Black Adam : 5 clichés qui devraient être interdits dans les films de super-héros

La Rédaction | 2 juin 2023 - MAJ : 05/06/2023 11:21
La Rédaction | 2 juin 2023 - MAJ : 05/06/2023 11:21

Black Adam est une déception, et c'est en partie parce qu'il est un condensé de clichés qu'on ne veut plus voir dans les films de super-héros.

NOTRE CRITIQUE DE BLACK ADAM

Comme il s'en est vanté pendant des mois sur Instagram avant la sortie, Dwayne Johnson a soulevé de la fonte et des immeubles pour enfiler le costume – sans rembourrage – de Black Adam dans le blockbuster éponyme sorti le 19 octobre 2022. Alors que le DCEU promet de se reconstruire grâce à l'attendu au tournant The Flash (Black Adam s'avère finalement l'un des derniers projets de l'ancienne version de cet univers partagé), l'interprète de Teth Adam s'était ironiquement donné à l'époque une modeste mission.

En effet, c'est sur ses larges épaules qu'était censée reposer la responsabilité de sauver l'univers étendu de DC, la Warner, le cinéma, le monde et le multivers avec un film qui redéfinirait tous les enjeux du DCEU en plus de présenter un nouveau genre de héros (un anti-héros, tout bêtement).

 

 

Dans le meilleur des mondes (celui de The Rock), le film aurait dû cartonner en salles, renflouer les caisses du studio et concrétiser un prochain Black Adam 2. Mais en plus de ne pas être dans les plans du DCU 2.0 de ses nouveaux architectes James Gunn et Peter Safran, de ne pas avoir convaincu la rédaction, Black Adam compile aussi tous les écueils les plus ringards qui devraient depuis longtemps être interdits dans les films de super-héros. ATTENTION : SPOILERS PARTOUT !

 

 

LA MYTHOLOGIE AU RABAIS

Le prologue de Black Adam annonce la couleur : c'est d'une ringardise tellement spectaculaire que les souvenirs des meilleurs mauvais films du genre (Green Lantern, Elektra et autres) reviennent en tête. En quelques minutes, les informations sont déversées par une narration-tractopelle, le lore est présenté à coup de phrases solennelles, et tout est simplement posé comme une suite de parpaings.

Il y a un affreux flashback fondateur auquel le film reviendra plusieurs fois, pour révéler des choses incroyables (non). Il y a une couronne-MacGuffin  basique, qui aurait pu être une pierre, une Daddy Box ou un chiffon tellement le machin est trimballé et brandi comme un symbole de "JE VOUS ASSURE LE SCÉNARIO A DES ENJEUX GRAVES".

 

Black Adam : photoC'est le méchant, c'est écrit sur son front

 

Le méchant est tellement méchant qu'il se transforme littéralement en petit diable (mais version Doom sur Nintendo 64), et qu'il est envoyé par les diables en chef, depuis leur royaume de lave. Ils veulent que l'enfer arrive sur Terre, et ça passe bien sûr par un portail dans le ciel, semblable aux 49 autres vus ces 15 dernières années. Il y a aussi l'Eternium, mix de vibranium et de kryptonite, utilisé comme joker de temps en temps. Tout ça s'enchaîne, et devient vite aussi absurde et abrutissant que le résumé.

Encore un doute sur la vaste blague de cette mythologie ? Le "twist" du film repose sur un message type fortune cookie, qu'il faut lire à l'envers (enfin, dans une certaine mesure) pour comprendre que le troisième acte arrive bel et bien. Bref, tout le monde se contrefout d'installer et ouvrir une mythologie. Tout ça n'est que confettis dans la grande parade Black Adam.

 

Black Adam : photo, Dwayne JohnsonJe ne lis pas les scénarios, je les brûle-grille-tape-annihile

 

L'ANTI-HéROS EN CARTON

Si la promotion de Black Adam a bien insisté sur une chose, au-delà de l'entraînement herculéen de Dwayne Johnson et du futur combat contre Superman, c'est bien le fait que le personnage n'est pas un héros, mais un anti-héros, qui devait donc bousculer la figure super-héroïque classique (enfin, en passant après The Batman, Birds of Prey ou The Suicide Squad pour ne citer qu'eux). Le film essaie de le caractériser comme une brute épaisse qui cogne tout ce qui bronche, n'hésite pas à démembrer les gens qu'il envoie dans les airs, et qui plus globalement fait l'apologie de la violence et de la vengeance. 

