Critique : Le Créateur

Laurent Pécha | 4 avril 2007
Laurent Pécha | 4 avril 2007

Albert Dupontel est un cinéaste et un auteur génial et Le Créateur en est la preuve irréfutable. À l'heure où le dernier bébé du comédien-réalisateur (Enfermé dehors) débarque sur nos écrans, il est bon de revenir sur un film qui par la faute d'un producteur incompétent, a vu sa sortie salles massacrée au grand dam de son auteur qui en garde encore un souvenir douloureux pour le moins vivace.

Si Bernie constituait déjà un avertissement sur le talent du bonhomme avec la création d'un univers bien particulier dans le trop tranquille paysage de la comédie à la française, Le Créateur impose instantanément Dupontel comme un authentique cinéaste. Un réalisateur avec une vraie vision qui ne se contente jamais de manier l'humour noir, voire trash, au profit de simples sketchs. Osant s'attaquer à un thème pour le moins rebattu (la création ou plutôt ici la difficulté voire l'impossibilité de créer) le « jeunôt » impose une maturité de tous les instants. Film réfléchi de A à Z - aucun détail n'est laissé au hasard -, Le Créateur entérine le style Dupontel basé sur un désir rare (en France notamment) de faire parler la caméra. C'est ainsi que l'outil technique est ici vu comme un acteur à part entière qui fait naître des idées, des sentiments, bref qui déclenche des émotions.

 Mais l'homme ne se contente pas d'être un cinéaste virtuose, il confirme sa capacité à aimer les comédiens et à s'en servir pour créer un univers unique. Le Créateur est ainsi l'occasion de (re)découvrir une famille d'acteurs. Tous ont ce que l'on appelle une « gueule » et une présence énorme. De la formidable Claude Perron (muse et compagne du cinéaste) d'une drôlerie involontaire et jouissive en diablesse réincarnée prête à tout pour que la pièce du pauvre Darius s'écrive à l'attendrissant Philippe Uchan en voisin prévoyant et prévenant de Darius sans oublier la prestation hilarante de Paul le Person en ivrogne cocu et désabusé, ou encore la désopilante apparition d'un ex Monty Python (Terry Jones) pour personnifier ni plus ni moins que Dieu.

À l'instar des films de Woody Allen, Le Créateur ne pourrait pas être si bon sans la prestation d'Albert Dupontel lui-même qui a cette immense qualité d'être tout simplement drôle sans avoir à faire quelque chose. Alors quand il joue des scènes aussi surréalistes que le massacre des bretons à coups de canon et d'épée (« Kénavo les bouseux ! ») ou aussi désopilantes que le défonçage de porte cochère à coup de bagnole (« quand on change le code, on prévient »), le bonhomme devient totalement irrésistible.

On pourrait disserter ainsi pendant des heures et multiplier les raisons pour lesquelles Le Créateur est un film incontournable. On s'arrêtera simplement à cette remarque : c'est tout bonnement le meilleur deuxième film français jamais réalisé.

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(5.0)

Votre note ?

commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire