Tout Lynch testé

Johan Beyney | 7 février 2007
Johan Beyney | 7 février 2007

David Lynch aime le dessin, la peinture, la musique et le cinéma. Alors David Lynch fait du dessin, de la peinture, de la musique et du cinéma. C'est tout simple. Enfin, ça le serait si l'œoeuvre de David Lynch n'était pas aussi complexe. Trente ans de cinéma, et trente ans que des fans fascinés farfouillent frénétiquement les fantasmes animés de leur idole, attendant la réponse à cette question fondamentale : « mais qu'est-ce qu'il a bien voulu dire par là ? ». Car ce qui nous pousse vers le cinéma de Lynch – au-delà de la fascination esthétique qu'il exerce – relève davantage de la quête que du simple entertainment. Aller voir un film de Lynch, c'est se confronter à l'inconnu, au bizarre, renoncer à tous ses repères et, surtout, accepter que notre quête ne nous mènera nulle part. Peu importe car chez Lynch plus qu'ailleurs, le voyage compte plus que la destination.

Tout commence en 1976. Après ses études d'Arts Plastiques et quelques courts métrages expérimentaux reconnus, David Lynch livre son premier long, Eraserhead, pour lequel il cumule les casquettes de réalisateur, scénariste, compositeur, monteur, décorateur, responsable des effets spéciaux et producteur. Rien que ça. L'effort se révèle payant : ce cauchemar filmé suscite l'enthousiasme de la critique et est aussitôt élevé au rang de film culte. Fasciné par l'exercice, Mel Brooks décide alors de confier aux mains du jeune réalisateur l'histoire de John Merrick, un être difformé ayant vécu dans la société victorienne. Elephant man (1980), magnifique fable humaniste filmée dans un noir et blanc d'une élégance rare, remporte huit nominations aux Oscars, le César du meilleur film étranger et le Grand Prix du festival d'Avoriaz. Devant le succès du film, David Lynch se voit confier en 1985 les rênes d'une grosse production SF hollywoodienne : l'adaptation du Dune de Frank Herbert. Malheureusement, le film ne convainc pas les aficionados du roman et s'avère trop opaque pour les autres. Lynch lui-même ne reconnaitra pas cette oeœuvre pour laquelle il n'aura pas eu le final cut. En l'espace de trois films, c'est une vie de réalisateur qui semble s'achever : reconnaissance d'un jeune talent prometteur, gloire internationale et déchéance dans l'insuccès critique et public.

Mais tel le phœnix, Lynch va renaître de ses cendres. Revenant aux sources de sa création, il ne tournera désormais plus que des scénarios dont il est l'auteur (à l'exception de Une histoire vraie, en 1999, un film tellement sobre et linéaire qu'il fait figure d'ovni dans sa filmographie). Un univers tellement personnel qu'on ne saurait que le qualifier de « lynchien » explose enfin sur les écrans. David Lynch livre un univers sombre, onirique, empreint de sexe et de violence. Qu'elle choque ou qu'elle séduise, qu'elle fascine ou qu'elle repousse, son œuvre est immédiatement reconnue comme celle d'un véritable auteur. Bricoleur de génie, Lynch démonte la réalité et les codes du cinéma, puis réassemble les pièces pour créer un objet hybride et déconcertant. Blue Velvet (1987, Grand Prix du festival d'Avoriaz) n'est-il qu'un polar sur fond de kidnapping ? Sailor et Lula (1990, Palme d'Or au festival de Cannes) n'est-il qu'un road-movie sentimental ? Lost highway (1997) qu'un thriller ? Oui et non, et c'est justement cette liberté d'interprétation laissée aux spectateurs qui fait le sel du cinéma de Lynch. Celui-ci rassemblera devant sa série télévisée Twin Peaks (1990) un public fidèle et carrément accro, prêt à toutes les gymnastiques intellectuelles pour découvrir qui a tué Laura Palmer (notons tout de même qu'il en perdra un certain nombre en route avec Twin Peaks : Fire walk with me (1992), obscur complément de la série sur grand écran). Mulholland Drive, en 2001, œuvre magistrale et fascinante, verra quant à lui fleurir les hypothèses les plus diverses, des plus érudites aux plus farfelues. A défaut de nous livrer la clé de l'énigme, Lynch nous laisse assez de grain à moudre pour attendre sans s'ennuyer la sortie de son dernier opus, Inland Empire.

Dans cette filmographie, où faut-il chercher David Lynch ? Les récurrences thématiques (l'existence de deux mondes parallèles, la femme-double, le lien trouble entre amour et sexe, sexe et violence…) ou esthétiques (personnages immobiles, grands espaces vides, décor minimaliste…) ne nous donnent pas forcément beaucoup d'informations. Alors de quoi s'agit-il ? D'un pur exercice visuel ? De rêves retranscrits en images ? D'un discours philosophique ou psychanalytique ? Les avis sont tranchés, de l'obscur objet intellectuel prétentieux et vide de sens à l'expérience mystique. C'est sans doute la clé du succès de David Lynch : continuer à fasciner sans lasser, à intriguer sans perdre. Ecran Large vous propose aujourd'hui de mener votre propre enquête. Et forte récompense à celui qui parviendra à déchiffrer the David Lynch Code….

Pour accéder directement à un test DVD, cliquez sur la jaquette correspondante :

 




 

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