Hollywood vs Chine : ces 2 films mettent la misère à Mario, Marvel et compagnie
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23 juillet 2023
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23 juillet 2023
Parmi les plus gros succès du box-office 2023, il y a le film Mario, Marvel, Fast & Furious 10... mais aussi Man Jiang Hong (Full Red River) et The Wandering Earth 2, deux films chinois qui rappellent à quel point la Chine est un marché absolument énorme.
Qui règne sur le box-office mondial de 2023 ? Super Mario Bros., le Film bien sûr, loin devant tout le monde avec 1,3 milliard, suivi des Gardiens de la Galaxie : Volume 3 (plus de 840 millions). Mais avant Spider-Man : Across the Spider-Verse, Ant-Man 3, John Wick 4 et La Petite Sirène, il y a deux films dont vous n'avez probablement jamais entendu parler : Man Jiang Hong (ou Full Red River en anglais) et The Wandering Earth 2.
Ces deux blockbusters chinois ont remporté un succès absolument phénoménal en Chine, et le pire, c'est qu'ils n'ont eu besoin de personne puisque c'est quasi uniquement au box-office chinois qu'ils en sont arrivés là. C'est l'énième preuve que la Chine pèse de plus en plus lourd dans le secteur du cinéma, et que le plan pour dominer le monde (américain) avance comme prévu.
Hollywood face à la Chine
cluedo et science-fiction
Le nom de Man Jiang Hong (ou Full Red River en anglais) ne vous dit peut-être rien, pourtant c'est le dernier film en date de l'incontournable Zhang Yimou. Le réalisateur du Secret des poignards volants, Épouses et concubines et La Cité interdite n'avait jamais rencontré un tel succès. Et tout ça, c'est uniquement grâce à la Chine, le film ayant remporté des miettes sur les quelques autres territoires où il est sorti (Australie, Royaume-Uni, Nouvelle-Zélande, États-Unis).
Comment expliquer ce succès ? Full Red River a tous les bons ingrédients. Le film se déroule au XIIe siècle, autour d'une rencontre capitale entre Qin Hui, Premier ministre de la dynastie Song, et un représentant de l'état de Jin. Juste avant l'aube, l'ambassadeur est assassiné, et l'importante lettre qu'il amenait disparaît. Pour éviter d'être exécuté, un vieux caporal s'improvise détective pour l'état de Jin, tandis qu'un jeune officier le rejoint au nom de la dynastie Song. Et le duo a jusqu'au lever du soleil pour résoudre l'enquête, et espérer s'en sortir.
Comédie, suspense, huis clos et twists à la Cluedo : Man Jiang Hong a réuni un très large public, malgré ses 2h39 (et un final apparemment très patriotique, évidemment).
The Wandering Earth 2 ne sort pas de nulle part puisque c'est la suite (prequel en réalité) de The Wandering Earth, sorti en juin 2020 sur Netflix en France. Mais Netflix n'était qu'un détail dans la carrière du premier film, sorti au cinéma notamment en Chine, où il avait encaissé dans les 700 millions au box-office. The Wandering Earth 2 n'a pas fait mieux, mais a tout de même encaissé près de 605 millions au box-office chinois. C'est donc un carton plein.
À noter que ce Wandering Earth 2 sortira au cinéma en France, le 16 août 2023.
chine vs hollywood
Sortis l'un face à l'autre le 22 janvier 2023 (jour de fête du Nouvel An chinois), les deux films ont cartonné : plus de 673 millions pour Full Red River et plus de 605 millions pour The Wandering Earth 2, pour des budgets estimés à 70-80 millions. Ces chiffres sont colossaux, surtout que la quasi-totalité provient d'un seul territoire. Les studios américains rêvent de tels scores au box-office domestique (États-Unis et Canada, où ils récupèrent le plus sur les recettes), que même le phénomène Mario n'atteint pas (572 millions).
Bien sûr, ce miracle arrive parfois. Star Wars 7, Avengers : Endgame, Spider-Man : No Way Home, Avatar, Top Gun 2, Black Panther, Avatar 2, Avengers : Infinity War, Titanic, Jurassic World et Avengers, Star Wars 8 et Les Indestructibles 2 ont tous encaissé plus de 600 millions au box-office domestique.
Mais la machine chinoise est en marche, et ce n'est que le début.
