Big Little Lies : la saison 2 est un gros raté, explications en cinq points

Alexandre Janowiak | 4 août 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Alexandre Janowiak | 4 août 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Big Little Lies était sans aucun doute une des plus belles séries de l'année 2017, réalisée d'une main de maître par Jean-Marc Vallée et portée par son casting de rêve.

De façon inattendue, la série a été renouvelée pour une deuxième saison alors qu'elle avait été conçue comme une minisérie. Si l'on se demandait bien ce qu'une saison 2 pouvait apporter à Big Little Lies, on s'est rué sur les sept nouveaux épisodes lors de leur diffusion sur OCS en France en sachant que c'était la réalisatrice Andrea Arnold qui était aux commandes cette fois-ci.

Malheureusement, la qualité de la première saison s'est clairement évaporée (en tout cas, en grande partie) dans cette nouvelle salve d'épisodes. On fait le bilan de cette saison 2 en cinq points qui prouvent qu'elle est beaucoup moins bien que la saison 1.

ATTENTION SPOILERS !

 

 

LE MONTAGE

La première saison était un pur plaisir notamment grâce à sa narration fluide, composée de flashs de souvenirs (marque de fabrique de Jean-Marc Vallée). Avec cette saison 2, les petits flashs mémoriels en guise de flashbacks furtifs sont toujours présents, mais leur apparition ne fonctionne plus forcément. Au-delà, c'est la construction globale du show qui perd tout son sens.

D'abord parce que ce sont souvent les mêmes flashbacks qui reviennent en tête (quasiment chaque épisode commence par la scène du meurtre de la saison précédente) et que la nouvelle saison ne trouve donc jamais vraiment sa propre route, vivant à travers les bribes du passé. La série ayant été probablement charcutée sur les bancs du montage, la construction des épisodes est particulièrement ratée et l'on comprend très vite que des bouts de la saison 1 sont venus compléter (ou remplacer) les rushs inexploités ou supprimés de la saison 2.

Pire : on a souvent l'impression d'assister à un enchaînement de saynètes très indépendantes les unes des autres à cause de l'absence de transition. De nombreuses séquences durent au bas mot 1 minute avant qu'une coupe mène le spectateur à un endroit sans plus d'explications et qui embrouille plus qu'elle n'éclaire sur l'avancée psychologique des héroïnes.

 

Photo Shailene Woodley, Nicole KidmanUne scène qui revient en boucle à l'excès

 

L'INTRIGUE

Avec la révélation du grand final de la saison 1, l'intrigue de cette saison 2 aurait pu être passionnante notamment grâce à l'enquête concernant le meurtre du mari de Celeste.

Malheureusement, cette idée qui aurait permis à la série d'explorer de nouveaux territoires thématiques disparait finalement derrière une multitude de sous-intrigues. Ainsi, on suit les mésaventures financières de Renata (Laura Dern), la reconstruction amoureuse traumatique de Jane (Shailene Woodley) et le couple en perdition de Madeline (Reese Witherspoon) ou la dépression de Bonnie (Zoë Kravitz).

La nouvelle intrigue principale tourne rapidement autour du conflit entre Celeste (Nicole Kidman) et sa belle-mère Mary-Louise (Meryl Streep) sur la garde des enfants. Loin d'être inintéressante, cet affrontement est le plus abouti de cette saison 2 et est plutôt passionnant. Il faut dire que c'est le seul qui jouit d'un temps de présence à l'écran conséquent, lui permettant d'être développé à bon escient. Sauf que rien n'y fait tout de même, l'affaire à l'origine de cette saison 2 disparait très vite du centre des attentions, l'inspectrice n'avance jamais vraiment sur l'enquête et le questionnement de Bonnie sur son acte finit par tourner en rond.

Certes, l'affaire reprend le dessus dans les ultimes secondes de l'épisode 7 et laisse la porte ouverte à une saison 3 tout en refermant sans doute ce chapitre meurtrier avec de possibles confessions. Mais c'est extrêmement pauvre.

 

Photo Nicole Kidman, Meryl StreepHeureusement que Meryl Streep fait un peu bouger les lignes sinon on s'ennuierait terriblement

 

LES INTERACTIONS ENTRE PERSONNAGES

La saison 1 fonctionnait grâce à l'atmosphère collective qui s'en dégageait. Si les "Monterey Five" cachaient chacune des secrets aux autres, elles se retrouvaient souvent pour discuter et échanger sur leur famille, sur leurs enfants, leurs routines...

Dans cette saison 2, exit les multiples discussions au Blue Blues Café et sorties en jogging entre les héroïnes, voire les causettes à bord d'une voiture (présentes furtivement ici). Pendant sept épisodes, Renata, Bonnie, Madeline, Celeste et Jane se croisent sans se croiser, se soutiennent sans vraiment discuter en profondeur et sont toutes de plus en plus éloignées.

