Entretien avec Didier Brunner

Nicolas Thys | 14 mars 2013
Nicolas Thys | 14 mars 2013

Du 6 au 8 mars 2013, s'est tenu le forum de coproduction Cartoon Movie à Lyon. Au cours de cette manifestation, nous avons pu croiser Didier Brunner, producteur de la société Les Armateurs (Kirikou, Les Triplettes de Belleville, Ernest et Célestine...) et lui poser quelques questions entre deux rendez-vous sur le prochain projet, encore en concept, de Sylvain Chomet, Swing Popa Swing (dont vous pouvez avoir un compte-rendu ici) et de la très belle année 2012 qui s'est écoulée. Une heure après notre entretien, il était courroné producteur de l'année.

 

Ecranlarge : Pourquoi être devenu producteur de films d'animation ?

J'ai une grande passion pour la peinture et le dessin. D'ailleurs ma formation est historien d'art donc je suis naturellement porté vers les gens qui dessinent et peignent. Puis j'ai aussi une grande passion pour le cinéma. Et peinture + cinéma + dessin ça donne cinéma d'animation. Mais je suis tout aussi convaincu que le cinéma d'animation n'a rien à voir avec la peinture ni le dessin mais beaucoup avec le cinéma car il faut savoir diriger des acteurs, gérer une narration, être metteur en scène et cinéaste.

 

 

EL : Quelles sont les difficultés en plus avec l'animation ?

Le temps. Un projet se développe sur cinq ou six ans, parfois même quinze ans. Et on a toujours l'impression de marcher avec des semelles de plomb, de vivre au ralenti. Il y a énormément d'inertie, c'est un processus très complexe tant dans la production que dans la création. Par exemple, nous on a fait dix films d'animation en vingt ans, là où en cinéma live on en aurait fait peut-être vingt ou vingt-cinq.

 

EL : Là vous venez avec le projet Swing Popa Swing que réalisera Sylvain Chomet et vous le prévoyez d'ici 2 ans, c'est plutôt court finalement.

Oui mais on part sur une notoriété déjà établie. C'est plus facile d'aborder des investisseurs avec un auteur comme Chomet qui a déjà une réputation établie en tant que réalisateur au box-office sur le marché, qu'avec un tout jeune réalisateur et un projet qui n'est pas une licence. Parce que Les Triplettes c'est aussi une licence, c'est-à-dire que tout le monde a en mémoire le succès du premier film qui peut justifier qu'on rebondisse dessus ou qu'on en propose une suite.

 

 

EL : L'utilisation de la 3D permet aussi un gain de temps ?

Oui, on ne va pas changer de technique car il y avait déjà pas mal de 3D dans les Triplettes de Belleville. C'est plutôt un ajustement. Sylvain ira de toute façon vers la 3D comme Michel Ocelot l'a fait. On ne l'a pas utilisée sur Ernest et Célestine mais c'était une autre histoire. Et cette technique permet de ne pas avoir cette course au respect du modèle 2D. Ca simplifie et ça accélère le processus de fabrication.

 

EL : A propos de Swing Popa Swing toujours, c'est lui qui est venu vous voir avec le projet ou vous l'avez toujours suivi depuis les Triplettes ?

C'est un peu les deux. J'ai toujours gardé un œil sur le parcours de Sylvain même pendant L'Illusionniste et Attila Marcel. Mais c'est lui qui est venu me rencontrer à Annecy pour me proposer la suite des Triplettes. Et c'est une proposition a laquelle on peut pas dire non malgré le scénario. Avec Sylvain, plus c'est fou, plus c'est déjanté, plus compliqué à monter, plus c'est une base pour film formidable.

 

EL : Vous suivez aussi Michel Ocelot...

Oui, on a fait Kirikou et les hommes et les femmes. Michel se partage entre deux producteurs, Christophe Rossignon et Les Armateurs. Son prochain projet sera sûrement chez Christophe. Là le dernier Kirikou a été un beau succès en salle avec un million d'entrée, il y est toujours d'ailleurs et il vient de sortir en vidéo. Pour le moment on lève le pied sur Kirikou, Michel va passer à autre chose. Mais qui sait, dans 7 ou 8 ans, si Michel a toujours la ressource et l'envie, pourquoi ne pas faire un Kirikou 4 mais plutôt sur une grande et longue histoire et pas sous la forme de plusieurs histoires courtes.

 

 

EL : C'est aussi une bonne année pour Ernest et Célestine. C'était un pari osé...

C'était risqué mais comme tous les paris. Chaque film est un prototype. Ca peut être un échec ou une réussite. Là on a bien joué, on a réuni les talents appropriés qui se sont très bien entendus. En plus on a découvert un jeune réalisateur brillant avec Benjamin Renner. Je l'ai choisi à partir de son court métrage de fin d'étude, La Queue de la souris, que j'aime beaucoup et qui m'avait interpelé, et aussi à partir des essais que je lui ai proposés des livres de Gabrielle Vincent. Puis à partir des discussions qu'on a eues ensemble. J'avais aussi rencontré d'autres potentiels réalisateurs mais je cherchais quelqu'un de plus jeune et qui arrive sans trop d'a priori sur le projet.

 

EL : Vous avez d'autres projets ?

Oui, on travaille sur deux longs métrages animés. Le premier, French Riviera est un thriller glamour qui se déroule sur la French Riviera. Ce sera une parodie des films d'Hitchcock comme La Main au collet ou La Mort aux trousses. Le deuxième c'est l'adaptation du livre de Yasmina Khadra Les Hirondelles de Kaboul. C'est Zabou Breitman qui le réalisera mais assistée par toute une équipe de graphistes. C'est un beau sujet, grave qui traite de la situation des femmes en Afghanistan. C'est violent et émouvant.

 


 

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