Star Wars 7, plus gros succès au BO domestique (936 millions)
En 2019, le premier The Wandering Earth était le 13e plus gros succès de l'année, loin derrière les poids lourds hollywoodiens (2,7 milliards pour Avengers : Endgame, et plus de 1 milliard pour Le Roi Lion, La Reine des neiges 2, Spider-Man : Far From Home, Captain Marvel, Joker, Star Wars 9, Toy Story 4 et Aladdin). Mais c'était presque uniquement grâce à la Chine, avec près de 700 millions. À titre de comparaison, seuls six films ont fait autant ou plus au box-office domestique (États-Unis et Canada) : Star Wars 7, Avengers : Endgame, Spider-Man : No Way Home, Avatar, Top Gun 2 et Black Panther. Avatar 2, par exemple, s'est "contenté" de 684 millions.
Pendant ce temps, la Chine installe son modèle avec une efficacité presque sans faille. Si on regarde la liste des 50 plus gros succès de tous les temps au box-office chinois, les films ont tous moins de dix ans. En haut du podium : The Battle at Lake Changjin (2021), Wolf Warrior 2 (2017) et Hi, Mom ! (2021) ont encaissé plus de 800 millions en Chine. Il y a bien quelques blockbusters hollywoodiens au milieu (Avengers : Endgame, Fast & Furious 7 et 8), mais ce sont bien des films chinois qui dominent le marché chinois depuis une dizaine d'années.
La terre promise chinoise
china vs the world
Évidemment, ce n'est pas un hasard. La Chine redouble d'efforts pour s'imposer sur le marché du cinéma depuis les années 2010, avec comme ambition revendiquée de dépasser tout le monde. En 2015, quand le box-office mondial explosait les records, The Hollywood Reporter expliquait que la Chine y était pour beaucoup, avec une croissance hallucinante de 49%. En 2016, le pays célébrait sa place de numéro 1 mondial en termes de nombre d'écrans, avec plus de 40 000 salles (dont 85% équipées en 3D).
Et en 2020 puis 2021, comme prévu, la Chine devenait le plus gros marché du monde, devant les États-Unis. C'était en partie grâce/à cause de la pandémie, et depuis c'est également grâce/à cause de la pandémie que la Chine est repassée derrière l'oncle Sam. Mais difficile d'imaginer que post-Covid, ça ne sera pas encore renversé.
Car la pandémie n'est qu'un petit caillou dans la chaussure chinoise, qui a littéralement un plan pour dominer le monde (du cinéma). En 2021, l'administration chinoise avait expliqué son ambition jusqu'en 2025 : avoir plus de 100 000 écrans (alors qu'aux États-Unis, le nombre de salles a diminué) ; sortir un certain nombre de films conçus pour être des succès ; défendre les productions chinoises pour qu'elles restent majoritaires ; calibrer les sujets et les genres pour mettre en avant les valeurs chinoises ; développer un maximum de technologies ; et continuer à se placer dans les territoires étrangers. Le pays se projette jusqu'en 2035, pour devenir une méga-puissance du cinéma.
D'ailleurs, le succès de Full Red River n'est pas un simple coup de chance. C'est le fruit d'une stratégie du studio Huanxi Media, co-fondée par le producteur Dong Ping (Tigre et Dragon) et l'ancien avocat Steven Xiang. Leur objectif : produire des blockbusters réalisés par des réalisateurs superstars, et les sortir pendant les fêtes pour attirer un large public. Ils savent aussi s'entourer des bons partenaires, comme par Maoyan (plus grosse application de réservation de places de cinéma en Chine) pour ce film.
La Chine vs le QG des Avengers
relation toxique
La relation entre la Chine et Hollywood est particulièrement complexe. La Chine a longtemps été fermée aux productions étrangères et donc américaines (par exemple, aucun Star Wars n'y est sorti avant Le Réveil de la Force en 2015), mais a récemment ouvert ses frontières culturelles, avec des restrictions. Quantité de films ne reçoivent pas de visa d'exploitation pour des raisons plus ou moins claires, d'autres sont en partie censurés, et dans tous les cas, un studio hollywoodien aura du mal à assurer la promo voire la sortie sur place.
En plus, les États-Unis ne récupèrent qu'une petite partie des recettes du box-office chinois (environ 1/4). Mais le potentiel de ce marché est suffisamment énorme pour que la bataille en vaille la peine.
Fast & Furious et Marvel sont particulièrement bien implantés en Chine. Avengers : Endgame y avait encaissé plus de 630 millions, et même divisé par quatre, ça fait une jolie somme (presque 160 millions). Et c'est grâce à ces énormes chiffres que les blockbusters peuvent souvent atteindre le milliard voire plus. Au minimum, la Chine sert donc de solide levier marketing pour battre des records.
Dans certains cas, la Chine permet de sauver les meubles (en apparence). Warcraft s'est royalement planté au box-office domestique (à peine 50 millions), mais a cartonné en Chine (225 millions). Même chose pour Pacific Rim, dans une moindre mesure – et c'est pour ça que Pacific Rim 2 a pu voir le jour.