Certes, cela répond à la nouvelle intrigue mise en place et aux multiples sous-récits dont chaque protagoniste doit s'affranchir. Et après les événements traumatiques de fin de saison 1, on comprend que chacune est en proie à des questionnements plus individuels que collectifs. Au-delà, la série essaye de développer un récit plus axé sur les conflits ou relations féminin-masculin entre Renata et son mari (Jeffrey Nordling) , Madeline et le sien (Adam Scott), Jane et son collègue... Sauf que le seul qui fonctionne réellement reste celui entièrement féminin : Celeste et Mary-Louise.

La preuve que la série manque le coche en supprimant ou plutôt en raréfiant les échanges entre les Monterey Five souvent vigoureux, ingénieux, tendres et attachants. Les meilleurs moments de cette saison 2 sont d'ailleurs ceux où elles se réunissent enfin, et où le spectateur a vraiment la sensation de retrouver les personnages qu'il avait quittés il y a deux ans.

 

PhotoUne des rares fois où les cinq héroïnes sont réunies dans cette saison 2

 

MERYL STREEP

Attention, Meryl Streep n'est en aucun cas un mauvais point. En tout cas, certainement pas son interprétation tout au long des sept nouveaux épisodes. L'actrice, dont l'omniprésence sur les écrans et ses nominations incessantes aux prestigieuses cérémonies de récompenses exaspèrent certains, cloue le bec à tout le monde en prouvant qu'elle mérite encore une telle reconnaissance et admiration.

En sept épisodes, elle bouffe littéralement l'écran par son charisme et envoie balader n'importe quelle des cinq autres actrices du show (sauf peut-être Nicole Kidman dans le procès final, mais c'est son rôle qui veut ça), ce qui donne la sensation d'un casting un cran en dessous par rapport à la saison 1. 

D'autant plus que son personnage est sans aucun doute le mieux écrit de cette saison 2. Horrible belle mère qui fait tout pour mener la vie dure à sa belle-fille et venger la mort de son fils qu'elle pensait si bon, Mary Louise est un personnage contrarié et contrariant, d'une sincérité déroutante et manipulatrice experte. Son extravagance surprend et fascine à chaque instant, et sa caractérisation paraît plus aboutie en deux épisodes que le reste du casting depuis le pilote de la série. C'est dire, à quel point elle fait du bien, mais détruit aussi une bonne partie des âmes du show.

 

Photo Meryl StreepMeryl Streep, tellement impressionnante qu'elle ridiculise (presque) les autres

 

LES CHOIX DE HBO

Finalement, c'est peut-être ici que se trouve le plus gros souci de la saison 2 de Big Little Lies : HBO n'a sans doute pas fait les bons choix pour construire au mieux cette deuxième saison.

Netflix est souvent critiqué pour éterniser ou reconduire des séries qui n'en avaient pas besoin (coucou 13 Reasons WhyLa Casa de papelLa Fête à la maison : 20 ans après), et, au contraire, HBO est rarement tombé dans ce panneau évitant de charger la mule. Malheureusement, sans doute portée par le succès critique et public de la saison 1, la chaine n'a pas pu s'empêcher de lancer le retour de Big Little Lies alors que l'intrigue ne nécessitait aucunement une suite.

Une première erreur qui en conduira à une autre : l'embauche d'Andrea Arnold à la réalisation, en lieu et place de Jean-Marc Vallée. A priori, HBO a choisi la réalisatrice d'American Honey, pensant que son style collerait à celui de Vallée. Un choix intéressant sur le papier, mais complètement idiot quand on sait que les deux proposent des univers très différents (elle étant plus frontal avec les émotions, et lui plus évasif) et que HBO voulait conserver une esthétique et une ambiance similaires à la saison 1.

 

Photo Nicole KidmanNicole Kidman

 

De facto, même s'il est dur de tirer des conclusions sans avoir été au coeur du projet, il semblerait que la gestion des désaccords ait été à sens unique. Sans vraiment demander avis à Arnold, HBO a préféré diminuer les nouveautés proposées par la réalisatrice pour rester dans l'atmosphère de la saison 1 quitte à couper un peu partout et confier le montage à Vallée lui-même, ainsi qu'à une dizaine d'autres monteurs briefés sur les envies de HBO.

En plus d'un scénario tenant sur une nouvelle de quelques pages écrite à la hâte par Liane Moriarty, HBO a peut-être foncé un peu trop tête baissée par excès de confiance. Résultat : cette saison 2 est plutôt ratée et clairement moins bien que la saison 1.

 

La saison 2 de Big Little Lies est disponible en intégralité sur OCS en France. La saison 1 est aussi dispo sur OCS.

 

photo, Big Little Lies

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commentaires
JulieF
15/04/2021 à 19:38

Ah et je ne parle même pas de l'histoire avec le mari de Renata qui sort aussi de nulle part !

