The Morning Show : que vaut la série médiatique et MeToo Apple TV+ avec Jennifer Aniston et Steve Carell ?

Alexandre Janowiak | 1 novembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Alexandre Janowiak | 1 novembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Apple TV+ est enfin lancée sur le marché de la SVoD pour concurrencer Netflix, Amazon, Hulu, les futurs Disney+ ou HBO Max... Pour son arrivée en ligne, la plateforme de streaming a balancé les premiers épisodes de plusieurs créations originales dont le post-apocalyptique See, l'uchronique For All Mankind et le médiatique The Morning Show.

C'est justement ce dernier qui nous intéresse. On a découvert les trois premiers épisodes et on vous dit ce que vaut ce premier pas dans l'ère du streaming pour Apple TV+.

 

 

ANTENNE DANS 3, 2, 1...

Alex Levy (Jennifer Aniston) est la présentatrice vedette de l'émission matinale américaine The Morning Show de la chaîne UBA basée à New York. Et lorsque son co-présentateur Mitch Kessler (Steve Carell)  se retrouve mêlé à un scandale de harcèlements sexuels, c'est elle qui doit annoncer son licenciement de la chaîne après avoir appris la nouvelle dans la nuit et se retrouve finalement aux commandes de la matinale la plus regardée d'Amérique seule.

Au fin fond de l'Amérique, au même moment, Bradley Jackson (Reese Witherspoon) journaliste tenace, mais fatiguée par sa vie personnelle, se retrouve au coeur d'un buzz médiatique suite à un reportage. Propulsée sur le devant de la scène, elle est conviée au Morning Show d'Alex Levy et pourrait bien voir ses ambitions basculées dans une autre dimension au moment où l'émission matinale doit se reconstruire rapidement pour garder la tête des audiences.

 

Photo Jennifer AnistonLa fin d'un tandem

 

Avec 300 millions de dollars accordés pour ses deux premières saisons (oui la deuxième est déjà commandée), The Morning Show bénéficie d'un budget démentiel avec une moyenne de 15 millions par épisode (dont 4 millions consacrés aux seuls salaires de Reese Witherspoon et Jennifer Aniston soit 2 millions pour chacune par épisode) soit un montant supérieur aux épisodes les plus coûteux de Game of Thrones sur HBO. Visuellement, le show se devait donc d'être à la hauteur de ses ambitions et globalement la série tient son rang.

Évidemment, avec un pitch pareil, la série de Kerry Ehrin se déroule essentiellement au sein des coulisses de la matinale, dans des bureaux, open space et couloirs. En soi, le décor n'est donc pas spectaculaire, mais là où The Morning Show frappe fort, c'est dans sa capacité à donner corps et vie à la moindre parcelle de l'environnement en question. Et lorsqu'elle décide de sortir du building, la série montre d'autant plus son ampleur notamment lors des toutes premières minutes de son premier épisode et le reportage mouvementé de Bradley Jackson.

 

Photo Reese WitherspoonDu terrain au plateau pour Bradley

 

Cette capacité à rendre vivant les dessous de cette matinale, la série la doit énormément à la mise en scène de Mimi Leder (derrière les deux premiers). La talentueuse et expérimentée réalisatrice d'Une femme d'exception et de plusieurs épisodes de The Leftovers (dont son dernier) donne le ton de la série à travers un style très Sorkinien (que reprend David Frankel dans l'épisode 3). Ainsi, pour donner une sensation d'immersion aux spectateurs, sa caméra suit ses personnages dans de longues enfilades de couloirs, passant d'une discussion entre un producteur dépassé et sa présentatrice à une assistante guidant une invitée.

À l'image de l'éminente À la Maison-Blanche, les déplacements des individus présents dans les lieux sont l'occasion d'en apprendre plus sur chacun d'entre eux. Au sein même du média, le temps est précieux et chaque minute glanée donne la possibilité de régler un problème au milieu des millions d'autres qui assaillent cette rédaction en crise.

La série joue d'ailleurs beaucoup sur le temps et son importance décisive, et la narration se déroule - dans une moindre mesure - à une échelle en temps réel. En trois épisodes, seulement quatre jours passent dans The Morning Show, donnant une sensation de surplace dans un premier temps, mais prouvant surtout à quel point les dessous de la matinale sont grouillants et l'ensemble foisonnant et riche

 

photo, The Morning Show Season 1, Jennifer Aniston, Reese WitherspoonUne team qui va faire des étincelles

 

THE CASTING SHOW

En cela, la série Apple TV+ réussit son entrée en matière malgré son rythme très bavard. Il faut dire qu'elle peut compter sur des dialogues bien ciselés et quelques jolies tournures de phrases ("- I'm sorry you're such an asshole - Me Too - I wouldn't use those two words together if I were you"). S'implantant dès son ouverture dans un contexte de scandale sexuel à travers le personnage de Steve CarellThe Morning Show s'intègre évidemment dans la dynamique #MeToo très actuelle.

C'est peut-être ici que la série coince un minimum, car si le récit donne une importance capitale à la place des femmes dans la société (et au sein de la chaîne), elle est particulièrement floue quant aux agissements de Mitch Kessler. Si le personnage est particulièrement mis en retrait, du fait de son éviction médiatique, le personnage est presque pris en pitié dans certaines séquences quand il ne devient pas une valeur morale dans d'autres (une scène de l'épisode 3). À croire que la série épouse l'idée selon laquelle la libération de la parole féminine s'est transformée parfois en chasse aux sorcières opportuniste et intéressée.

