La Guerre des mondes Saison 1 : après la série de Canal+, l'adaptation de la BBC est-elle une nouvelle déception ?

Déborah Lechner | 30 décembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Déborah Lechner | 30 décembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Plus d'un siècle après sa publication, le roman La guerre des mondes de l'écrivain britannique H.G. Wells continue de se réinventer à l'écran. Après les adaptations modernes de Byron Haskin en 1953, Steven Spielberg en 2005 ou plus récemment de Canal+ avec la série éponyme, c'est au tour de la BBC de s'emparer d'une des fictions qui a le plus secoué l'imaginaire collectif à propos des aliens.

Pour se démarquer de leurs aînés, le scénariste Peter Harness et le réalisateur Craig Viveiros ont choisi de rester plus fidèles au matériau d'origine en installant leur récit de trois épisodes au début du XXe siècle. Attention, légers spoilers !

 

C'EST UN BEAU ROMAN, C'EST UNE BELLE HISTOIRE

Après l'adaptation tiède et confuse de La Guerre des mondes de Canal+ et de la Fox, la promesse de la BBC d'une minisérie beaucoup plus fidèle à l'oeuvre pionnière de science-fiction d'H.G. Wells était très alléchante, on est donc ravi qu'elle ait été tenue. La nouvelle version prend place à l'époque edwardienne et non victorienne, ce qui modifie légèrement le contexte politique, mais ne contrarie en rien la direction artistique qui propose des décors et costumes modestes, mais convaincants, de l'ancienne Angleterre que l'écrivain aurait presque pu décrire dans les pages de son roman en 1897. 

 

photoH&M collection printemps 1905

 

Ce retour au début du XXe siècle est l'occasion pour le scénariste Peter Harness (Doctor Who) de revenir sur les ravages du colonialisme européen, un thème central dans l'oeuvre d'origine qui a laissé place à des problématiques plus contemporaines dans les différentes adaptations, comme la menace terroriste qu'on retrouve aussi bien dans le film La Guerre des mondes porté par Tom Cruise que dans la récente série éponyme avec Léa Drucker

Après les espèces de robots-chiens peu attrayants de la série de Canal+, Harness et Craig Viveiros font également le pari de passer derrière Steven Spielberg et ses impressionnants mecha-aliens. Là encore, c'est une petite victoire pour les deux cinéastes qui signent un retour à l'écran des tripodes martiens géants venus exterminer l'Humanité qui fonctionne plutôt bien. Le fait de replacer l'invasion au début du XXe siècle permet également de rendre compte de toute l'impuissance des hommes qui répliquent à coups de canons et grenades pour tenter d'abattre un ennemi quasi-invincible. 

 

photoTout aussi menaçants que ceux de 2005

 

Et même si on ne peut pas comparer les effets spéciaux et, par conséquence, le budget de la série à ceux du film hollywoodien, la création de la BBC n'a globalement pas à rougir de sa technique très correcte. Il y a un réel travail sur la photographie, la lumière et la mise en scène qui cherchent à éviter la monotonie à laquelle on s'attendait, bien que l'effort trop irrégulier s'essouffle dès le deuxième épisode qui retrouve un ryhtme plus lent, voire ennuyant par moment. 

 

C'EST UNE ROMANCE D'AUJOURD'HUI

Même si La Guerre des mondes souhaite se rapprocher au plus près du roman d'H.G. Wells, la série n'hésite pas à prendre quelques libertés pour tenter d'en faire un récit plus intimiste et humaniste avec des thématiques d'actualité comme l'impact néfaste des activités humaines sur l'environnement. Le narrateur anonyme du livre a désormais une identité, celle de George (Rafe Spall), un journaliste acculé qui vit comme un paria avec Amy (Eleanor Tomlinson), une scientifique en herbe, pour qui il a fui un mariage malheureux, un affront aux normes sociales de l'époque. 