JulieF
15/04/2021 à 19:36

Je trouve qu'au final rien n'avait l'air abouti dans cette saison, alors que la première était calculée à la seconde près, chaque image, coupe et plan était d'une grande importance (on le remarque davantage au second visionnage d'ailleurs). Mais ici on nous tend des perches sans jamais les explorer et c'est frustrant parce que ça donne une impression de faux suspens.
L'histoire entre Ed et Tori, qui n'avait ni queue ni tête, l'histoire avec la mère de Bonnie ? Aucun sens. D'ailleurs toute la storyline de Bonnie a été effacée avec la saison 2, et n'avait plus aucun rapport avec ce qu'on nous a vendu en saison 1. L'histoire sur Abigail et ses études ? Pas de réponse non plus. Alors certes ce sont des événements de second plan, pourtant j'ai l'impression qu'ils ont pris du temps considérable à l'écran qui n'apportaient pas grand chose, et qui soit auraient dû être plus approfondis, soit carrément enlevés pour donner plus d'importance au reste et à l'enquête. Enquête qui d'ailleurs est aussi parsemée tout au long des épisodes depuis la saison 1 mais qui au final n'a absolument aucun intérêt ni de réel enjeu sur le reste du scénario et des personnages, à part pour donner à nouveau un faux air de suspens.
Bref, j'ai été très déçue de cette saison après avoir eu une saison 1 au top, et après avoir eu l'occasion de regarder Sharp Objects par Vallée aussi qui est superbement travaillé. Avec une saison 2 comme ça on sent juste l'appât du chèque derrière, et mieux valait s'abstenir.

Selene
22/10/2019 à 23:38

Je suis globalement d'accord avec cet avis sur la saison 2. Il n'y a qu'un petit point qui me chiffonne : quand vous dites que le tout est basé sur une nouvelle de quelques pages écrite à la hâte par Liane Moriarty. Écris a la hâte, je ne sais pas, mais nouvelle de quelques pages? On parle d'un livre qui dans sa VO fait dans les 484 pages. Sacrée nouvelle! ????

Pseudo01
21/08/2019 à 21:23

Évidemment que la première saison reste la meilleure mais c’est le scénario qui veut ça...
en revanche la suite est très bonne, la saison 2 tient totalement la route : d’une part avec l’apparition de Meryl Streep, grâce à son rôle ; elle marquera notamment grâce à une scène d’anthologie avec Nicole Kidman.
D’autre part, dire que la même Meryl Streep efface les autres protagonistes paraît tout injuste : Le rôle de Renata (entre autre), son basculement tout juste mémorable est très bien interprète. D’ailleurs, le fait de l'apprécier dans cette saison 2, de la trouver sympathique relève là aussi d’une performance...
Vous basez votre critique uniquement en la comparant à la saison 1, mais ce n’est hélas pas le bon axe de réflexion !
Du coup votre critique ne paraît pas très constructive
Cette saison 2 vaut définitivement la peine d’être vue !

Pat
15/08/2019 à 12:21

Si en effet les 3 premiers épisodes ne sont pas d'une grande réussite avec une psychologie de bazar faisant douter du bien fondé de cette suite par contre les épisodes suivants sont vraiment prenants.
De toute façon si la 1ère saison était bien j'ai trouvé cela loin d'être exceptionnel.

Geoffrey Crété - Rédaction
07/08/2019 à 09:22

@Magju

C'était clairement sur le ton de l'humour...

Magju
06/08/2019 à 21:15

Bonjour M. Geoffrey Crété et M. Simon Riaux.
Je vous trouve bien agressifs dès que l'on cite le nom d'une autre rédaction.
J'ai juste fait le rapprochement entre les 2 critiques dont l'une publié "bien avant" pour reprendre vos termes.
Alors milles excuses et bonne continuation,
Bien cordialement.

Simon Riaux
05/08/2019 à 17:20

En plus, tout le monde sait que les gens chez Première sont chauves.

Il nous est donc bien impossible d'être de mèche avec eux.

Geoffrey Crété - Rédaction
05/08/2019 à 17:14

@Magju

Si être d'accord avec un confrère signifie qu'il y a accord et "de mèche", notre quotidien serait très compliqué ;)

Alexandre a trouvé cette saison 2 moins réussie, moins fine et prenante. Et ce dès les premiers épisodes, bien avant qu'un confrère ne publie lui aussi un bilan.

Si vous avez aimé les deux saisons, on est ravis. Chacun devrait se faire sa propre opinion, et aucun problème de notre côté avec la diversité des avis !

Magju
05/08/2019 à 17:07

Bonjour M. Le journaliste, êtes-vous de mèche avec votre confrère M. Martin de chez Première?
Je ne suis pas d'accord avec votre critique, j'ai regardé les 2 saisons d'affilée et à aucun moment je n'ai senti une baisse de régime ou autre.
Je trouve que toutes les actrices sont époustouflantes et que malgré votre jugement le scénario de la saison 2 tient la route. Je ne me suis pas ennuyée 1 seconde, j'ai adoré chaque épisode.
Cette série dans son ensemble restera pour moi la meilleure découverte de cette année. J'ai adoré.

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