À ce titre, difficile de ne pas parler de Tencent Pictures, branche cinéma de la méga-boîte Tencent (spécialisée dans les services internet : réseaux sociaux, publicité, jeux etc.). Créé en 2015, Tencent Pictures a construit un pont direct avec les studios hollywoodiens, comme producteurs et/ou distributeurs. Wonder Woman, Warcraft, Venom, Terminator : Dark Fate, Monster Hunter, Bumblebee et Moonfall sont autant d'exemples qui montrent que la Chine essaye de récupérer une part du gâteau, et/ou tisser des liens avec Hollywood.
Contrepèterie à base de pied et Chine
le syndrome chinois
La relation reste en tout cas fragile. Pour reparler du cas Marvel, six films du MCU ont été privés de sortie en Chine : Spider-Man : No Way Home, Black Widow, Les Éternels, Shang-Chi, Doctor Strange 2, Thor : Love and Thunder. Des raisons plus ou moins claires avaient été données (les paroles pas très douces de Chloé Zhao et Simu Liu sur la Chine, la présence d'un journal chinois contestataire dans un coin du décor de Doctor Strange 2, ou encore l'emphase sur la statue de la Liberté dans No Way Home).
En réalité, l'explication se trouverait du côté du climat politique chinois, autour du 20e Congrès national du Parti communiste chinois et le 100e anniversaire du Parti qui ont eu lieu entre 2021 et 2022. Ce qui expliquerait pourquoi Black Panther 2 et Ant-Man 3 sont sortis en Chine depuis.
Malgré ça, les scores des récents blockbusters hollywoodiens au box-office chinois sont plus que tièdes, avec notamment Super Mario Bros., le Film (25 millions), Ant-Man 3 (39 millions), Les Gardiens de la galaxie 3 (86 millions) ou encore The Flash (25 millions), sachant que La Petite Sirène et Indiana Jones 5 se sont complètement plantés. Fast X (140 millions) a fait beaucoup moins que les records de la saga, tout comme le dernier Transformers (90 millions).
Signe des temps : même la superstar Tom Cruise a ralenti. Mission : Impossible – Dead Reckoning (Partie 1) a démarré moins fort que Fallout (25 millions, contre 77 millions), en troisième place derrière deux productions chinoises, Never Say Never et Chang An San Wan Li.
Pendant ce temps, et alors que Hollywood enchaîne les contre-performances depuis le début de l'année (Ant-Man 3, Shazam 2, Fast X, Donjons et Dragons, Transformers...), la Chine se félicite déjà d'avoir battu des records de fréquentation pour l'été 2023 (même pas fini), avec plus de 1,2 milliard de recettes. Rendez-vous en 2035 pour voir qui gagnera la partie donc.
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25/07/2023 à 10:49
MEA CULPA:
J'ai complètement oublié dans mon commentaire de parler d'une exception très importante. C'est d'autant plus idiot de ma part que c'est un sujet important pour moi depuis au moins 3 ans et que, par ailleurs, le leader mondial des produits culturels, Disney, a démarré dans cette activité.
Je veux parler des films et séries d'animation.
Là, par contre, la Chine a bien l'intention de devenir un acteur important du secteur au niveau mondial, même si pour l'instant, les studios chinois restent en deça des américains et japonais.
Autant je pense que le cinéma avec des acteurs est "glocal" (même si le terme est assez fumeux), autant par contre il me semble possible de faire des dessins animés avec un marché à la taille de la planète.
C'est le marché le plus juteux en terme de propriété intellectuelle et de produits dérivés.
Et, là, très clairement, il n'y a pas le moindre doute, les studios d'animation chinois ont clairement l'intention de dominer le marché à terme et de prendre la place de Disney.
J'ai un peu honte de ne pas y avoir penser avant.
@SebSeb
Entendu, ça me semble tout à fait cohérent et je n'ai pas d'avis contraire à formuler.