Sauf que dès le départ, ce versant sombre est mis à mal étant donné qu'il s'en prend uniquement à un gang de mercenaires clairement présentés comme les ennemis des gentils, et par définition comme les sbires au service du grand méchant du film. Il sauve ensuite une mère de famille et un gamin, échange quelques coups avec la Justice Society sans blesser un seul de ses membres, et finit par faire sa rédemption après avoir ouvert le petit coeur meurtri qui bat sous son poitrail de taureau. 

Aucun innocent n'est menacé par Black Adam et sa puissance dévastatrice ne fait aucune victime collatérale, ce qui ne permet pas vraiment d'en faire un protagoniste réellement ambigu moralement. Peu importe qu'il répète cent fois qu'il est dangereux ou que Dwayne Johnson fronce les sourcils sur chaque plan, on a du mal à croire que ce personnage puisse réellement être une menace pour le monde.

 

Black Adam : photo, Dwayne Johnson"D'ici la fin du film on sera copains"

 

les humains inutiles

Black Adam souffre du même problème qu'un Godzilla vs Kong ou qu'un Transformers 2, dans le sens où les humains (sans pouvoirs ni compétences particulières) servent principalement d'élément déclencheur au récit et peuvent difficilement avoir plus d'impact sur celui-ci passées les 20 premières minutes du film

Après qu'Adrianna (Sarah Shani) a réveillé Black Adam en lisant une formule magique, le film tente désespérément de lui trouver une utilité sans jamais réussir à lui donner du poids ou de la profondeur. Entre la couronne magique qu'elle trimballe de droite à gauche, le gamin à retrouver qui meuble le scénario, les traits d'humour lourdauds de tonton Karim et la révolte de Kahndaq torchée en cinq plans avec 15 figurants qui tapent sur des morts-vivants sortis de nulle part, leur rôle est inévitablement trop maigre dans un film qui se vend principalement sur la promesse d'énormes bastons dans les airs.

Évidemment, ces personnages pourront toujours être recyclés dans une série HBO Max ou mentionnés dans un autre film, voire réapparaître dans la suite, où ils auraient suffisamment d'espace pour exister et évoluer, loin de la Justice Society et des motos volantes. Mais, est-ce qu'on a vraiment besoin ou envie de les revoir ? 

 

Black Adam : photoLeur mort aurait eu bien plus d'impact que leur survie

 

LA réalisation cheapos post-matrix-snyder

Le ralenti est-il le symptôme ultime de la pauvreté du cinéma hollywoodien ? Quand Dwayne Johnson tape, quand Cyclone débarque, quand un truc explose, voire quand quelque chose de dramatique se passe, c'est le (seul) joker mise en scène de Black Adam.

Parfois, ça ressemble à un ersatz de Zack Snyder, particulièrement dans la scène où les héros libèrent le môme dans le QG des méchants, et que tout le monde a droit à son ultra-ralenti au moment de l'explosion. Parfois, ça rappelle du Paul W.S. Anderson, notamment quand Black Adam se libère et s'échappe au milieu des gouttes d'eau (c'est le moment de revoir Resident Evil : Afterlife). Difficile de déterminer lequel est le moins pire, tellement tout ça n'a plus aucune valeur ni identité. Pire encore : l'action est trop souvent perdue et découpée dans les ralentis, empêchant de véritablement s'amuser avec ce chaos de feu et d'éclairs.

 

Photo Ali LarterA deux doigts de regretter Paul W.S. Anderson

 

De La Maison de cire jusqu'à Instinct de survie, en passant par Esther et plusieurs Liam Neesoneries, Jaume Collet-Serra avait prouvé qu'il était un bon faiseur. Avec Dwayne Johnson, il est entré dans la cour des blockbusters, d'abord avec Jungle Cruise, puis Black Adam. Sans surprise, il n'y a plus une miette de personnalité dans le produit final. C'est certes au-dessus de la moyenne du pire, grâce à un découpage globalement solide et quelques effets presque cinématographiques – tenus sur 5 secondes maximum.