De plus, la façon dont la série dépeint ses personnages féminins, particulièrement Alex Levy, laisse un peu à désirer. Si elle est décrite comme un puits de talents, ses actions, elles, semblent prises sans une once de réflexion. Difficile alors de savoir où la série se positionne : Alex Levy est-elle montrée comme une femme nerveuse incapable de se contrôler ou au contraire, une femme qui prend les devants pour ne plus se laisser faire ? Dans les deux cas, ses agissements sont quelque peu incohérents et paraissent plus risqués que pertinents.

 

Photo Jennifer Aniston, Reese WitherspoonJennifer Aniston et Reese Witherspoon parfaites

 

Avec son scénario encore un peu hésitant (voire douteux sur le fond) et sa mise en scène particulièrement léchée, The Morning Show laisse encore planer le doute sur ses véritables intentions et qualités. En revanche, une chose est sûre, son casting cinq étoiles excelle.

Dans la peau d'Alex Levy, Jennifer Aniston offre une des meilleures performances de sa carrière dans la peau de cette présentatrice vedette déboussolée et finalement très seule après l'éviction de son partenaire. Reese Witherspoon, elle, propose une partition qui lui colle à la peau avec Bradley, jeune femme ambitieuse aussi gueularde qu'attachante. Et à leurs côtés, Steve CarellGugu Mbatha-RawMark DuplassBel Powley et Karen Pittman complètent admirablement les coulisses du Morning Show.

Pour autant, en trois épisodes, c'est surtout Billy Crudup, en directeur perfide, et un brin inquiétant, de la chaîne, qui fait la plus forte impression. La volonté de son personnage à jouer adroitement entre le divertissement et les news pour faire exploser les audiences reprend une thématique bien connue des séries sur les médias. Cependant, sa résolution à provoquer des malentendus et des situations incommodes pour booster l'équipe de la matinale présage de moments cocasses, cyniques et alléchants.

Comme quoi, c'est peut-être finalement un bon vieux soap qui nous attend avec The Morning Show. Et à dire vrai, quoi de mieux pour lancer une plateforme et créer l'addiction chez les spectateurs.

The Morning Show arrive sur Apple TV+ ce 1er novembre 2019 à compter de trois épisodes pour son lancement puis d'un épisode par semaine chaque vendredi.

 

Affiche officielle

Tout savoir sur The Morning Show

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commentaires
Miami81
25/03/2020 à 15:16

Au final, une excellent série avec parfois une petite baisse de rythme. Son côté série de luxes lui va très bien. Si l'ensemble du casting est excellent, on peut toutefois donner une mention spéciale à Billy Crudup vraiment épatant.
Sur le fond, après avoir vu la saison entière, on peut dire que la série prend fait et cause contre le harcèlement et la complicité de déni. Ce qui est très bien et sonne juste. Mais ils évitent aussi le côté manichéens de la chose. Le personnage de Mitch n'est pas jeté aux ordures entièrement. Son comportement aussi exécrable soit-il reste nuancé et lui même jusqu'à la fin ne semble pas voir la portée de son acte. Mieux, la scène avec son ami réalisateur distingue les coureurs de jupons profitant de son statut des vrais prédateurs sexuels. Très bonne série

Bradley
27/01/2020 à 11:17

Je trouve votre analyse assez peu poussive. J'ai vu la série et je n'ai pas du tout la même lecture... Je ne crois pas que Mitch soit presque "excuser" dans certains épisodes. Il y a une volonté délibérée de montrer que personne n'est tout noir ou tout blanc dans ces situations que relèvent le mouvement Me Too. Donner vie à ce sentiment ambigu à travers ce personnage, responsable de cela, c'est très bien joué. Comment chacun des protagonistes perçoivent les choses dans ces moments là ? Différemment.
Le personnage de Billy C. et celui de Reese W. mettent en avant la guerre des hypersensibles face à l'esprit formaté et normo-pensants de la société en général. Le courage n'est pas une vertu partagé globalement. C'est scénaristiquement très bien écrit. Je préfère ce parti pris à celui d'Once Upon a Time in Hollywood où je n'en reviens toujours pas que Tarantino est fait le choix de la bien-pensante au travers du personne joué par Brad Pitt par exemple. C'était gentil de venir nous rappeler que les hommes ont toujours le choix, mais je préfère largement ne pas nier le poids de la société, des organisations, des modes de management et autres. En ce sens, cette série est une réussite.

zoom7
04/11/2019 à 08:53

@Satan lateube
Exactement .

Satan LaTeube
02/11/2019 à 11:04

Je vénère Steve Carell, mais je déteste J Aniston, du coup j'hésite à regarder.

Mr.T
01/11/2019 à 18:01

@Mouah... Dégage!!!

Mouah
01/11/2019 à 17:18

Étrange quand même que vous mettiez des critiques élogieuse sur un produit US alors que les US taxent les produits français effet féministes peut être

Grift
01/11/2019 à 13:51

Votre avis est plus positif que ce j'ai lu jusqu'ici.
Tant mieux car ca me redonne un peu d'espoir en cette série. Je vais me faire mon avis en regardant les 1er épisode.