Bonne journée à toutes et tous et merci à l'auteur de l'article et aux internautes pour vos réactions à mon message
25/07/2023 à 00:10
une interview d un ministre de la culture chinoise, a déclaré tout le contraire, ils veulent le pouvoir même cinématogarphique, y a 4 ans plus ou moins, sans compter le controle de l état sur les productions actuelles, patriotisme, fiérté, supériorité, c est plus du cinéma mais de la propagande, a grand renfort de cgi, les acteurs -trices sont là que pour le superficiel, beaucoup de films sont produits , mais à la chaine, les stéréotypes sont légions et encore plus appuyés, les ralentis sont partout, tout le temps, plus rien à voir avec la grande époque, HK et shaw brother, tout est controlé, on voit que vous etes bien faible en matiére de cinématographie asiatique, faites une petite recherche,
24/07/2023 à 22:35
C'est du cinéma version Wish. Chez nous c'est du direct to vidéo. (Netflix à notre époque)
24/07/2023 à 14:21
@Grey Gargoyle
Les Chinois avouent depuis quelques années qu'ils souhaitent prendre la place des Etats-Unis en tant que mastodonte du monde, parce qu'ils disent qu'ils feraient un "moins mauvais" titan, se contentant de faire du commerce sans envahir militairement les territoires pour leur prendre leurs ressources, comme le font les US. Ce qu' Ecran Large décrit ici (merci d'ailleurs l'équipe, cet article est précieux en matière de réalisme culturel, et nos dirigeants feraient bien de s'en inspirer pour muscler notre modèle de production également en garantissant sa pérennité), s'inscrit totalement dans cette démarche, mais qui n'est pas antinomique avec ce que tu décris : être fort et dominant en local, en ayant protégé son gigantesque marché, et ensuite s'exporter en bonus, pour donner de la visibilité à l'américaine et faire du soft power. L'avantage de ceux qui voient et se donnent les moyens de construire à long terme.
24/07/2023 à 14:10
Merci beaucoup d'avoir répondu à mon message. C'est très aimable de votre part. Il n'y a effectivement pas de grands différends entre nous. Je le reconnais bien volontiers.
24/07/2023 à 12:49
@Grey Gargoyle
J'ai du mal à voir l'intérêt de cette simplification des choses pourtant. Par exemples, les films français marchent hors France (cf les rapports du CNC). Les films américains suivent plein de trajectoires différentes (capables d'être des bides ou des succès au box-office domestique, d'être censurés dans d'autres pays ou d'y être des cartons, de ne pas être exploités du tout dans d'autres territoires...). Quant aux films chinois qui marchent surtout en Chine : c'est littéralement ce que je dis dans l'article, donc je ne suis pas en désaccord non plus, forcément.
24/07/2023 à 12:41
PS: en fait, sauf erreur d'interprétation de ma part, j'ai donc l'impression d'être plutôt d'accord avec Karim. :-)
24/07/2023 à 12:40
@Grey Gargoyle
Je ne pense pas qu'on soit en désaccord.
Quand je parle de domination mondiale, en citant les plans établis par la Chine, je ne parle pas de films chinois qui vont marcher dans tous les territoires : je parle bien du poids du marché chinois (nombre d'écrans, recettes etc) vs celui des autres territoires. C'est cette forme de domination dont il est question, en premier lieu. C'est pour cette raison que j'insiste dans l'article sur l'autosuffisance de la Chine sur les films qui sont d'immenses succès... sans avoir besoin d'autres pays.
24/07/2023 à 12:35
Bonjour, mon point de vue n'est pas tout à fait le même que le vôtre. Il y a, en Europe occidentale et aux USA depuis le 19ieme siècle, une peur récurrente de la Chine. Depuis les années 70, cela correspond à une inversion progressive des rapports de force entre la Chine continentale totalitaire dont le modèle économique est centré sur l'industrie nationale d'un côté et l'alliance libérale atlantique Amérique-Europe dont le modele economique est centré sur la finance et la liberté de circulation des capitaux de l'autre. Cependant, si les chinois ont un modèle industriel d'exportation en ce qui concernent les biens manufacturés, je ne pense pas qu'ils réfléchissent de la même manière en ce qui concerne les biens immatériels culturels. Dans ce cas précis, le modèle suivi me semble beaucoup plus national que mondial. L'idée principale du PCC et de l'État est beaucoup plus de fonctionner en vase clos et de fournir des héros chinois au public chinois. En clair, les blockbusters chinois sont faits pour la Chine pas pour les marchés extérieurs. L'idée principale du PCC est qu'un film chinois ne doit pas promouvoir un libéralisme à l'américaine. Il y a clairement une stratégie s'opposant à Tom Cruise et Disney mais c'est plus une stratégie de protectionnisme du marché intérieur que de conquête de marchés extérieurs. Je ne pense pas que le cinéma chinois veuille dominer le marché mondial, par contre, je suis sûr et certain qu'il veut dominer son marché domestique et se débarrasser des américains sur son territoire ou les empêcher d'entrer. Ce n'est que mon opinion. Bien cordialement
24/07/2023 à 09:56
@Karim le bleu
Vision extrêmement simpliste et quantité de preuves du contraire, donc non.
Bisous