épisode suivant prouve que la victoire contre Régis était le véritable objectif à atteindre, vu que le protagoniste se fait éliminer aux quarts de finale de la Conférence Argentée. Sacha est simplement devenu le meilleur dresseur du Bourg Palette.

Beaucoup de fans ont arrêté la série après les 276 épisodes de ce premier cycle et laissèrent la suite à leurs petits frères et petites sœurs. Et avec du recul, on se demande si les vrais héros n'étaient pas Jessie et James (((et Miaouss))). En grandissant, on s'identifie plus à la Team Rocket qu'à Sacha. Leur vie sentimentale est un mystère, ils sont fauchés, ils échouent à peu près dans tout ce qu'ils entreprennent et ils jouent encore avec des Pokémon à leur âge. Et pourtant, ils sont là, toujours motivés pour nous faire rire. Rendons hommage à ces héros.

Seuls les vrais savent regarder au-delà du quatrième mur

C'EST MOCHE... MAIS C'EST PAS GRAVE

Vous l'avez peut-être remarqué : les animes japonais qui adaptent des jeux vidéo ont tendance à être vite oubliés. Et surtout, ils vont très rarement au-delà d'une saison. C'est même pour ces raisons que Tsunekazu Ishihara, producteur des jeux, ne voyait pas l'intérêt d'adapter la licence sur le petit écran. Pourtant, Pokémon a dépassé les mille-cent épisodes sans forcément être un anime plus beau que les autres adaptations de jeux de son époque. On peut affirmer sans problème que la série doit son succès à son univers, pas à son animation.

Oui, c'est peut-être difficile à entendre pour les nostalgiques, mais Pokémon est loin d'être visuellement à la hauteur de sa concurrence. Rappelons que la série démarre en 1997, soit dix ans après City Hunter et huit ans après Dragon Ball Z. Nous ne dénigrons pas la direction artistique de la série, c'est plutôt un de ses points forts ; on s'attaque à son animation paresseuse et économe qui perdure encore de nos jours. Rien que dans la saison 22 (l'avant-dernière en date), la paresse atteint parfois un niveau très élevé. Même la saison finale de Fairy Tail n'a pas réussi à être aussi flemmarde.

Cherchez un contexte à cette image.

Alors évidemment, chaque saison a son morceau de bravoure qui arrive vers la fin, lorsque Sacha et son équipe participent au tournoi d'une Ligue Pokémon. Mais cela ne rattrape pas le manque d'animation de tous les autres épisodes. L'anime peut au moins se féliciter d'être plus spectaculaire que les jeux, quoique les combats de Pokémon Épée & Bouclier sur Nintendo Switch sont parfois très palpitants et peuvent rivaliser avec les scènes d'action mollassonnes de la série.

En revanche, les longs-métrages sont plutôt plaisants à regarder (sauf ce truc bizarre en 3D). Ils mettent d'ailleurs en scène les plus grands exploits du Pokégroupe. On y rencontre même les Pokémon légendaires qu'on a très rarement l'occasion de voir sur le petit écran. C'est aussi dans ces longs-métrages que les musiques de Shinji MIyazaki sont les plus belles à entendre. Et du côté de la saison 23 qui a débuté en novembre 2019, on revient vers une direction artistique pas trop désagréable - ils feront difficilement plus moches que Pokémon : Soleil et Lune (les saisons 20, 21 et 22).

Quand Sacha et Pikachu disent qu'ils sont chauds pour une saison 24 

Une des principales nouveautés de la saison 23 est que Sacha n'est plus l'unique protagoniste. Il s'allie à un garçon nommé Goh dont le but est de capturer Mew. La relation entre les deux personnages permet de renouveler l'humour de la série, ce qui pourrait peut-être intéresser les fans de la première heure. Dans cette saison, on note surtout l'arrivée du compositeur Yuki Hayashi, connu pour les partitions de Haikyu!! et My Hero Academia. On reconnaît bel et bien son style qui donne envie de dépasser nos limites.

On ne sait pas encore ce que l'avenir réserve à la saga Pokémon, même si on peut supposer que la série télévisée continuera tant que la civilisation existe (donc pendant au moins sept ans). On espère voir un jour le père de Sacha ou bien le grand retour de Giovanni, le chef de la Team Rocket. Mais bon, on a compris que faire plaisir aux fans n'intéresse pas la Pokémon Company, dans l'anime comme dans les jeux.