 

photo, Rafe Spall, Eleanor TomlinsonRafe Spall dans le rôle de George et Eleanor Tomlinson dans celui d'Amy

 

La longue introduction des problèmes financiers et familiaux du couple et du regard intolérant que porte la société sur eux reste malgré tout un choix scénaristique surprenant. On imagine bien que toutes ces préoccupations rigoristes vont être balayées par le carnage imminent, on a dès lors beaucoup de mal à y accorder une quelconque importance, ce qui peut être une réelle intention visant à accentuer la vacuité de notre existence face à l'immensité de l'univers ou le meilleur moyen de perdre les téléspectateurs au bout de 30 minutes d'épisode. 

Une autre liberté importante est la touche féministe incorporée à l'histoire. Dans le roman de Wells, la femme du narrateur est rapidement mise à l'écart et ne participe presque pas aux événements décrits. 

 

photo, Eleanor TomlinsonEleanor Tomlinson qu'on a aussi vu dans Poldark

 

La Guerre des mondes choisit au contraire de faire d'Amy le personnage principal d'un récit auquel on assiste majoritairement à travers son point de vue. C'est d'ailleurs elle qui récite le célèbre premier paragraphe du roman de science-fiction au début du premier épisode.

En femme déterminée et indépendante, elle défit les lois du genre en se plongeant dans les sciences alors réservées aux hommes, un aspect abandonné en même temps que tout ce qui a été introduit quand les tripodes commencent à décimer la population de Woking. Ce qui est d'autant plus dommage que le scénariste avait pris le soin d'inscrire l'histoire en 1905, période où les suffragettes cassaient les codes d'une société anglaise patriarcale en militant pour obtenir le droit de vote. 

 

photo, Eleanor Tomlinson"Un droit de vote que je n'aurai jamais du coup ?"

 

QUI C'EST QUI EST TRÈS MÉCHANT ? LES MÉCHANTS 

Sauf qu'à vouloir trop en dire, La Guerre des mondes finit par ne plus raconter grand-chose. Que ce soit la place des femmes dans la société, le rejet systématique des différences, la dégradation de la flore, la disparition de la faune, l'opportunisme macabre de l'armée impériale, le colonialisme ou encore le dogmatisme religieux, aucune de ces thématiques ne trouve véritablement sa place, faute de temps, et n'est suffisamment creusée pour mériter d'avoir été introduite dans l'histoire.

Avec seulement trois épisodes en réserve, la série fait même le choix de créer une continuité avec le roman en présentant un monde post-apocalyptique ravagé par les tripodes, où l'eau et les sols sont empoisonnés, le ciel est recouvert d'un voile poussiéreux et où les femmes sont devenues stériles.

 

photoUne ambiance survival à la Mad Max 

 

Mais là encore, le format ne laisse pas le temps à la série de développer l'idée, qui était pourtant très intéressante, mais qui s'avère juste frustrante pour le téléspectateur qui voulait un peu plus plonger dans ce futur sordide. 

Pire encore, la série tombe dans l'explicitation forcée et semble prendre son public pour un enfant de 7 ans incapable de comprendre le sous-texte qui se cache derrière l'arrivée des extraterrestres. En plus d'être agaçants et un poil insultants, ce manque de subtilité et cette privation de seconde lecture annihilent toute la tension et l'émotion des événements, dont on connaît de toute façon le dénouement.

Les trois épisodes de La Guerre des mondes seront diffusés sur TF1 dès ce lundi 30 décembre. Sinon, pour se replonger dans le très bon film de Steven Spielberg, c'est par ici que ça se passe

 

 

Affiche officielle

Résumé

La Guerre des mondes de la BBC se veut moderne et respectueuse du matériau d'origine, mais malgré une direction artistique qui tient la route et une apparente fidélité au roman d' H.G. Wells, elle ne parvient pas à mixer ses deux ambitions. La minisérie est trop courte pour développer tout ce qu'elle introduit, beaucoup de thématiques sont survolées ou trop explicitées pour qu'elles restent intéressantes, poignantes ou lourdes de sens.  