Mais entre les interludes musicaux (c'est le moment de voir X-Men : Days of Future Past), les poses référencées (ce n'est jamais le moment de citer Sergio Leone avec Dwayne Johnson), et la marée de CGI dans une direction artistique classique, Black Adam se contente de reproduire les petites recettes des copains/concurrents. D'où un film qui n'a rien à défendre, hormis peut-être la première apparition du personnage, visuellement soignée et bien pensée, avec même quelques morts savoureuses.

 

Black Adam : photoMister Freeze

 

L'HUMOUR OBLIGATOIRE

C'est ce qui gâche littéralement la grande majorité des films (et désormais des séries, coucou She-Hulk) de super-héros depuis près de 15 ans : leur humour forcé. Marvel en a même fait une identité au fil de ses oeuvres. Le procédé est ainsi devenu le moyen de gagner la sympathie des bambins d'un côté, la sérénité des parents de l'autre tout en permettant aux scénaristes de se sortir de situations trop graves à l'aide de quelques vannes. Et si c'est problématique pour les enjeux souvent sérieux (fin du monde, ennemis très très méchants...), rendre les super-héros amusants à des fins humaines n'est pas si dérangeant sur le papier.

Le problème avec Black Adam, c'est que le monsieur est un anti-héros, donc un personnage a priori pas franchement sympathique. Une évidence dont Black Adam fera fi puisque le long-métrage est parsemé d'un humour, une nouvelle fois, vain et théâtral. Non pas que l'humour n'ait aucun intérêt, loin de là. Par exemple, le premier clin d'oeil à l'univers DC avec ce poster de Superman dont la tête est trouée par un flash de Black Adam peut faire sourire.

 

Black Adam : photoQuand tout peut devenir une blague à chaque instant

 

Le gros hic, c'est que la comédie est une question de dosage et forcément, lorsque Black Adam défourraille toutes les icônes de la Justice League quelques minutes plus tard lors d'un combat face à Hawkman, l'artificialité prend le dessus sur la farce. Même chose pour le comique de répétition lorsque Black Adam traverse des murs : une fois pourquoi pas, deux fois à la limite, mais au bout de trois, quatre, cinq, voire six fois, bordel tuez-nous. Et c'est encore pire lorsqu'un personnage lui demande même si les portes existaient à son époque et si oui, pourquoi il passe donc par les murs.

De fait, le film n'arrive jamais à insuffler une atmosphère véritablement dramatique tant il est parsemé d'une ironie quasi permanente (cette parodie lunaire de Leone, mais pourquoi ???). Sans trop de surprise, le personnage de Dwayne Johnson est d'abord présenté comme un gros dur, monolithique... avant qu'il finisse par user de sarcasmes, et par jongler entre les traits d'esprit et la dérision. Quand l'anti-héros se transforme peu à peu en clown monocorde et que le reste de la bande ressemble à une brochette de bouffons, Black Adam fait régulièrement pitié, voire rend mal à l'aise, mais jamais pour les bonnes raisons.

Tout savoir sur Black Adam

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commentaires
Cmdtp
03/06/2023 à 14:14

Svp Écran Large j’apprécie vos plumes mais il faut arrêter avec « moins pire ».

Sinon sur le fond bon résumé. Black Adam le film résumé en un mot c’est « ringard ».

Pseudonaze
03/06/2023 à 11:40

More is less...

Wolf
03/06/2023 à 01:18

@ok... +1

ok...
03/06/2023 à 00:30

L'humour des films de super héros, ça vous gêne seulement quand vous avez pas l'humeur. Quand il s'agissait de Thor Ragnarok qui était une veritable purge en grande partie à cause de cet overdose d'humour, là vous avez choisi d'aimer. Tout l'effet dramatique de l'apocalypse censé être présent d'après le titre du film (ragnarok...) était complètement annihilé par la niaiserie des blagues, et même jusque dans un scénar trop léger, mais bizarrement pour cette bouse ça passait crème.

