Bernard Giraudeau, un grand monsieur s'en est allé

Nicolas Thys | 17 juillet 2010
Nicolas Thys | 17 juillet 2010

Acteur et réalisateur populaire et discret, auteur d'une dizaine d'ouvrages plusieurs fois primés mais peu présent sur les écrans et sur scène depuis 2005, Bernard Giraudeau est décédé à l'âge de 63 ans ce samedi 17 juillet. Atteint d'un cancer depuis plus de 10 ans, il était réapparu ces derniers mois dans les médias afin de parler de sa maladie et du combat qu'il menait en parrainant notamment le site internet La Maison du cancer destiné à accompagner les malades et leur famille.

 


 

Né à la Rochelle en 1947, c'est d'abord l'appel du large qui l'emporte et qui ne le quittera jamais. Engagé dans la marine nationale à 16 ans, il fera deux fois le tour du monde avant de tenter sa chance au conservatoire national supérieur d'art dramatique en 1971. Il en ressort 3 ans plus tard avec un premier prix de comédie classique et moderne. Entre temps il aura déjà interprété quelques petits rôles au théâtre, à la télévision et au cinéma dans Deux hommes dans la ville de José Giovanni (1973) et La Poursuite infernale de Sergio Sollima aux cotés d'Oliver Reed (1973).

Malgré son amour de la scène, puisqu'il jouera au théâtre jusqu'en 2005 dans un large panel de pièces de répertoires de Jean Giraudoux, Jean Anouilh, Oscar Wilde ou William Shakespeare en particulier, et de pièces populaires, c'est le grand écran et la littérature qui l'accapareront le plus.

 

  

 

S'il joue avec les acteurs et réalisateurs français parmi les plus importants des années soixante-dix (Le Gitan de José Giovanni avec Alain Delon et Paul Meurisse, Le Juge Fayard dit le shérif d'Yves Boisset avec Patrick Dewaere) c'est en 1977 qu'il obtient ses deux premiers rôles importants. D'abord dans l'oubliable et oublié Moi, fleur bleue avec Jean Yanne et Jodie Foster et surtout dans Bilitis de David Hamilton, petite bluette érotique qui déshabillait de jeunes filles en fleur sans aucun intérêt sinon d'être très populaire. Dès lors, vont se succéder un film important signé Pierre Granier-Deferre (Le Toubib avec Alain Delon, 1979, qui verra sa première nomination aux César) et d'autres qui le feront connaitre. A la télévision il joue pour Alexandre Astruc dans Louis XI ou le Pouvoir central et au cinéma dans deux films générationnels Et la tendresse ? ... bordel ! de Patrick Schulmann, et surtout La Boum de Claude Pinoteau 1980.

 

   

 

Les années 1980 seront celles de la consécration. En 7 ans, il joue dans 20 films dont de nombreux gros succès, parfois encore multi-diffusés comme Papy fait de la résistance de Jean-Marie Poiré (1983), Viens chez moi j'habite chez une copine (1981) et Les Spécialistes (1985) de Patrice Leconte encore aujourd'hui le meilleur film d'action français. D'autres ne subsistent plus que dans la mémoire des plus de trente cinq ans comme L'Année des Méduses de Christopher Frank (1984), Rue Barbare de Gille Béhat (1984) ou encore Les Longs manteaux (1986) qui aura précipité la chute de ce même Béhat (ahhhh ce reportage dans Starfix sur le tournage en Argentine / NDLR). On le retrouve également chez Etore Scola (Passione d'amore, 1981), Alexandre Arcady dans son film le plus regardable (Le Grand pardon, 1982), Jean-Charles Tachella (Croque la vie, 1981) ou José Giovanni, qui l'a fait débuter, en apparaissant dans Le Ruffian (1983) et Les Loups entre eux (1985). En 1987 il remporte également le prix du meilleur acteur à Venise pour un film oublié : L'Homme voilé de Maroun Bagdadi et on le voit dans (le magnifique et à redécouvrir urgemment / NDLR) Poussière d'ange écrit par Jacques Audiard.

Il disparait ensuite pendant presque 4 ans, à l'exception de deux rôles au théâtre et d'une première réalisation pour la télévision, et il revient en 1991. D'abord comme scénariste et réalisateur de L'Autre avec Francisco Rabal d'après un roman d'Andrée Chedid pour lequel il est nominé au césar de la meilleure première œuvre et ensuite comme acteur dans La Reine blanche de Jean-Loup Hubert avec Catherine Deneuve et Richard Bohringer.

 

  

 

Les années 1990 seront celles de la diversification. Il reste très présent sur les écrans en jouant dans près de 20 films et téléfilms. Retenons en particulier Le Fils préféré de Nicole Garcia (1994) et Ridicule de Patrice Lecomte (1996) qui lui valent deux autres nominations aux César, ainsi qu'Après l'amour de Diane Kurys (1992), Une nouvelle vie d'Olivier Assayas (1993) et Saint-Exupery : la dernière mission de Robert Enrico pour la télévision en 1996. Cette même année, il publie son premier roman, qu'il mettra en scène pour le cinéma et dans lequel il jouera : Les Caprices d'un fleuve, film bouleversant sur la colonisation à l'aune de la Révolution Française. Entre 1992 et 2003 il tourne également quatre documentaires, quatre « carnets de voyage » qui nous font découvrir la route Transamazonienne, le Chili et les Philippines.

 


 

Les années 2000 ne seront pas que celle du combat contre la maladie puisqu'il reste prolixe jusqu'en 2005, persévérant dans tout ce qu'il fait. Ces cinq années il réussit l'exploit d'apparaitre dans 13 films et téléfilms (dont Une affaire de goût de Bernard Rapp, La Petite Lili de Claude Miller, Goutte d'eau sur pierre brûlante de François Ozon et Ce jour-là de Raoul Ruiz), de jouer dans 3 pièces de théâtre, d'enregistrer 8 livres sonores (en particulier les premiers tomes d'Harry Potter et Le Petit Prince), de faire les commentaires de 3 documentaires, d'écrire 3 romans et de contribuer à deux autres ouvrages.

La deuxième partie de la décennie sera plus calme. Pour le grand public il sera surtout l'auteur de 2 romans à succès, Les Dames de nage et Cher amour, et d'une contribution à un ouvrage collectif, et d'un homme de combat, soutenant plusieurs fondations de lutte contre le cancer. Il est le père de Sara Giraudeau, également actrice et molière de la révélation théâtrale 2007 pour La Valse des pingouins.

 

 

 

 

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