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commentaires
Miami81
25/02/2020 à 12:24

Grosse déception. Une mini série indigne de ce que la BBC a pu nous proposer ces dernières années : une histoire plate, des effets spéciaux très laids, des décors au minimum syndical, une direction d'acteurs catastrophique (mention spéciale pour le mouvement de foule sur la plage), des personnages insipides aux réactions étonnantes et un réalisateur à priori absent durant les prises. Cette mini série ne vaut pas mieux que les séries Z américaines qui passent en fin de soirée sur la TNT et encore, ces dernières ont l'avantage d'être drôles.

Sébastien
03/01/2020 à 01:50

Bon je m'étais donné la peine d'écrire un commentaire argumenté, mais comme votre site bug à mort:
Série à chier 0/20.

Bravissimo
02/01/2020 à 02:12

Rien à voir avec l’excrément pondu par canal : rebeu violeur qui devient le héros, les mâles blancs sont des taches...

Célia
31/12/2019 à 13:15

Cette série est une catastrophe en terme d'adaptation du roman de Hg Wells. Ça partait pourtant si bien et dès la 15e minute ça devient n'importe quoi. Seul côté positif, le respect de l'époque, similaire au roman. Pour le reste, ils ont pas dû dépasser la vingtième page. Nulle, à oublier d'urgence. Irrespect total de l'œuvre originale.

Nico1
31/12/2019 à 11:04

Une mini série ambitieuse mais qui souffre d'un manque de rigueur au niveau de l'écriture. J avoue à avoir eu du mal à croire à l'histoire d'amour entre les deux personnages principaux ( trop de larmes et puis le jeu catastrophique de Rafe Spall y est surement pour quelque chose). Et ça traîne sérieusement en longueur sur la fin. Concernant le monde post apocalyptique, il n'est pas sûr d'avoir besoin d'en montrer plus, au contraire ce que l'on voit suffit amplement.

@apotre ctulluh

Bien d'accord sur le design des extraterrestres, ça n'est pas une franche réussite.

boston
31/12/2019 à 10:11

La série est nettement mieux que certains commentaires débiles !!

mascu 2000
31/12/2019 à 01:35

@MystereKK : haha, ça change des productions Netflix en effet ;)

Rorov94
31/12/2019 à 01:18

@mysterkukluxklan à raison:
cette série manque de gay,de blacks,d'asiat,de suédois,de blondes,de gros,de cancéreux,de nains,d'albinos,d'unijambistes,d'aveugles,de sourds,de muets,de gilets jaune,de cgtistes,de pryapiques,de femmes-tronc,de paraplégique,d'hémiplegique...
Bientôt,toute oeuvre sera une armée mexicaine en puissance!

Chris
30/12/2019 à 23:10

Vous avez fait une erreur a la fin de l'article, vous avez ecrit "le très bon film de Spielberg" à la place du "très moyen film de Spielberg" car il faut dire qu'il à pas mal raté son adaptation du roman aussi.

apotre ctulluh
30/12/2019 à 15:42

Perso je l'ai trouvé assez correcte du 3/5, mais ça manquait de rythme ou alors de détails s'ils voulaient rester sur ce rythme un peu larmoyant, par contre l'apparence des extraterrestres m'a assez sorti du film, je veux dire comment ces machins sont censés construire leurs technos membrés comme ils sont ? Pas du tout fonctionnel, comment ils ont pu aller dans l'espace ? Aïe Aïe Pépito

La version en époque ancienne de ce roman est encore celle que je préfère pour le moment, j'espère qu'un jour on fera la version qui a lieu durant la période du second empire début 3e république, ou une version longue du court métrage où la guerre des monde se déroule au plein milieu de l'europe de l'ouest pendant la 1er guerre mondiale.

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