Enikay
26/10/2022 à 15:39

Mdrr c'est pas possible être aussi aigri, on dirait que le réalisateur ou un acteur du film a chié devant votre porte. Le film était pas parfait je le consois, mais franchement s'en prendre à lui comme si c'était le pire du DCEU ? C'est ce genre d'articles chiants sur ce film sur lesquels je tombe à longueur de journée, film très bien reçu par le public par ailleurs. Je précise qu'un article qui fait des éloges à absolument tout et n'importe quoi en rapport avec le film n'est guère moins intéressant pour moi à lire. Ce que je veux dire c'est que citer tous les points positifs ET négatifs, c'est ça un truc agréable à lire. Et pas exagérer sur le négatif, ni sur le positif non plus. On a l'impression ici d'avoir affaire à des haters. Bref vous faites chier, et en particulier la presse américaine, c'est à cause de ça qu'ils décident d'annuler les potentielles suites ou changer de stratégie pour sortir un film cette fois véritablement merdique ensuite en croyant faire mieux, tsais quand après un "Ragnarok" tu lâches un "Love and Thunder" ou quand après un "Crimes of Grindelwald" tu nous sors un "Secrets of Dumbledore"

Tonto
25/10/2022 à 11:57

Vous parlez d'humour envahissant, et c'est pas tout-à-fait faux, mais pour moi, il subsiste quand même une différence fondamentale entre Marvel et DC, c'est que Marvel a décidé d'introduire le second degré jusque dans l'écriture même de ses personnages et de son récit, alors que DC met un point d'honneur à aborder ses personnages et son récit avec un premier degré tellement assumé qu'il crée son propre décalage avec une histoire tellement bête qu'elle ne peut normalement pas être prise au premier degré.
Et ça crée un décalage intéressant, qu'on aura trop vite fait d'appeler du "second degré", mais qui, à mon avis, est quelque chose de plus subtil. Une sorte de regard amusé sur un premier degré assumé. Mais qui, contrairement au vrai second degré (et à certains Marvel), ne dédramatise rien du récit.

Tonto
25/10/2022 à 11:54

Je pense que la parodie de Sergio Leone fait justement partie de la patte de Jaume Collet-Serra. Il a montré avec Jungle Cruise (excellente surprise, ne vous en déplaise ;) qu'il était attaché à un certain cinéma traditionnel. Mais je pense qu'il est conscient d'avoir "vendu son âme" au blockbuster moderne, et que c'est exactement ce qu'il montre dans ce film : au lieu de ressasser le passé, il dessine les contours du blockbuster moderne, qui enterre le cinéma traditionnel tout en le consacrant comme un modèle inatteignable.
Pour moi, c'est tout le sens de cette scène comme le sens général du film et de ce pays où l'ancien temps n'est plus présent que sous forme de quelques vestiges engloutis par une ville qui s'est follement urbanisée sans respect pour ces ruines. Je pense que Collet-Serra est clairement dans la même démarche que James Wan : rendons hommage au cinéma traditionnel, cédons aux codes du blockbuster moderne, mais faisons-le en nous amusant !

Personnellement, j'ai assez apprécié ce regard amusé du réalisateur sur son propre film comme un film qui se lâche dans tous les sens sans chercher rien d'autre que la scène d'action la plus grosse. Et comme je n'attends plus rien de DC, je dois dire que pour moi, Black Adam, et cette sorte d'auto-conscience de sa propre nullité est le haut du panier de leur production. Au moins, le film ne pète pas plus haut que son cul comme n'importe quel film de Snyder.
S'il fallait résumer Black Adam en une devise, je dirais : faire n'importe quoi, mais le faire bien.

Ixien
25/10/2022 à 04:09

Votre paragraphe sur l'antihéros est faux. Un antihéros tue les antagonistes. Il ne fait pas de mal aux civils. Et il est très clair à ce sujet.

Kk
24/10/2022 à 22:39

Zack snyder reviens par pitié

Simon Riaux
24/10/2022 à 13:43

@Lis mon message au lieu de mon pseudo trouduc

Jetez donc un oeil au film avant de poster des commentaires aussi embarrassants.

Vous ignorez manifestement que Black Adam, au cinéma, n'a jamais été et ne sera jamais roi. Dommage de jouer les gros bras défenseurs d'une oeuvre... quand on ne la connaît pas.

Quant au concept d'anti-héros, navré, mais c'est un concept, avec une définition. Nous n'en avons pas de vision particulière.

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