Jamie Foxx (Ray)

Didier Verdurand | 28 février 2005
Didier Verdurand | 28 février 2005

De formation musicale, Jamie Foxx joue au piano depuis l'âge de 5 ans et a composé notamment la BO de L'enfer du dimanche. Il est cette année nominé aux Grammies (les Victoires de la Musique US) mais ce sont ses trois nominations aux Golden Globes – du jamais vu – qui marqueront à jamais sa vie, avec au final le plus prestigieux trophée dans les bras, celui du meilleur acteur. Quelques jours avant Noël, Jamie Foxx a débarqué à Paris et nous avons eu le plaisir de passer un moment en sa compagnie. Vous le vénèrerez dès que vous verrez Ray.

Connaissiez-vous le côté sombre de Ray Charles ?
Nous avions entendu parler du démon de la drogue mais ne savions pas qu'il était aussi profond car lorsque l'héroïne ou la cocaïne vous emporte, c'est comme un cancer. Quand on voit comment il s'est battu contre la drogue, il y a de quoi être impressionné d'autant qu'il était un sacré fêtard. Il était ouvert pour en parler. Si Ray avait été produit par une Major (Paramount est juste distributeur) il est probable que l'adultère et les problèmes liés à la drogue n'auraient pas été abordés de manière aussi libre.

Avez-vous accepté le rôle les yeux fermés ?
Quand j'ai lu le scénario, je ne me doutais pas à quel point Ray Charles était un homme si profond. J'étais sous pression, tout le monde connaît Ray Charles, je ne pouvais pas échouer. En même temps, si je pouvais y arriver, je savais que cela serait énorme pour ma carrière et ma vie. Le challenge était très motivant. Puis j'ai rencontré Ray et il a dit « The kid's got it ».

Comment vous y êtes-vous pris ?
La préparation a duré un an. Je le filmais et étudiais les films toute la journée. Le plus intéressant n'était pas lorsqu'il chantait ses chansons mais plutôt comment il commandait ses plats au restaurant, parlait à sa famille, ses gestes, sa façon de gérer son business... Cela me semblait nécessaire pour éviter la caricature. Quincy Jones a aussi été très utile car il le connaissait très bien et donnait de nombreux détails sur ses manières. Il a enregistré un CD des dernières paroles de Ray.

Dernière conversation avec Ray Charles ?
Il ne parlait pas de sa santé, il n'était pas comme ces gens d'une cinquantaine d'années qui rabâchent et parlent déjà de leur mort à venir. Il a eu l'opportunité de voir une première version du film qui durait 5h30. Quelqu'un de très simple mais aussi professionnel jusqu'au bout des ongles. Quand je jouais et que je faisais une fausse note, il me le faisait remarquer.

Avez-vous douté pendant le tournage ?
La famille de Ray venait sur le plateau et ils étaient naturellement les meilleurs juges. Les Raelettes qui ne sont plus toutes jeunes étaient figurantes et réagissaient de manière très favorable à mon interprétation. Leur avis m'était extrêmement important. Quand je les voyais se remémorer des souvenirs, je savais que c'était gagné.

Ray Charles vivait bien son handicap ?
Il se foutait d'être aveugle, cela ne l'affectait pas. Il est devenu aveugle à l'âge de 16 ans et c'est d'ailleurs une différence notable que l'on peut faire avec Stevie Wonder qui lui était aveugle de naissance donc n'avait jamais vu la vie. Ray savait vraiment de quoi il parlait et n'hésitait pas à s'engager. Il y avait aussi sûrement des images traumatisantes imprimées dans son cerveau.

Comment vivez-vous votre succès actuel ?
À Los Angeles, je rentre partout gratos. Hollywood forme une famille dans laquelle il y a de nombreux non-dits et cela fait plaisir de recevoir tant de compliments parce que c'est rare ! Mes rôles en 2004 m'ouvrent de nombreuses portes, des gens comme Robert Redford m'appellent pour me parler de leurs projets. Je n'ai pas construit ma carrière sur des grosses productions commerciales comme Will Smith – c'est un ami je peux le chambrer – mais sur des œuvres plus artistiques dont je voulais être fier. Je voulais que mon CV soit le plus riche possible. Collateral, mon plus gros succès, a été un détonateur.

Votre partenaire de Collateral a été impressionné par votre interprétation de Ray Charles ?
Tom Cruise m'a appelé à 1h du matin. (le caricaturant) « Jamie Foxx… Brother... Je viens de voir Ray avec ma famille. I'm fucking crying. Pourquoi tu nous as tous fait pleurer, Man ? » et ça s'est terminé en karaoké chez lui dans la nuit, il adore ça. Ce sont des moments si agréables quand des gens que tu estimes tant te respectent. À la Première de Ray, c'était émouvant de voir des personnalités comme Janet Jackson, Steven Spielberg et Ray Charles Junior pleurer quand les lumières se sont rallumées.

Et il y aura les probables nominations aux Oscars.
Cela voudrait dire encore plus de restaurants, de boîtes de nuit... (Rire.) Cela serait super pour Ray Charles car je considère que c'est lui le rôle principal, pas moi. Cet homme avait vraiment un talent unique.

Prochain film ?
Je viens de terminer Jarhead de Sam Mendès. Je suis un sergent dans les Marines pendant la Guerre du Golfe et on montre ce qu'ils ont réellement fait sur place. L'Administration ment à tout monde y compris la presse. Diriger les marchés du pétrole et de la drogue a naturellement beaucoup d'intérêt pour ceux qui ont le pouvoir. Peu importe la libération des peuples, c'est le fric qui motive. J'ai grandi dans l'Etat où George Bush était gouverneur et je connais des vérités sur lui depuis bien longtemps. À l'époque, il ne possédait même pas de passeport et n'avait pas voyagé dans plus de trois Etats...

Votre film préféré de 2004 ?
Les Indestructibles. J'adore, ma fille aussi.

Chansons préférées de Ray Charles ?
Mary Ann, I've got woman, Lets go get stoned, Georgia on my mind…

Votre album préféré du moment ?
Le dernier Luther Vandross.

Propos recueillis par Didier Verdurand.
Autoportrait de Jamie Foxx.

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