Bloody Bird : le slasher qui a plumé Scream et Halloween

Simon Riaux | 11 janvier 2022
Simon Riaux | 11 janvier 2022

Au royaume du slasher, Halloween, Vendredi 13 et Scream font figure d'empereurs incontestés. Pourtant, un certain Bloody Bird leur tient la dragée haute.

Avec leurs masques et leurs longs couteaux, Michael Myers, Jason Voorhees et Ghostface sont aujourd'hui encore les emblèmes de ce genre qui déferla durant les années 80 et 90 dans les salles. Longues silhouettes silencieuses, plus ou moins robustes, habiles et armées, elles ont pratiqué l'équarrissage de proto-adolescents ou de fornicateurs du dimanche avec dévouement. Que leurs franchises respectives aient cristallisé les codes naissants du genre, les aient amenés du côté de la série B, ou en aient proposé une relecture quasi méta, elles dominent encore la mémoire collective quand résonne le terme "slasher".

Pourtant, on aurait tort de considérer que seul Hollywood a travaillé cette figure bien spécifique, tant l'Europe, et tout spécifiquement l'Italie, aura été force de proposition dans le domaine de la charcuterie artisanale. Mouvance issue du Giallo, des propositions sanguinolentes de Dario Argento ou encore Mario Bava, le slasher transalpin est rarement regardé pour ce qu'il est, à savoir une contre-proposition riche, bourrée d'idées originales, dégorgeant d'une violence tour à tour récréative, brute, esthétisée ou psychanalytique. Le Bloody Bird de Michele Soavi est tout cela à la fois.

 

Bloody Bird : Affiche officielleUn film très chouette

 

AU THÉÂTRE CE SOIR

Sur le trottoir, un chat avance à pas feutrés, slalomant entre les passants, réagissant à la myriade de sons empuantissant la ville. Demeurant à son niveau, la caméra s'arrête lorsqu'elle arrive au niveau de deux jambes féminines. Nous découvrons le visage, puis la mine de l'intéressée. Vulgaire, lascive presque, elle demeure au centre de l'image, jusqu'à ce que deux bras vigoureux s'emparent d'elle pour la précipiter dans les ténèbres poisseuses d'une ruelle à quelques pas de là. Puis, la caméra recule, jusqu'à dévoiler l'illusion dont nous avons été victimes durant près d'une minute. La supercherie est simple, mais tout le projet du réalisateur est contenu dans cette entourloupe initiale.

Nous n'étions pas dans quelque quartier malfamé d'une ville anonyme, un soir humide d'hiver, pas plus que nous assistions au meurtre sauvage d'une travailleuse du sexe. Nous assistons en réalité à la répétition d'une comédie musicale, aux atours aussi vulgaires que grossiers, dont tous les interprètes paraissent comprendre les évidentes ficelles et les limitations voyantes. La mise en scène aurait pu en rester là, mais dès lors, le dialogue entre scène, public et coulisses va s'intensifier.

 

Bloody Bird : photoUn faux meurtre qui en annonce beaucoup d'autres, bien réels

 

Non pas que Soavi se risque à répéter le dispositif, le film ne se prend pas pour un jeu de bonneteau qui voudrait multiplier les pistes, ou tout simplement nous perdre en questionnant inlassablement ce qui relève de la fiction, de la mise en abime ou d'un jeu de manipulation ludique, malin, mais finalement répétitif. Non, ce qui va se dérouler sous nos yeux est finalement plus cruel, et peut-être pervers. Dès lors que l'action s'accélère, après qu'un tueur en série ait enfermé les protagonistes dans l'enceinte de leur théâtre pour mieux les massacrer, le récit (qui ronronnait un peu trop), se métamorphose pour se transformer en surréaliste turbine à viande.

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commentaires
Snake88
12/01/2022 à 13:34

Arrivederci a été un sacré choc pour moi à l'époque (cette fin putain !) mais effectivement il est sorti dans l'indifférence générale ! Pour Dellamorte, je me souviens d'une ambiance macabre assez unique...

Dario 2 Palma
11/01/2022 à 18:48

Si on passe outre son casting très moyen (défaut assez récurrent du cinéma fantastique italien, il faut avouer) et son aspect 80's marqué, ce "Bloody bird" reste un formidable slasher/giallo, pour ma part Soavi n'a jamais fait mieux, même si j'aime également beaucoup son plus ambitieux -mais plus foutraque?- "Dellamorte dellamore". "Bloody bird" c'est du bricolage de génie, petit budget petites ambitions certes mais déjà un sens du cadre évident, des fulgurances esthétiques, des meurtres barbares et quelques scènes d'angoisse réussies dont un final magistral!
J'ai peur par contre de voir le dernier Soavi "La Befana vien di notte" sorti directement en dvd chez nous sous le titre "La sorcière de Noël"...les échos sont hélas assez désastreux.

JR
11/01/2022 à 12:33

C'est drôle car Dellamorte... A été une découverte VHS (je me souviens d'une grosse campagne bande annonce en début de VHS...), quand à Arrivederci... Qui signait son retour (et qui est très bien), je me souviens surtout de salles de projo archi vides hélas...