FrightFest de Londres : compte-rendu n°2

Thomas Messias | 30 août 2009
Thomas Messias | 30 août 2009

Un taux déraisonnable de caféine dans le sang, la panse remplie de burgers et autres cochonneries, c'est dans une forme olympique que les participants du Film4 FrightFest ont vécu une troisième journée charnière, le festival basculant lentement mais sûrement vers un dénouement prévu lundi soir. Week-end oblige, la grande salle de l'Empire n'a jamais été aussi bondée et collante, les seaux de pop corn et le soda renversé ayant fait leur petit effet malgré le travail considérable d'une troupe de bénévoles fort méritants.

 



Trêve de bons sentiments, entrons dans le vif du sujet avec le récit de cette journée riche en émotions et en hémoglobine. Les programmateurs étant visiblement des gens raisonnables, la première séance de la matinée est agréable et 100% bon esprit afin de ne pas filer la nausée d'entrée à des spectateurs en manque de sommeil et de repas équilibrés. Réalisé par Lee Demabre, Smash cut est une pure comédie aux scènes horrifiques toujours hilarantes, bien loin de ce qu'on pouvait éventuellement attendre à la vue de l'affiche mettant en scène Sasha Grey en infirmière. Petite déception partagée par une partie du public : à aucun moment la belle ne se dévêt, ne nous rappelant la nature de son principal gagne-pain qu'à l'occasion d'une scène où un fluide corporel vient inonder sa jolie frimousse. Qu'on se rassure, il ne s'agit que de sang. À part ça, Smash cut est un excellent divertissement dans lequel un très mauvais réalisateur d'horreur (interprété par l'un des héros de La dernière maison sur la gauche de Wes Craven) tente de sortir de la médiocrité en utilisant de véritables cadavres au lieu d'avoir recours à des pantins trop factices. Et pourquoi ne pas en profiter pour dézinguer dans la bonne humeur quelques emmerdeurs notoires, comme une critique revêche ou un scénariste tatillon ? Avec Hershell Gordon Lewis en guest star, le film de Demabre a inondé ce samedi de sa bonne humeur perpétuelle.

 



La suite était moins guillerette, l'après-midi s'ouvrant avec le Hierro de l'espagnol Gabe Ibanez. Déjà présenté en sélection parallèle à Cannes, le film s'inscrit dans la plus pure tradition du cinéma fantastique espagnol, avec des enfants disparus, des apparitions, des disparitions, et des mères éplorées. Pas original ? Certes, sauf que la surprise vient de l'économie d'effets choisie par le réalisateur, qui à aucun moment ne tente l'effroi pur, préférant installer une atmosphère légèrement angoissée et surtout terriblement dépressive. Si l'héroïne, dont le fiston s'est évaporé pendant une traversée en ferry, cherche sa progéniture avec obstination et sans jamais envisager le pire, c'est d'abord parce que cette quête va lui apprendre des choses sur elle-même et lui permettre d'aider d'autres personnes en détresse. La présence de ce drame doublé d'un beau portrait de femmes a presque de quoi surprendre tant son potentiel horrifique est nul ; mais un peu de sobriété n'a jamais fait de mal à personne.

 


 

Presque aussi étonnante, la présence au programme du premier volet de la trilogie Millénium, sorti chez nous il y a plusieurs mois mais encore inédit outre Manche, fut l'occasion pour moi d'aller jeter un oeil du côté de la deuxième salle réservée au festival. D'une taille extrêmement réduite (moins de 100 places), celle-ci est consacrée à des découvertes et autres films mineurs. Indigence générale de cette programmation parallèle ou mauvais choix de ma part ? En tout cas, l'australien Fragment d'Andrew Miles fut une perte de temps bien rageante à une heure où une sieste dans le gazon de Leicester square n'aura pas été déplaisante. Il s'agit de l'histoire, filmée façon téléfilm, d'un photographe de guerre se sachant condamné après avoir reçu des fragments d'uranium dans le crâne au cours d'un accident. À moins que cela ne raconte ses déboires avec une caméra tueuse mais pouvant aussi ressusciter ses victimes. Ou peut-être est-ce tout simplement le récit d'une enquête dans l'univers des snuff movies... Bref, un gloubiboulga d'intrigues mal ficelées, inconciliables et filmées avec un indéniable manque d'adresse et de talent.

 


 

Le pire film de la journée ? Non : il fallait compter sur Dario Argento pour assurer le spectacle et provoquer l'hilarité générale d'un public pourtant assez respectueux de la plupart des films proposés. Consternant de part en part, Giallo est un nanar de la plus pure espèce, un bidule surdialogué où chaque réplique sonne culte pour de mauvaises raisons. De l'avis de ceux qui ont suivi le réalisateur italien jusque dans ses errements récents, c'est de loin ce qu'il a pu commettre de plus indigent. Extrêmement pauvre en effets horrifiques, le film se résume à deux types de scène : d'un côté, Elsa Pataky est séquestrée de façon terriblement passive par un vilain tueur surnommé Yellow (devenu psychopathe à la suite d'une jaunisse chronique) ; de l'autre, Emmanuelle Seigner et Adrien Brody se livrent à un concours d'inepties et de déductions foireuses afin de tenter de débusquer le tueur. Le duel au sommet entre le flic et le méchant n'aura même pas lieu : Giallo, c'est du vide à l'état pur, mais du vide ridicule de fond en comble, faisant douter de la santé mentale du réalisateur de Suspiria et autres merveilles. John Landis, présent pour les séances du soir, en rit encore. Nous aussi.

 



Après cette avalanche de fous rires en chaîne qui restera à coup sûr comme l'un des grands moments du FrightFest, la soirée s'achève avec Trick 'r treat, premier long de Michael Dougherty (scénariste de X-men 2 et Superman returns), injustement resté dans les cartons de la Warner depuis sa finalisation il y a deux ans. Injustement car le film est un pur régal, oeuvre chorale et déconstruite mêlant serial killers très singuliers, loups-garous inattendus et enfants poussant leurs farces jusqu'à des limites bien extrêmes. Drôle à en mourir, macabre à souhait, c'est Halloween revisité par John Landis (encore lui) et Todd Solondz, un divertissement du samedi soir possédant toutes les qualités requises pour devenir totalement culte. À condition d'en faire encore et encore la promotion afin de sortir le film d'un anonymat immérité. À ce titre, Dougherty a enjoint une assemblée conquise à faire connaître Trick 'r treat par tous les moyens, par exemple en inondant les réseaux sociaux de critiques reflétant l'enthousiasme général. Brian Cox n'en pensait pas moins, lui qui s'est contenté de faire acte de présence en raison d'une grippe tenace qui aurait fait flipper Roselyne Bachelot à coup sûr.

 



La surprise du jour a eu lieu avant la projection de Hierro : comme Vincenzo Natali la veille, George Romero a présenté par vidéo interposée une scène de Survival of the dead, son nouveau film de zombies. Un cadeau sympathique mais frustrant, la scène proposée étant si courte et si peu révélatrice de la tonalité du film qu'il était bien difficile de se faire une opinion.

 


 

À demain avec Clive Barker, Shannon Elizabeth, le « nouveau Wolf creek », une brochette bucco-anale et autres joyeusetés du genre.

 

Cliquez ici pour retrouver le compte-rendu n°1 du Fright Fest.

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